Chemical Weapons in Syria: Now What?

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Des armes chimiques en Syrie, et alors?

A regarder CNN cette semaine, on savait bien qu’une guerre chimique fait rage, mais plutôt en Turquie, croyait-on. Pendant des heures mardi, les envoyés spéciaux de l’empire d’Atlanta ont occupé l’antenne, masque à gaz sur le museau, live depuis la place Taksim, entre pétards et grenades lacrymogènes. Comme si c’était là la pire chose qui se déroule en ce moment au monde et comme si dans le pays voisin il n’y avait pas une vraie guerre, notamment chimique, qui a déjà fait plus de 90 000 morts.

En Syrie, il n’y a pas d’images live aussi poignantes, seulement des reportages clandestins, réalisés au péril de la vie des journalistes, des films de propagande du régime ou des vidéos d’origine douteuse, suggérant que les « rebelles » ne valent pas forcément mieux que ceux qu’ils combattent. L’absence de live a longtemps permis à Barack Obama de détourner le regard, ou même d’assurer que ce qui s’y passe n’est pas pire que les massacres au Congo, dont le monde entier, lui le premier, se contrefiche.

Tout cela a-t-il changé ce soir ? La Maison Blanche aimerait bien qu’on le croie, mais non. Pour annoncer ce jeudi que Bachar Al-Assad a franchi les « lignes rouges » tracées par Barack Obama, en utilisant à plusieurs reprises des armes chimiques, la présidence américaine a recouru à… un communiqué écrit de Ben Rhodes, conseiller adjoint à la sécurité nationale, chargé de la communication. Autant dire le degré « grave, mais pas au point de déplacer le président », sur l’échelle de dramatisation de la Maison Blanche. Ce jeudi soir, Barack Obama avait trop à faire pour venir expliquer lui-même devant les caméras que la Syrie gaze son peuple et franchit ses « lignes rouges » : il recevait une délégation de gays à la Maison Blanche, en l’honneur du “Mois de la fierté LGBT”.

Dans la foulée, un briefing téléphonique du même Ben Rhodes a confirmé que personne ne croit plus à Washington à une action décisive d’Obama en Syrie. Première question d’un collègue américain: “… Cela signifie-t-il qu’il n’y aura pas de réponse imminente à ce franchissement de la ligne rouge?” Réponse de Ben Rhodes: “Tout d’abord, nous pensons que nous sommes déjà passés à l’action…” Deuxième question: “Vous ne pensez pas qu’il y a urgence?” Réponse de Rhodes: “… La situation est urgente depuis déjà deux ans”…

Ceci dit, la Maison Blanche va bien faire un petit quelque chose: “Nous allons accroître l’ampleur et l’envergure de l’assistance que nous apportons à l’opposition” a annoncé Rhodes, promettant notamment un soutien au Conseil militaire de l’opposition, mais sans préciser encore de quelle nature. Des armes vont finir par être livrées par les Américains aux rebelles, assure le New York Times, citant des hauts fonctionnaires anonymes. Mais, l’annonce n’a pas encore été faite officiellement. “Nous prendrons des décisions conformes à nos propres intérêts nationaux et à l’avancement de nos objectifs” a plutôt rappelé Ben Rhodes jeudi soir. C’est bien tout le problème d’ailleurs: les Syriens s’entretuent et se gazent mais ce soir, “l’intérêt propre” du président américain était plutôt de passer un moment avec ses supporters homosexuels.

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