The United States Weighs Its Options on South Sudan

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Les États-Unis soupèsent leurs options au Soudan du Sud

Parrain du jeune État est-africain, Washington cherche à mettre fin au conflit tout en évitant une intervention armée directe.

L’histoire était belle, l’avenir plein de promesses: un triomphe du Bien sur le Mal, comme l’Amérique les affectionne. En juillet 2011, un nouvel État, le Soudan du Sud, voyait le jour en Afrique de l’Est, porté sur les fonts baptismaux par une intense diplomatie américaine et des milliards de dollars d’aide bilatérale, mettant un terme à une des plus anciennes guerres civiles du continent africain. Ce scénario idéal a viré à la catastrophe. Et, comme bien souvent dans ces cas-là, avec des marines lourdement armés évacuant en urgence le personnel diplomatique des États-Unis.

Devant l’imminence d’une confrontation de l’armée du président Salva Kiir et la White Army (armée blanche) du vice-président déchu Riek Machar dans les rues de la capitale, Juba, les États-Unis ont décidé le 3 janvier d’exfiltrer leurs vingt derniers diplomates encore sur place. Résignés à laisser parler les armes entre deux protagonistes, et impuissants à imposer un cessez-le-feu entre ethnies rivales, Dinkas et Nuers.

Le camouflet est sérieux pour Washington, qui a déjà fait sortir du pays 440 de ses ressortissants, fonctionnaires et civils, et prévoit d’avancer 49,8 millions de dollars pour gérer la crise humanitaire en cours, devant le spectre grandissant d’atrocités contre les populations civiles de part et d’autre. Le Soudan du Sud est pourtant largement «une création des États-Unis», note Mark Landler, du New York Times: c’est l’Administration de George W. Bush qui a exercé une pression suffisante pour mettre fin à la guerre civile entre le pouvoir musulman de Khartoum au Nord et l’insurrection chrétienne au Sud. C’est son successeur, Barack Obama, qui a supervisé le référendum de 2011 donnant naissance à l’État du Soudan du Sud. L’actuel secrétaire d’État, John Kerry, se trouvait d’ailleurs dans le pays comme observateur lors du scrutin, en sa qualité de sénateur. Deux membres du premier cercle du président, en outre, suivent de très près la situation: Susan Rice, conseillère à la sécurité nationale et spécialiste de l’Afrique, ainsi que Samantha Power, la représentante américaine au Conseil de sécurité des Nations unies à New York, qui a œuvré pour un renforcement en urgence des 7 600 Casques bleus de la Minuss, totalement débordés par un flot de 200.000 réfugiés.

Descente aux enfers

Malgré ce faisceau d’attentions, les options paraissent limitées pour les États-Unis, pris de court par la descente aux enfers de leur fragile poulain est-africain et les penchants autoritaires des dirigeants locaux. Appelant les belligérants à entamer de vrais pourparlers de paix en Éthiopie, où de timides échanges encadrés par l’envoyé spécial américain Donald Booth sont au point mort, la Maison-Blanche a interrompu la formation apportée à l’embryon d’armée nationale et menace d’interrompre l’aide bilatérale à «toute faction qui prendrait le pouvoir par la force». Entendez la White Army de Riek Machar, qui concentre sur lui tous les regards. C’est à Machar que s’adressait le message de Susan Rice juste avant Noël, avertissant «ceux qui ont commis des actes de violence contre des civils qu’ils en seraient tenus responsables» devant la justice internationale.

Réticents à une intervention armée, les États-Unis espèrent pouvoir déléguer cette tâche à l’Éthiopie et l’Ouganda voisins, tout en faisant pression sur le président soudanais Omar el-Béchir, très influent auprès de Riek Machar, et qui lorgne sur les champs de pétrole de Bentiu, déjà en partie sous contrôle de la rébellion. Washington, cependant, a prévenu: aucun accord de paix ne se fera autour d’un arrangement énergétique amoral aux yeux du département d’État. «Nous avons trop à perdre, nous avons trop investi dans cette partie du monde, prévient Tom McDonald, ex-diplomate de l’ère Clinton. Nous ne pouvons laisser le carnage se poursuivre.»

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