Entendre ce lundi le secrétaire d’État américain John Kerry féliciter la Syrie pour avoir démarré en un temps record le processus de destruction de ses armes chimiques avait quelque chose de surréaliste. N’était-ce pas ce même Kerry qui, il y a moins d’un mois, qualifiait les agissements du régime syrien “d’abominables” et se promettait d’obliger Bachar el-Assad à rendre des comptes ? Les ministres des Affaires étrangères sont des maîtres dans l’art d’avaler des couleuvres.
Mais, cette fois, la potion amère est passée presque inaperçue. Un peu parce que les Américains sont préoccupés par le “shut down” qui paralyse leur administration depuis une semaine. Mais surtout parce qu’en deux opérations commando audacieuses, le Shérif a relevé la tête. Et montré au monde qu’il était toujours là. Comme au moment du raid contre Ben Laden. Et cela gomme, comme par miracle, l’humiliation qui a vu les États-Unis contraints, dans le dossier syrien, de suivre un peu penauds le chemin montré par la Russie de Poutine.
Réponse spectaculaire
“Les États-Unis n’utilisent pas de frappes quand ils ont la possibilité de capturer des terroristes pour les interroger et les poursuivre en justice.” En mai dernier, Obama avait ainsi répondu à ceux qui l’accusaient d’user et d’abuser des drones pour poursuivre et abattre les ennemis de l’Amérique. Au risque de dégâts collatéraux sur des civils se trouvant au mauvais endroit au mauvais moment. En envoyant à Tripoli les navy seals neutraliser et exfiltrer Abou Anas al-Libi, suspecté d’être l’organisateur des attentats qui, en 1998, avaient fait 244 morts dans les ambassades américaines de Nairobi et de Dar es Salam, le président américain a répondu spectaculairement à ses critiques.
Une opération montée avec professionnalisme et efficacité, comme celle qui avait abouti à la mort de Ben Laden. La force delta, composée de dix hommes, était arrivée la semaine dernière à Tripoli en provenance d’une base américaine de Sicile. Samedi 5 octobre à 6 h 30 du matin, à bord de trois voitures et d’un minibus, ils encadrent la Hyundaï d’Al-Libi, qui revient de la mosquée. L’homme est au volant. L’un des membres du commando casse la vitre et lui intime en arabe l’ordre de sortir du véhicule, tout en lui mettant sur la tempe un revolver muni d’un silencieux. Un deuxième assaillant lui injecte alors une drogue qui le paralyse. On le porte vers le minibus qui démarre en trombe. L’opération a duré moins de trois minutes. Le terroriste semble avoir été conduit jusqu’à un hélicoptère qui l’a amené à l’USS San Antonio, un navire de guerre américain croisant au large des côtes libyennes.
Une réussite sur deux
D’autres navy seals appartenant à la force 6, celle de l’opération contre Ben Laden, ont eu moins de réussite dans le raid tenté ce même 5 octobre en Somalie. Il s’agissait là aussi de capturer, dans une villa au bord de la mer, un Kenyan du nom d’Ikrima, soupçonné d’être le cerveau de l’attaque contre le centre commercial de Nairobi qui a fait près de 70 morts fin septembre. Mais, cette fois, les commandos qui avaient débarqué de deux bateaux légers se sont heurtés à une forte résistance. Après une heure de combat, ils ont dû renoncer.
Une réussite sur deux. Obama s’en contentera en ces temps de difficultés politico-médiatiques. Même si la règle veut que les succès à l’étranger ne compensent pas les échecs à la maison. Surtout si, après avoir paralysé l’administration, le Congrès bloque la capacité d’emprunter des États-Unis. Il reste une semaine au président pour le mettre au pas. Et remonter dans l’estime des Américains. Plus durablement qu’avec des coups de main audacieux.
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