The American Fiscal Cliff: The Irresponsible People

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La falaise fiscale américaine – Les irresponsables

Cela fait deux ans que les républicains du Congrès savent que, faute d’un accord fiscal avant le 31 décembre 2012, les États-Unis seront confrontés à une autre récession. Cela fait des semaines que les républicains savent qu’une majorité de leurs concitoyens les tiennent pour responsables du marasme fiscal. Rien n’y fait. Ils étaient et restent butés, donc irresponsables.

Dans leur édition de vendredi, des quotidiens américains ont raconté une scène sidérante. Une scène qui révèle combien des élus sont irresponsables. Alors que tout un chacun sait que la santé financière de l’État fédéral commande une opération urgente, voilà qu’on apprenait que les sénateurs se tournaient les pouces parce qu’ils estimaient qu’il revenait aux représentants de leur présenter un paquet fiscal. Histoire de ne pas passer pour les empêcheurs de tourner en rond, les représentants avançaient que c’était au tour des sénateurs de concevoir et de présenter une solution. Pour reprendre le mot de Ben Bernanke, le patron de la Réserve fédérale, les États-Unis sont à la périphérie d’une falaise – et non d’un mur ! – fiscale, et que font les membres du Congrès ? Ils dansent la valse du cul-de-sac.

Il y a, dans cette histoire, un aspect jusqu’au-boutiste, une furie financière qui en dit très long sur l’emprise que détient une minorité d’ultras sur le Parti républicain. Emmenée par Jim DeMint et Rand Paul, la minorité en question est si fanatiquement opposée à la moindre hausse d’impôt qu’elle est prête à ce que tous les Américains subissent une… augmentation d’impôt. On s’explique. Si, d’ici lundi soir, il n’y a pas eu d’entente, alors il y aura automatiquement, à compter de mardi, l’application d’une combinaison faite de hausses de taxes et de réductions des dépenses pour un montant totalisant 700 milliards de dollars.

Pour bien mesurer l’étendue des dégâts que bien des républicains sont enclins à infliger, il faut savoir que la soustraction financière évoquée plus haut sera équivalente à une contraction de 5 % du PIB. Soit une contraction égale à celle de la… Grèce ! Bref, non seulement les États-Unis sombreraient encore en récession, mais cela plongerait le monde dans une autre crise économique. Et ce, parce que les mots « taxe » et « impôt » possèdent un je-ne-sais-quoi de satanique qui horripile ces élus, par ailleurs fanatiquement religieux, comme DeMint.

En ce qui concerne précisément les cadeaux fiscaux alloués par Bush fils aux riches, on se souviendra qu’en septembre dernier, l’économiste Thomas Hungerford, du Congressional Research Service, soit une administration non partisane qui produit des analyses au bénéfice des élus, a publié une étude consacrée à l’argument suivant : toute baisse d’impôt accordée aux riches dope l’activité économique du pays. Après avoir étudié l’histoire fiscale des 65 dernières années – 65 ans ! -, Hungerford est arrivé à la conclusion qu’il n’y avait aucune corrélation entre les baisses d’impôt et l’accélération économique. On a également appris que le 1 % des plus riches possède le tiers de la richesse du pays, soit un niveau jamais vu depuis 1913. Quoi d’autre ? On a également appris qu’après des décennies d’équilibre dans la répartition des richesses, l’écart entre les riches d’un côté, la classe moyenne et les pauvres de l’autre n’a pas cessé de se creuser depuis 1977.

Cette étude a tellement ulcéré les républicains du Congrès qu’ils ont fait le siège du Congressional Rersearch Service afin que ce dernier retire le travail d’Hungerford des tablettes. Le pire est qu’ils ont atteint leur objectif. On insiste, ils ont obtenu le gommage d’une étude signée par une organisation… non partisane ! De quoi partager le dépit profond du maire de New York et ancien républicain Michael Bloomberg, qui estime que son ex-parti est la proie de bigots et d’imbéciles qui s’échinent à tordre le cou à tout ce qui rappelle de près comme de loin l’esprit rationaliste.

Pas plus tard que la semaine dernière, les idiots inutiles du parti sont parvenus à humilier leur leader à la Chambre des représentants, soit John Boehner. Bien conscient que sa formation avait perdu la présidence ainsi que des sièges au Sénat, conscient également que la grande majorité des Américains veulent un accord prévoyant notamment la fin des cadeaux de Bush, il a présenté un plan logeant à l’enseigne du compromis. Non seulement les fous furieux de son propre camp l’ont battu, ils se sont appliqués à l’écraser. Alors qu’ils savent pertinemment que, si d’ici le 31 décembre il n’y a pas d’accord, s’ensuivra, outre les conséquences mentionnées plus haut, le risque que les États-Unis d’Amérique fassent défaut en mars. Au fond, les taxer d’irresponsables relève de l’euphémisme.

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