Quand on voit les images de la boule de feu orangé qu’est devenu en quelques minutes le Boeing 777 de la compagnie Asiana, après avoir percuté de sa queue la piste de l’aéroport de San Francisco, on se dit que c’est un miracle qu’il n’y ait pas eu plus de victimes parmi les 307 passagers et membres d’équipage. Deux jeunes Chinoises ont été tuées quand elles ont été éjectées de l’avion et plus d’une centaine de passagers ont été blessés, dont certains sérieusement. Mais les normes de construction des appareils modernes, les améliorations apportées aux issues de secours, la facilité accrue des passagers à s’extraire de leur siège et surtout l’entraînement très poussé du personnel de cabine, qui doit pouvoir évacuer l’appareil en moins de deux minutes, font que ce genre d’accident (” low-profile survivable”, disent les experts) ne se termine plus en drames épouvantables. Cela s’était déjà vérifié en 2005 avec l’accident d’un Airbus d’Air France à Toronto, ou il y a cinq ans avec le crash d’un Boeing 777 à Londres qui a fait des blessés mais aucune victime.
Il n’en reste pas moins que si l’appareil a fait la preuve de sa relative sûreté, si l’équipage commercial a agi impeccablement, tout concorde pour rejeter la responsabilité du crash sur une erreur humaine. Et donc logiquement celle du commandant de bord, Lee Kang-guk, 46 ans. D’autant que l’on a très rapidement appris que ce pilote, qui a 9 700 heures de vol, appartient depuis 19 ans à l’équipe d’Asiana, a volé comme patron sur A320, Boeing 737 et 747, était novice sur Boeing 777. Certes, il avait déjà emmené cette machine de Séoul, son aéroport d’attache, à Londres, Los Angeles et Tokyo, mais il ne s’était jamais posé à San Francisco et n’avait que 43 heures de vol aux commandes d’un 777.
L’instructeur, responsable du vol
“Rien de tout cela n’est aberrant, dit un commandant de bord français, instructeur sur Boeing 777. J’ai déjà instruit des pilotes qui avaient moins d’heures de vol sur cette machine que ce Coréen.” Le coût des heures de vol sur les appareils commerciaux modernes fait que le pilote à qui l’on a proposé la qualification sur un nouvel appareil fait des heures au sol sur un simulateur qui reproduit parfaitement celui-ci, et non, comme autrefois, aux commandes d’un avion vide. Lors de ses premiers vols réels, un instructeur prend la place de droite, la place du copilote, ce qui lui permet d’intervenir sans délai. “Surtout au moment d’un atterrissage, poursuit le commandant de bord, c’est l’instructeur qui est en charge et non pas celui qui est assis dans le siège de gauche, même si c’est lui qui a les commandes.”
Même si cela ne change rien pour ceux qui ont perdu la vie ou sont gravement blessés après le crash de San Francisco, ce n’est donc pas l’inexpérience du commandant de bord qui est responsable de l’accident, mais la distraction, le manque d’attention ou l’absence de réflexes de l’instructeur. Le président d’Asiana l’a d’ailleurs reconnu : “C’est bien Lee Jeong-min, l’instructeur, qui était l’ultime responsable du vol. Et lui avait 3 220 heures de vol à son actif sur Boeing 777.”
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