Confessions of a Brute

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Confessions d’une brute

Le spectacle a duré une bonne heure et demi, lardée de pubs sirupeuses payées au prix fort du super prime time. Et le spectacle était pénible. Si Lance Armstrong admet d’entrée que sa formidable histoire était un « grand mensonge »,  une illusion nourrie par le cocktail détonant des méga tricheurs, ce levé de rideau n’annonce même pas le grand théâtre des rédemptions à l’Américaine ; mais un autre show plus courant, celui des inculpés de « docu-dramas » en quête d’un deal avec les accusateurs, un marchandage quasi pénal sans envergure, organisé à son seul profit immédiat, et celui de l’ Oprah Winfrey Network.

Armstrong, à chaque seconde, sait que ses aveux peuvent lui valoir un procès civil de plus, une ponction infamante dans une fortune estimée à 100 millions de dollars. D’où le dilemme : en admettant ses fraudes, question après question et non sans réticences (« là, non, je ne me souviens pas très bien… ») le champion déchu espère effacer l’ardoise, obtenir à un moment ou un autre le droit de reprendre un strapontin dans le monde du sport, de saisir une aspérité propice à une ascension ultérieure. Mais il a trop fait de mal, trop cogné pendant une décennie, trop traîné dans la boue les malheureux moins connus et moins nantis contraints de témoigner contre lui. La rancoeur de ses anciens inconditionnels, leur vengeance en cours, leurs meutes de lawyers, pèsent comme une chape de plomb sur l’interview.

Lorsque Oprah lui demande si ses coéquipiers, et ses subordonnés, de l’équipe étaient contraints, par lui, de se doper comme lui,  comme l’affirment plusieurs témoignages, ses réponses alternent entre les dénégations outrées et les concessions filandreuses, « Je n’étais ni le président, ni mais Il est vrai que j’étais le leader et dirigeais par l’exemple. C’était un milieu compétitif… ». Le dopage était le pacte de l’équipe, et Armstrong semble en fait revisiter à l’écran, sans états d’âmes ni remords excessifs, un cahier des charges qui dépassait de loin le sport pour viser « la victoire à tout prix. Le plus effrayant, c’est que je n’avais pas l’impression de tricher à l’époque ». Et maintenant ?

« Vous entrez sur mon territoire ? J’attaque » reconnaît-il, pour justifier le traitement ignoble, les procès, les insultes et les campagnes de diffamation infligées à la pitoyable masseuse de l’équipe, autant qu’à Betsy Andreu, l’épouse de son coéquipier Frankie Andreu, qui l’avait entendu, en 1996, reconnaître l’usage d’EPO devant les médecins traitant son cancer.  Il les a appelées, toutes deux, pour présenter ses excuses, et, puisque des procédures civiles sont en cours, tenter de limiter la casse.

Mais ses yeux brillent toujours de haine lorsque résonne le nom de Floyd Landis. Le mouchard déloyal ? La balance impardonnable ?   « J’ai pris mes décisions et ce sont mes erreurs » concède t-il. Oprah a truffé son show d’extraits de ses interviews, de ses froides dénégations sous serment. Son code de l’honneur nous échappe.

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