How Ukraine Pushes Obama to Rethink His Diplomacy

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Comment l’Ukraine pousse Obama à repenser sa diplomatie

A la faveur de la crise ukrainienne, le ¬président américain a l’occasion de retisser des liens étroits avec ses partenaires européens. Et d’en finir au passage avec les tensions nées de l’affaire Snowden.

Barack Obama se rend, pour la première fois, mercredi, au cœur des institutions européennes à Bruxelles, au moment où la situation en Ukraine sollicite avec vigueur la coopération transatlantique. Si la superpuissance américaine est décidée à prendre les devants et à contrer les ambitions extraterritoriales de Vladimir Poutine, elle doit le faire en concertation et avec le soutien de l’Union européenne – une alliée qui retrouve toute sa place dans la diplomatie américaine. Or, depuis quelques mois, les Etats-Unis sont en délicatesse avec celle-ci au sujet des écoutes de la NSA et engagés, par ailleurs, dans des négociations commerciales ardues pour abolir les barrières douanières de chaque côté de l’Atlantique.

Ce passage en Europe, en plein cœur de la crise, est donc une opportunité unique, pour le président américain, de réaffirmer sa politique étrangère non pas seulement vis-à-vis de l’Ukraine ou de la Russie, mais aussi de ses alliés européens. « Il faut revitaliser la ¬confiance stratégique dans les relations transatlantiques », résume Ian Lesser, du German Marshall Fund. Concrètement, cela veut dire montrer tout l’intérêt des Etats-Unis pour la sécurité en Europe – via, notamment, l’Otan –, et celle de son approvisionnement énergétique. Cela passe, aussi, par des signes tangibles, visant à faciliter les échanges commerciaux entre les deux continents. Conséquence directe de l’affaire Snowden, les Européens seront également attentifs aux garanties accordées sur la protection des données et de la vie privée, et suivront de près les progrès réalisés sur ce terrain au Congrès américain.

Les raisons de la fermeté américaine

Depuis l’annexion de la Crimée par la Russie, les Etats-Unis reviennent sur le devant de la scène. Et veulent faire preuve de fermeté. D’abord parce que les Européens, en première ligne, sont partagés sur les sanctions à infliger à Moscou et les conséquences qu’ils pourraient subir en retour. Ce qui a débouché sur une première série de mesures très modérées.Ensuite, en raison de la volatilité de la situation dans la région, tant que l’on ne sera pas sûr des intentions de Vladimir Poutine. Les troupes russes continuent de se masser le long de la frontière avec l’Ukraine, tandis que l’armée ukrainienne vient de se retirer de Crimée. Les Etats baltes voisins sont aux cent coups et Joe Biden, le vice-président américain, a été dépêché la semaine dernière pour rassurer Polonais, Estoniens, Lituaniens et Lettons.

Enfin, parce que le dialogue entre Russes et Américains s’est détérioré depuis plusieurs mois, et qu’il n’y a pas beaucoup à perdre à durcir le ton. Barack Obama a profité d’un sommet sur la sécurité nucléaire à La Haye, en début de semaine, pour convoquer un G7 qui s’est conclu par la sortie provisoire de la Russie du G8, et l’annulation de la rencontre de ce groupe prévue à Sotchi, en juin prochain. Une sanction qui paraît surtout symbolique. « Mais les symboles ont leur importance, assure Michael McFaul, ancien ambassadeur américain à Moscou. Il y a un mois, la situation était totalement différente. Poutine a dépensé des milliards pour les Jeux Olympiques et convié le monde à venir voir la nouvelle Russie. On ne fait pas ce genre de choses en étant indifférent. Le dilemme de Poutine est qu’il veut être respecté mais qu’il veut aussi jouer selon ses règles. »

Les Occidentaux ne peuvent tolérer un redécoupage des frontières au gré des appétits du président russe, ni une violation flagrante des règles de droit international. Comme les Européens, les Américains ont rapidement – et plus sévèrement – sanctionné l’entourage de Poutine, Rossiya, la banque des oligarques, et passé un ordre exécutif qui permet d’envisager des sanctions économiques dans l’énergie, les mines, ou la finance. « C’est une aubaine pour Obama. Il avait grand besoin de faire preuve de fermeté, surtout après la Syrie. Cela lui sera utile quand il ira devant le ¬Congrès à propos de l’Iran. C’est une occasion en or d’être ferme sans risques» , estime l’ancien ministre des Affaires étrangères, Hubert Védrine.

Stratégie d’isolement de la Russie

Mais, au-delà des motivations relevant de la politique intérieure, il y a une vraie interrogation chez les Américains sur cette nouvelle phase des relations internationales. Après l’éclatement de l’empire soviétique – une catastrophe géopolitique, selon Vladimir Poutine –, la période d’après-guerre froide a vu la Russie réintégrer progressivement le concert des nations (entrée à l’OMC, au G8, etc.). Avant que la relation ne se dégrade brutalement ces derniers mois (pas d’accord sur le désarmement nucléaire, opposition sur la Syrie, hospitalité accordée à Snowden et législation russe homophobe).

Les Américains, et les Occidentaux en général, peuvent-ils espérer passer cette crise et revenir à l’ordre antérieur ou doivent-ils comprendre que nous sommes entrés dans une ère nouvelle ? Une ère où l’agression militaire redevient possible en Europe. Dans le doute, la stratégie consiste à isoler la Russie et à soutenir l’Ukraine, en l’aidant économiquement (le Sénat américain vient de voter une aide de 1 milliard de dollars) et à reconstruire sa démocratie.

Il y a, en pareille occasion, des leçons à tirer de la guerre froide, assure Michael McFaul. Dans ses mémoires, l’ancien secrétaire d’Etat de Ronald Reagan, George Schultz, avait consacré un chapitre au « réengagement avec les Soviétiques ». « Il fallait éviter de créer des liens entre des problèmes qui n’en n’avaient pas », expliquait-il. Cloisonner. Mais ne jamais rompre le dialogue.

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