US' 'Red Line' Crossed Again and Again

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La «ligne rouge» des Etats-Unis, sans arrêt franchie

Un duel où chacun lance une mise en garde à son tour comme pour défier le camp adverse, tel est perçu le jeu politique auquel nous assistons entre le régime des Assad et certaines puissances impliquées dans le dossier syrien.

La scène est maintenant devenue familière : aux menaces brandies par Bachar Al Assad pour prévenir toute tentative d’ingérence étrangère, les Etats riposteront en fixant des « lignes rouges » à ne pas franchir par le chef d’Etat syrien : pas d’utilisation de chars contre des civils, pas d’avions de guerre, etc…

Retour à l’envoyeur : comme si les limites fixées devenaient de vrais défis pour lui, Bachar Al Assad n’hésitera pas à déployer l’armée dans les villes ou user de chars contre la population syrienne. Une des plus célèbres « ligne rouge » pour les Syriens fut la mise en garde par Erdogan concernant la ville de Hama, tristement célèbre pour le massacre qu’elle a connu en 1982 faisant un des bilans les plus lourds de l’Histoire avec 30000 morts en quelques jours seulement. Hama, une des premières mises en garde donc depuis le début des événements. On connaît la suite : l’armée entre à Hama et y commet des massacres. Suivront Homs, Idleb, Deir Ezzor. Les Syriens en plaisantent :

Erdogan dit : « Hama est une ligne rouge », et l’armée syrienne entre à Hama.

Erdogan dit : « Homs est une ligne rouge » et l’armée bombarde Homs.

Erdogan prévient : « Deir Ezzor est vraiment une ligne rouge », et Deir Ezzor est à moitié détruite.

Pour de bon cette fois, Erdogan dit : « Istanbul est une ligne rouge »… !

Le régime syrien reconnaît en juillet 2012 avoir en sa possession différentes armes chimiques qu’il menace d’employer en cas d’agression étrangère, le gouvernement syrien n’étant pas signataire de la convention sur les armes chimiques de 1992. Les Etats-Unis trouvent une nouvelle ligne rouge à tracer, pensant probablement que Bachar Al Assad s’en tiendrait aux bombardements, baril de TNT et missiles SCUD contre la population syrienne sans risquer de franchir la ligne. Le prétexte idéal pour ne pas intervenir en faveur de la population.

Alors que la France, la Grande Bretagne et Israël disent avoir des preuves de l’utilisation des armes chimiques, les Etats-Unis n’ont eu cesse de dire qu’il n’était pas possible de confirmer l’utilisation de telles armes. Bachar peut donc en utiliser l’esprit tranquille. Finalement, la Maison Blanche a fini par admettre que le régime syrien les a « probablement utilisées » tout en soulignant que leurs renseignements ne sont pas suffisants pour avoir la certitude que Damas a franchi la « ligne rouge », l’usage de ces armes étant apparemment limité à une « petite quantité ».

Les Syriens savent à quoi s’en tenir : il faudra probablement passer par une enquête qui prendra le temps nécessaire pour oublier cette ligne rouge de la scène internationale. Les rebelles syriens pourraient aussi être accusés, comme l’a fait le régime syrien qui a exigé une enquête… pour ensuite la refuser quand l’Onu s’est dite prête à y envoyer des équipes. Ou alors, on nous expliquera que ce qui était sous-entendu était l’utilisation massive de ces armes. Après la ligne rouge, on devrait inventer la ligne infrarouge: hors du spectre visible, personne ne saurait jamais si elle a été franchie ou pas!

Pour rappel, Kafranbel avait déjà moqué la ligne rouge des Etats Unis en décembre 2012 : « Le feu orange américain serait-il un permis donné à Assad pour continuer sa répression sans franchir la fameuse «ligne rouge» que représente l’usage des armes chimiques ? »

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