Obama and Xi Seek Mutual Assurance

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Obama et Xi à la recherche d’une confiance réciproque

Les présidents américain et chinois, qui se sont rencontrés à Sunnylands, ont plus de choses en commun qu’ils ne le souhaiteraient. Tous les deux doivent résoudre les dysfonctionnements intérieurs de leur pays

Il y a eu 1972 et la rencontre entre Richard Nixon et Mao Tse Toung, puis 1979 et celle entre Jimmy Carter et Deng Xiaoping. Le sommet de Sunnylands, en Californie, entrera-t-il dans l’histoire comme une rencontre qui, lui aussi, fera date ? On ne le saura pas avant un an au moins. Au-delà des symboles de décontraction, sinon de complicité, il faut attendre les actes. C’est seulement avec le temps que l’on saura si la Chine a vraiment modifié son comportement international. Exercera-t-elle plus de contrôle sur elle-même en matière de cyberattaques, plus de contrôles sur ses protégés et sur le programme nucléaire de la Corée du Nord en particulier ?

Il y a quarante et un ans, en mai 1972, l’ouverture à la Chine était tout à la fois pour l’Amérique de Richard Nixon une manière d’isoler l’URSS et de faciliter son retrait sans gloire du Vietnam.

En juin 2013, il ne s’agit plus pour les Etats-Unis de sortir la Chine de son isolement, mais de bâtir une relation de confiance personnelle entre les dirigeants des deux premières puissances économiques mondiales. Mais, contrairement à Ronald Reagan, Barack Obama est un président très « cérébral », le plus intellectuel des présidents américains depuis Wilson. On ne le voit pas vraiment dire de Xi Jinping, comme Reagan le fit en son temps de Gorbatchev, « c’est un homme en qui je peux avoir confiance ». Et le nouveau président chinois est-il bien un nouveau Deng Xiaoping comme les dirigeants de Pékin veulent nous en convaincre ?

La diplomatie est certes, pour partie au moins, affaire de personnalités. Mais au-delà des hommes et de leurs empathie réciproque il y a des enjeux bien réels. Ce qui est important aujourd’hui dans la relation sino-américaine, c’est de comprendre à quel point les questions de statut sont centrales entre les pays. Il y a d’un côté la puissance qui lentement redevient ce qu’elle était – la Chine – et de l’autre celle qui n’est plus tout a fait ce qu’elle était – les Etats-Unis. Pour les Chinois, le plus jeune empire au monde se doit de traiter comme un égal le plus ancien empire au monde encore en existence. Pour les Américains, la Chine est certes devenue une puissance régionale incontournable en Asie, mais elle n’est pas encore une puissance vraiment mondiale, contrairement à l’Amérique. Seule dans sa catégorie de puissance, l’Amérique est de manière légitime une puissance asiatique, comme elle est encore (à la marge) une puissance européenne. Les voisins de la Chine ne demandent-ils pas avec insistance sa présence en Asie ?

Rien n’irrite plus l’Amérique que cette tendance chinoise à esquiver ses responsabilités mondiales : « N’oubliez pas que nous sommes une puissance en développement ! » Mais que la Chine s’engage avec trop d’insistance dans les affaires du monde, l’Amérique est toute prête à lui rappeler ses limites.

Autrement dit, la Chine, forte de ses succès économiques, de l’ancienneté de sa civilisation et plus globalement de sa confiance retrouvée en elle-même, entend être considérée par Washington comme une égale absolue. Et ce au moment même où l’Amérique est seulement prête à concéder à Pékin le statut de « numéro deux incontournable » dans le monde. En effet reconnaître la Chine comme un égal ce serait pour l’Amérique se résigner à accepter son déclin relatif. Elle n’y est pas prête, ni politiquement, ni intellectuellement, ni même idéologiquement. Comment la première puissance démocratique au monde pourrait-elle symboliquement reconnaître comme une égale une puissance qui ignore non seulement la démocratie, mais l’Etat de droit (« the rule of law ») ?

Les Chinois ont beau mettre en avant les dysfonctionnements des systèmes démocratiques occidentaux, ils sont sur ce point sur la défensive. Un intellectuel chinois ne résumait-il pas récemment en ces termes le dilemme de son pays : « Si la Chine ne s’attaque pas sérieusement à la corruption, la Chine est condamnée. » Mais il s’empressait d’ajouter : « Si la Chine s’attaque sérieusement à la corruption, le Parti est condamné. » C’est là tout le paradoxe de la rencontre qui vient d’avoir lieu, dans une décontraction un peu artificielle, entre Obama et Xi Jinping. Les deux dirigeants ont certes besoin l’un de l’autre. Ils doivent trouver entre eux de nouvelles règles du jeu, qui excluent les risques d’escalade involontaire et d’attaques cybernétiques incontrôlées.

Mais, en réalité, d’un côté comme de l’autre, les priorités sont internes. Ce que Pékin et Washington attendent vraiment l’un de l’autre, c’est le loisir d’effectuer chacun de leur côté les réformes internes indispensables. Chacun serait prêt à dire à l’autre : « Laisse-moi me consacrer à moi-même, j’ai tellement à faire. » Et, sur ce plan-là, les deux présidents, américain comme chinois, ont beaucoup de points communs qui sont peut-être plus négatifs que positifs. La priorité de l’Amérique devrait être de trouver des remèdes au dysfonctionnement de son modèle démocratique : celle de la Chine d’introduire progressivement mais inéluctablement l’Etat de droit dans le fonctionnement de son système politique et économique. Pour atteindre ses objectifs, Obama doit convaincre. Pour Xi Jinping, il s’agit en revanche de contraindre et donc de se faire des ennemis au sein du petit groupe de dirigeants qui l’ont amené au pouvoir. Obama et Xi Jingping ont peut-être plus en commun qu’ils ne le souhaiteraient l’un l’autre.

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