When America Slides to the Left

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Le choix, à New York, d’un maire situé à gauche du Parti démocrate est spectaculaire, mais ce n’est pas le résultat le plus significatif de ces élections.

Avec son sens bien connu de la mesure, le tabloïd New York Post avait averti ses lecteurs : “Back to USSR” (“Retour à l’URSS” – par ailleurs titre d’une chanson des Beatles, NDLR). Si l’élection mardi dernier du démocrate Bill De Blasio, 52 ans, à la mairie de New York, n’est pas exactement une plongée dans le communisme, c’est tout de même, après 25 ans d’administration républicaine, un sérieux coup de barre à gauche. C’est même un raz-de-marée puisque De Blasio, marié à une Noire ayant fait autrefois son coming out, a obtenu 73 % des voix contre 24 % à son adversaire républicain.

Ce retour de la “grosse pomme” dans le camp démocrate n’est pas seulement spectaculaire par son ampleur. Il l’est aussi par l’adhésion à un programme très progressiste, à l’aune américaine. Il se propose en effet de faire payer les riches pour construire des crèches et des écoles, dans la ville dont Wall Street est un des poumons, de réduire les inégalités sociales (49 % des New-Yorkais vivent à la limite du seuil de pauvreté) et de cesser la politique du recours à une police très musclée et omniprésente. Avec, certes, une pratique de contrôles et d’arrestations au faciès critiquable et critiquée, mais avec des résultats qui faisaient de New York une ville dont le métro était devenu infiniment plus sûr que certaines lignes du RER francilien. On était ainsi passé de 2 245 meurtres par an en 1990 à 418 l’an dernier, dans une ville de 8 millions et demi d’habitants.

De Blasio a quatre ans pour faire ses preuves et montrer qu’il peut appliquer un programme plus libéral et social. Sans pour autant remettre en cause une sécurité si chèrement acquise, et dont les exemples de Detroit ou de Chicago, dans les banlieues desquelles règnent les gangs, montrent à quel point elle est constamment menacée, dans un pays où le communautarisme est la règle. Mais quelle que soit son importance démographique et symbolique, New York n’est pas l’Amérique. Et ce sont d’autres glissements à gauche, ou plutôt vers le centre, lors de ces élections partielles, qui sont peut-être plus significatifs pour l’avenir politique du pays.

Glissements à gauche et vers le centre

Ainsi, le choix des électeurs de Virginie s’est porté sur Terry McAuliffe, un démocrate modéré qui affrontait pour le mandat de gouverneur un candidat désigné par les extrémistes républicains du Tea Party, Ken Cuccinelli. Ou encore l’élection, lors d’une primaire pour le Sénat dans l’Alabama, d’un républicain, Bradley Burne, qui l’a emporté contre un rival adoubé lui aussi par le Tea Party, Dean Young.

Ainsi surtout la réélection, dans le New Jersey, du gouverneur républicain Chris Christie, qui a tellement peu fait mystère de ses idées hostiles aux conservateurs purs et durs qui ont bloqué le gouvernement américain lors du fameux shut-down du mois dernier que 26 % des électeurs démocrates ont voté pour lui. Christie, 51 ans, avait déjà montré, l’an dernier, lorsque l’ouragan Sandy avait ravagé son État, qu’il savait surmonter les clivages politiques en saluant spectaculairement l’action d’Obama, alors candidat à sa réélection. Ce qui lui avait valu une bronca de la part de l’aile droite des républicains.

Au lendemain de son élection avec 60 % des suffrages des citoyens du New Jersey, Chris Christie va être choisi dans quelques jours comme leader de l’Association des maires républicains, ce qui fait déjà de lui le candidat le plus sérieux de son parti pour l’élection présidentielle de 2016. Et surtout celui qui sera capable, après les à-coups de ces dernières années dus aux jusqu’au-boutistes du Tea Party, de panser les plaies du Parti républicain et de le ramener vers les verts pâturages du centre droit, qui lui ont toujours permis d’accéder à la Maison-Blanche.

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