Obama Begins the Conquest of the Brain: Good News for Psychiatry

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Dans son discours sur l’état de l’Union du 12 février, le président américain a certes affirmé sa volonté de réduire le déficit, mais a néanmoins dit que le gouvernement devait “investir dans les meilleurs idées”, en citant l’exemple de la recherche sur le cerveau. Une annonce qui réjouit le psychiatre Michel Lejoyeux, qui n’y voit pas une guerre déclarée à Freud et à l’inconscient.

Les États-Unis partent à la conquête du dernier continent inconnu : le cerveau. Il est habituel que le président américain fraîchement élu ou réélu propose de nouvelles frontières à dépasser. C’est ce que vient de faire Obama en annonçant son intention de découvrir les secrets du cerveau.

Nouveau défi scientifique après la conquête de l’espace

Les États-Unis abordent le cerveau comme ils ont cru hier pouvoir conquérir l’espace. Ils y voient un défi scientifique, humain et économique. L’idée a ce qu’elle faut de romanesque pour intriguer. Je crois pourtant qu’elle ne manque ni de justesse ni d’intérêt.

Comprendre les mécanismes biologiques et cérébraux à l’origine des comportements. Savoir d’où viennent les dépendances, les habitudes les plus banales. Voir un cerveau penser et même rêver. Voilà des défis qui se situent à l’interface de l’aventure, de la science-fiction et de la recherche.

Aujourd’hui, nous commençons à identifier quelques bases moléculaires des maladies du cerveau. Ce peut être le cas de la maladie de Parkinson ou de l’épilepsie. Nous sommes bien loin d’avoir réussi le rapprochement entre la compréhension des émotions, des pensées et celui du fonctionnement du cerveau.

Nous en sommes encore à l’époque où les idéologies s’affrontent bloc contre bloc, les uns croyant au “tout affect” ou “tout inconscient”, les autres au tout cérébral. La réalité sera sans doute au milieu. Freud, dans un de ses premiers textes célèbres, “Esquisse d’une psychologie scientifique”, l’avait pressenti. Il anticipait l’époque où la science, et en particulier la science du cerveau, pourrait rejoindre celle de l’inconscient et de la psychologie. Son article date de 1895. Il a donné lieu à beaucoup de débats et insuffisamment de recherches.

Pour traiter Alzheimer, Parkinson (et pour la gloire et l’argent)

C’est dans ce contexte que Barack Obama oriente l’activité des scientifiques de son pays vers le décryptage du cerveau humain. Après que les États-Unis ont mis une bonne partie de leur potentiel de recherche sur la génétique, c’est maintenant sur les neurones qu’ils vont travailler. Ils attendent tout d’abord le traitement des maladies localisées dans le cerveau et en particulier la maladie d’Alzheimer et la maladie de Parkinson. Toutes celles et tous ceux qui réfléchissent aux troubles du comportement, à l’addiction, la psychiatrie et la psychologie espèrent que dans ces champs-là aussi la recherche va avancer sous l’impulsion américaine.

Qu’on ne s’y trompe pas. Il ne s’agit pas d’un projet désintéressé. C’est bien ce que dit le président Obama. Chaque dollar investi dans la recherche en génétique a rapporté 140 dollars à l’économie américaine. Il espère bien gagner autant d’argent et de gloire avec son travail sur le cerveau. Les scientifiques espèrent recevoir trois milliards de dollars sur dix ans. Charge à eux de trouver des traitements ou des explications qui justifieront et rembourseront ces subventions.

Le premier objectif est de décrire de manière complète le fonctionnement de toutes les zones du cerveau, que ce soit au niveau des neurones ou des neuromédiateurs. Les plus optimistes espèrent ainsi comprendre ou commencer à comprendre une partie des bases de l’autisme et de la schizophrénie. Rassurons les plus inquiets. Ces recherches, même si elles aboutissent, ne nieront pas le poids des émotions et de l’inconscient.

Cet observatoire du cerveau qui va ressembler à un observatoire astronomique risque de produire bien des découvertes surprenantes. Espérons que la leçon de Barack Obama pourra être entendue de ce côté de l’Atlantique et que nos décideurs conviendront du fait que chaque euro investi dans la recherche d’un univers aussi complexe que le cerveau finit par rapporter 150 fois ce qu’on a dépensé !

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