Kerry on Mission To Ease Chinese Territorial Claims

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Le secrétaire d’Etat, en visite ce vendredi à Pékin, va tenter de refréner les prétentions de la République populaire qui représentent une menace pour Tokyo ou Manille mais aussi pour la suprématie américaine.

La visite en Chine du secrétaire d’Etat américain, John Kerry, prévue ce vendredi à Pékin, s’annonce tendue. Les revendications territoriales chinoises sur la quasi-totalité de la mer de Chine du sud (3,5 millions de km2) et sur les îles japonaises Senkakus (Diaoyu, en chinois), doivent en effet être au cœur de ces pourparlers sino-américains. Washington a laissé entendre la semaine dernière, par la voix du numéro 2 du Département d’Etat, Danny Russel, que ces prétentions chinoises enfreignent le droit international et sont provocatrices. L’émergence de la Chine en tant que puissance militaire maritime en Asie-Pacifique menace la suprématie américaine, qui en conséquence renforce depuis deux ans ses alliances diplomatiques et militaires sur l’échiquier asiatique, du Japon à l’Australie en passant par les Philippines, la Birmanie et le Vietnam. Barack Obama doit lui aussi se rendre bientôt dans la région, dans le sillage de John Kerry.

Le conflit s’ancre aux Senkaku Par Mathias Cena

Ce «grand jeu» stratégique entre la Chine et les Etats-Unis se déroule sur fond de tensions entre Pékin et ses voisins. Tokyo et Manille n’hésitent plus à évoquer ouvertement le risque d’un conflit. «A quel moment doit-on dire “trop c’est trop” ? Eh bien le monde doit le dire. Souvenez-vous que les Sudètes ont été abandonnées pour apaiser Hitler et tenter d’éviter la Seconde Guerre mondiale», a déclaré fin janvier le président philippin, Benigno Aquino, au New York Times. Il traçait une comparaison entre l’annexion du territoire Tchécoslovaque par le Reich en 1938, et les revendications territoriales de la Chine sur des îles situées au large des Philippines. La marine chinoise s’est emparée par surprise en 2012 du récif Scarborough, qu’elle occupe désormais. Manille a entamé une procédure d’arbitrage auprès de l’ONU, en s’appuyant sur la convention onusienne sur les droits de la mer de 1982. Pékin, bien que signataire, refuse de se soumettre à cette procédure.

EAUX POISSONNEUSES RICHES EN HYDROCARBURES

Le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, a lui aussi évoqué, dernièrement au sommet de Davos, la possibilité d’une guerre, mais en traçant cette fois un parallèle avec 14-18. «L’Allemagne et la Grande-Bretagne entretenaient des liens économiques forts et cela n’a pas empêché la guerre», a-t-il dit en réponse à une question que lui posait un journaliste sur l’éventualité d’un conflit sino-japonais. «Si une telle chose venait à se produire, cela infligerait des pertes sévères au Japon et à la Chine, mais aussi au monde. Nous devons faire absolument en sorte que cela n’arrive pas», a ajouté le Premier ministre japonais, qui a par ailleurs pour ambition affichée d’amender la Constitution pacifiste de l’archipel. Il invoque pour justifier cette mesure la croissance accélérée du budget militaire chinois devenu, selon lui, une «source d’instabilité dans la région». Le Japon et la Chine se disputent âprement la souveraineté des îles Senkakus. Tokyo affirme qu’il ne lâchera jamais ces eaux poissonneuses riches en hydrocarbures, tandis qu’il ne se passe guère de jours sans que Pékin envoie sa flotte narguer les gardes-côtes nippons au large du petit archipel inhabité. «L’expansionnisme militaire ne permettra pas à la Chine de devenir plus prospère économiquement», ponctuait fin janvier Shintaro Abe sur CNN.

Aquino et Abe ne sont pas les seuls à redouter une tempête à l’horizon. «C’est en Asie que la mémoire de la guerre de 1914 soulève le plus d’inquiétudes, écrit dans une récente tribune, consacrée au centenaire de 14-18, l’ancien ministre allemand des Affaires étrangères Joschka Fischer. Tous les ingrédients d’un désastre similaire y sont réunis : l’arme atomique, la montée de la Chine au rang de puissance mondiale, les rivalités territoriales non résolues, la division de la péninsule coréenne, les ressentiments historiques, l’obsession du statut et du prestige, et l’absence quasi totale de mécanisme de résolution des conflits. L’ordre du jour est dominé par la méfiance et les politiques de pouvoir.»

LE POUVOIR COMMUNISTE, HÉRITIER DU TRÔNE IMPÉRIAL

Le mélange subtil de complexes d’infériorité et de supériorité qui caractérisent les relations sino-japonaises, allié à la puissante charge des mythes patriotiques, porteraient-ils en eux les germes d’un conflit futur ? La réponse de Pékin à l’audacieux parallèle historique tracé par Shintaro Abe a en cela un côté inquiétant. Qin Gang, le porte-parole chinois a rétorqué que le tout jeune empire prussien de 1914 n’était «pas digne» d’être comparé à la Chine comme l’a fait le Premier ministre nippon «car, en fait, la Chine est depuis longtemps déjà une grande puissance. A l’époque des dynasties Han [de 206 av. JC à 220 ap. JC, ndlr] et Tang [618-907], la Chine était déjà une grande puissance mondiale. Le prétendu problème d’une Chine qui émergerait pour devenir une grande puissance n’existe donc pas».

Se présentant comme l’héritier du trône impérial, le pouvoir communiste ne ferait donc, en sorte, que reprendre la place légitime que lui a léguée l’histoire… Les Etats-Unis ne voient pas les choses de cet œil. La situation a été résumée au début du mois de manière plus sobre par Matt Salmon, un représentant républicain du congrès américain cité par l’agence Associated Press : «Les Chinois veulent s’emparer de tout ce qu’ils peuvent, et voir si nous, les Américains, on aura assez de couilles pour les en empêcher.»

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