La victoire facile de Bill de Blasio à l’élection municipale de New York ne doit pas faire illusion : la tâche qui attend l’élu démocrate est immense. Bill de Blasio a beaucoup promis, pourtant les marges de manœuvres que lui laisse le bilan de son prédécesseur, Michael Bloomberg, restent étroites. Dès janvier, date de la prise de fonction de M. de Blasio, une véritable course d’obstacles va se dresser devant lui.
Le nouveau maire a construit une bonne partie de sa campagne sur le thème des inégalités. Sur 8,3 millions d’habitants, la ville de New York, compte plus de 400 000 millionnaires. Mais, dans le même temps, 46 % de la population vit en dessous ou tout juste au-dessus du seuil de pauvreté.
Pour réduire ces inégalités, le candidat démocrate a dit qu’il s’attaquerait à l’amélioration de la scolarité. M. de Blasio a ainsi promis la création de 68 000 places de maternelle destinées aux plus de 4 ans et la mise en place de programme de soutien au collège.
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HAUSSE DE L’IMPÔT MUNICIPAL SUR LES REVENUS
Pour financer cette mesure, il compte alourdir la fiscalité des plus aisés. L’impôt municipal sur les revenus pour ceux qui gagnent plus de 500 000 dollars passeraient ainsi de 3,8 % aujourd’hui à 4,41 %. Cette mesure, censée rapporter 530 millions de dollars par an, a commencé à provoquer une levée de boucliers de l’électorat conservateur, qui souligne que les prélèvements qui pèsent sur cette catégorie de population, lorsqu’on additionne les impôts locaux et fédéraux, dépasse déjà les 50 %. L’un des taux les plus élevés aux Etats-Unis.
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Mais la principale difficulté va consister à faire approuver cette mesure au niveau de l’Etat de New York, un passage obligé pour toucher à la fiscalité locale. “Nous avons encore beaucoup de chemin à faire”, a avoué Bill de Blasio au cours de sa campagne. On pourra objecter que David Dinkins, Rudolph Giuliani et Michael Bloomberg, les trois prédécesseurs de M. de Blasio, ont bien trouvé le moyen de surmonter les réticences de l’Etat pour augmenter les impôts. Mais c’est justement le problème : y-a-t-il encore du grain à moudre, alors que les élections fédérales de milieu de mandat se profilent à l’automne 2014.
Il va falloir que le nouveau maire face preuve de beaucoup de persuasion auprès des Républicains, mais aussi au sein de son propre camp, auprès du Représentant de New York, Andrew Cuomo, qui s’est dit hostile à augmenter les impôts. Bill de Blasio est convaincu que sa large victoire est susceptible de faire bouger les lignes à Albany, la capitale de l’Etat de New York.
BLOCAGE SOCIAL À LA MAIRIE
Second problème pour le nouveau maire : la question des contrats de travail des 300 000 employés municipaux. Ceux-ci sont arrivés à échéance il y a maintenant six ans, sans que Michael Bloomberg n’arrive à trouver un compromis avec les organisations syndicales.
Ce blocage social constitue une véritable bombe à retardement pour Bill de Blasio. Les arriérés de revalorisation des traitements représentent 7 milliards de dollars, selon la Commission municipale des finances. C’est davantage que le déficit budgétaire, le financement des services de police et des pompiers réunis.
Si M. Bloomberg a tenu bon face aux revendications, son successeur se retrouve dans une position d’autant moins confortable que les syndicats ont été parmi les premiers supporters de sa campagne. Là encore, les attentes sont fortes. La déception peut-être inversement proportionnelle si M. de Blasio ne lâche pas un peu de lest.
UN TROU DE 2 MILLIARDS DANS LE BUDGET
Mais avec quel argent ? Sous le mandat de Michael Bloomberg, le budget de la ville s’est envolé de plus de 33 %, hors inflation, pour atteindre les 70 milliards de dollars. Aujourdhui, New York dépense 8 700 dollars par habitant, soit le double d’une ville comme Chicago, et 50 % de plus que Los Angeles. Le maire sortant laisse ainsi un trou de 2 milliards de dollars.
La question qui se pose consiste à savoir comment son successeur va boucler les prochains budgets alors que son programme électoral laisse augurer une hausse des dépenses. C’est le cas de la construction de 200 000 logements sociaux. Certes, il est question parallèlement de réduire les exemptions fiscales, dont bénéficiaient sous la précédente mandature les promoteurs immobiliers pour construire des immeubles de luxe. Mais il est peu probable que cela suffise.
Bill de Blasio va donc devoir faire rapidement des choix. Certains, comme les républicains, mais aussi une part non négligeable des New Yorkais, craignent que le nouveau maire rogne sur les dépenses de police. Il a promis qu’il changerait son directeur, Ray Kelly, pour avoir mené une politique sécuritaire discriminante à l’égard des minorités ethniques. Quelle sera la profondeur du changement dans ce domaine ? Nul ne le sait.
Mais Bill de Blasio devra agir avec beaucoup de prudence pour ne pas remettre en cause les résultats acquis en matière de criminalité par Rudolph Giuliani et poursuivis par M.Bloomberg. Grâce à eux, le nombre de meurtres est tombé à son plus bas niveau depuis cinquante ans, faisant de New York la plus sûre des grandes villes américaines.
LE RETOUR DES DÉMOCRATES
Voilà près de vingt ans qu’un démocrate n’avait pas dirigé New York. Le dernier, David Dinkins, a plutôt laissé de mauvais souvenirs : la ville était sale, gérée de façon calamiteuse et la criminalité était galopante. Un bilan catastrophique qui lui avait valu la Une du New York Post titrée : “Dave, do something !”.
Bill de Blasio, lui, a promis à ses électeurs de faire beaucoup. Il a très bien su capter les frustrations d’une partie de la population qui se sent exclue de l’embourgeoisement qu’a connu la ville sous Bloomberg. Si le diagnostic a été le bon pour remporter l’élection, il faut maintenant que, pour changer New York, le nouveau maire trouve le traitement adéquat, compatible avec les finances de la ville.
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