A French Woman in Boston, My Empathy Surprised Americans

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Attentat du marathon : Française à Boston, mon empathie a surpris les Américains

Quelques jours après l’explosion des deux bombes à l’arrivée du marathon de Boston, deux suspects ont été identifiés, dont l’un a été abattu par la police jeudi 18 avril. Le traumatisme est en tout cas toujours présent. Mona El Khoury, professeur à l’université d’Harvard à Boston, a vécu les événements de très près. Et a surpris les Américains par son empathie à leur égard.

Voilà comment les choses se sont passées autour de moi :

J’étais à mon bureau quand j’ai appris l’explosion de deux bombes près de la ligne d’arrivée du marathon : agitation dans les bureaux, stupéfaction, on parle de générateurs qui auraient explosé, les gens croient à un accident. Puis, en l’espace d’une heure, on apprend qu’il y a des blessés et deux morts, et la police découvre des bombes artisanales (“homemade bombs”).

Panique, confusion et premières hypothèses

Le travail s’arrête à l’université ; les cours sont suspendus et on nous demande de rentrer chez nous. Panique, l’horreur de l’attentat entre dans les esprits. Tout le monde repense au 11-Septembre.

On apprend aussi qu’il y a eu une bombe dans une bibliothèque. Une confusion s’ensuit, et on apprendra quelques heures plus tard que c’était probablement un incendie non lié aux attaques du marathon. Mais tout le monde a pris peur sur le campus, vu le nombre de bibliothèques qui nous entourent.

Le métro ferme, à la suite de plusieurs alertes de colis suspect dans diverses stations, sur différentes lignes du métro. Je suis avec une amie française et on pense nous aussi aux attaques des terroristes islamistes.

Par textos ou réseaux sociaux, on entend rapidement parler de la piste de l’extrême droite américaine, voire coréenne, qui serait liée à la récente montée des tensions entre les États-Unis et la Corée du Nord. Mais cette dernière est rapidement abandonnée.

“On l’aura eu aussi, notre 11 septembre”

En traversant le campus pour rentrer chez moi, j’entends des bribes de conversation entre undergrads, des étudiants non diplômés, qui parlent de leurs souvenirs du 11 septembre. L’un d’entre eux déclare, sur un ton presque glorieux : “Nous aussi, on l’aura eu “.

C’est en effet un aspect intéressant et troublant des réactions qui ont suivi l’événement, et que j’ai aussi pu constater en classe le lendemain matin : le fantasme d’une attaque plus grande qu’elle n’a été, comme si ces (jeunes) générations avaient besoin de se revendiquer d’un traumatisme qui serait le leur.

Presque tous mes étudiants (j’en ai 14) étaient fiers de me dire qu’ils avaient un ami ou une amie qui avait couru ce marathon et que c’était terrible, un choc terrifiant, mais que, “Thank God”, il ne leur était rien arrivé.

Mon empathie de Française a surpris les Américains

Autre aspect intéressant, l’étonnement des Américains quant à l’empathie des Français à leur égard lors de ce type de choc et de deuils nationaux. J’ai commencé mon cours en parlant de l’atrocité de ces événements et de la tristesse éprouvée, de l’attention et des inquiétudes que ma famille et mes amis en France m’ont communiquées.

Une entame qui a provoqué l’étonnement et la surprise chez la majorité de mes étudiants américains. Ils ne comprenaient pas pourquoi nous nous sentions aussi concernés et touchés par le terrorisme.

Peut-être, plus généralement, pourquoi nous avons de l’empathie pour un peuple souvent caricaturé comme antagoniste.

L’extrême droite rapidement soupçonnée

J’ai majoritairement entendu parler de l’hypothèse de l’extrême droite, appuyée par plusieurs éléments :

1. Le 15 avril est le dernier jour pour faire sa déclaration d’impôt, un acte détesté par l’ultra-droite américaine

2. Dans l’État du Massachusetts, c’est un jour férié qui célèbre le patriotisme (Patriots’ Day);

3. Le marathon de Boston est le plus ancien des États-Unis ;

4. Boston est la ville qui symbolise par excellence le libéralisme au sens américain du terme : ouverture et progressisme.

Par ailleurs, il a fallu que ce soit ma famille en France qui m’apprenne qu’un suspect saoudien aurait été arrêté par la police au soir des attaques. Je n’ai pas du tout entendu le moindre dérapage anti-musulman digne des ultras-conservateurs “Fox News” ou “New York Post”.

“Que ce ne soit pas un musulman”

Ici, les gens ont immédiatement eu la prudence de ne pas faire de conclusion hâtive ou d’amalgame, etc. Cela tient au fait que le milieu universitaire est extrêmement éduqué, ce que ses détracteurs décrivent comme “politiquement correct” et “bien pensant”…

Parallèlement, sur les réseaux sociaux, des personnes plus engagées postent un article du “Washington Post” intitulé : “Please, don’t be a muslim…” On espère clairement que l’attaque ne se révélera pas être un acte islamiste. Mes amis musulmans redoutent bien sûr les conséquences que cela pourrait avoir pour eux et le reste.

Depuis, c’est l’attente, et on est à l’affût de la moindre information sur l’événement…

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