David Petraeus, a Chronicle of Literary History

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L’affaire du général américain et de sa maîtresse, revue à la manière non pas d’un vaudeville mais du marivaudage.

Jill a-t-elle couché avec David? John est-il amoureux de Jill? Holly pardonnera-t-elle au célèbre Général?

On dirait Dallas, revu et parodié par les Inconnus. Alors que ce sont là les vraies questions que se pose la justice américaine – et nous avec, voyeurs fascinés par cette histoire d’adultères, de hauts gradés, d’attirance bimbologique et de messages envoyés sous le coup de la jalousie (hello, Valérie Trierweiler)…

Vous le savez. Dans ce journal parfumé et éthéré, c’est à moi qu’il revient de jouer les éboueurs de l’actualité. Cette histoire, je vais donc vous la raconter.

Tout aurait commencé à Kaboul. Dans l’aube poudrée d’un destin infini, David et Paula font du jogging. Lui, 60 ans. Elle, 40. Lui, brillant mâle alpha en débardeur camouflage. Elle, intello tendance Lara Croft. Crac-crac. Lui, Tarzan; elle, Jane.

Sauf que ces amants ne sont pas ordinaires. Lui, c’est le général quatre étoiles David Petraeus, marié depuis 40 ans, héros de la nation, artisan du retrait de l’armée US de l’Irak, stratège comparé à Eisenhower, grand communicateur, républicain qu’Obama nommera à la tête de la CIA pour calmer ses visées présidentielles. Elle? C’est sa biographe, Paula Broadwell, connue pour son ambition mammaire et sa tête bien faite. Quand leur liaison adultérine a-t-elle commencé? La justice devra le déterminer. Toujours est-il qu’au lieu d’avaler des kilomètres, ces deux accros de fitness finissent par froisser les mêmes draps. Why not, après tout.

Las. Un jour, une connaissance du général, une certaine Jill Kelley, connue pour son entregent, son mari bronzé, ses cartes de crédit exsangues et sa plastique evalongorienne, contacte un de ses amis qui bosse au FBI. Elle reçoit des mails de menace, lui dit-elle. Elle a peur. Le copain du FBI, Frederick Humphries, en parle à ses supérieurs. Ceux-ci empoignent l’affaire. Pour tromper l’ennui, Frederick flashe sur Jill. Il lui envoie des photos de lui torse nu, où il rentre courageusement le ventre. Bref, passons.

Le FBI croit encore à une banale affaire. Il remonte le cours des mails anonymes et découvre leur auteur. Mon dieu, mais c’est Paula, malade de jalousie à l’idée que son amant tombe dans les griffes de Jill (si vous ne suivez pas, regardez d’avantage les feuilletons de bas étage, c’est excellent pour la mémoire, ça retardera votre Alzheimer). Donc, le FBI confisque l’ordinateur de Paula, y découvre sa liaison secrète avec le général, ainsi que, semble-t-il, des documents classés. Trahison. Démission. Au passage, la police note que pour communiquer, Petraeus et son amante empruntent une méthode typique des terroristes: au lieu de s’envoyer des mails facilement interceptables, ils les stockent dans le dossier «brouillons» d’une adresse commune… Bizarrement, toute l’histoire sort peu avant les auditions de l’affaire de l’attaque du consulat de Benghazi, où Petraeus doit être entendu. Et puis, re-coup de théâtre: les enquêteurs découvrent des mails «inappropriés» entre Jill la bimbo et… un autre haut gradé, le commandant des forces de l’Otan en Afghanistan, John Allen! Voilà encore entamé le prestige de l’armée à une époque, la nôtre, qui exige que coïncident discours publics et vies d’alcôve…

Dallas? James Bond? Oui, bien sûr. Mais on pense surtout à… Marivaux. Oui. Marivaux, où souvent, tout arrive par la faute et par la grâce de lettres volées, de billets interceptés et de missives égarées – ici remplacés par un ballet de mails brûlants. Parce que ce qui fait la grandeur d’une fable de théâtre comme d’une basse intrigue people, ce ne sont ni les actes cachés, ni leurs protagonistes sulfureux. Mais la façon dont ils sont découverts, interceptés, publiés. Force des révélations.

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