Does Anyone Still Like Obama?

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Qui aime encore Obama?

Le président des Etats-Unis s’identifie à la politique étrangère américaine la plus impopulaire depuis des décennies.

De sa récente tournée en Europe, on retient que Barack Obama fait de nouveau de la relation entre les deux rives de l’Atlantique un axe privilégié face aux multiples problèmes du vaste monde. On était en droit d’en douter après les nombreux discours qu’il a voulu consacrer à l’Asie, à l’Afrique, au désengagement américain résumé par la théorie du “leading from behind” (“diriger de l’arrière”), lesquels ne laissaient généralement à l’Europe qu’un strapontin.

Paradoxalement, il faudrait presque remercier Vladimir Poutine d’avoir brutalement ramené le camp atlantique à ses adhésions initiales (même si ses orientations restent très floues quant à l’avenir) et de rappeler brusquement aux esprits que la longue marche de l’intégration européenne est née, dans les années 1950, de la menace soviétique. Comme pour lui faire écho, le président américain s’est ouvertement inquiété de la cure d’amaigrissement infligée aux budgets militaires en Europe occidentale.

Barack Obama avance sans grande théorie, ce qui n’est pas forcément un défaut (souvenons-nous du méphitique “axe du mal” fantasmé par George W. Bush), et privilégie quelques concepts clefs. A rebours des grandes orientations stratégiques du passé, il définit comme une priorité la sécurité du peuple américain et la défense du territoire national contre les multiples formes de terrorisme qui continuent de faire des Etats-Unis une cible.

Cela se traduit, entre autres choses, par une stratégie furtive, “light footprint strategy”, qui amène les Américains à intervenir massivement par le biais de drones (souvent tueurs), de troupes spéciales, de moyens de cyberdéfense ou de surveillance accrue des adversaires comme des alliés.

L’idée centrale est de sortir l’Amérique d’un état de guerre permanent et de préférer des opérations précises, notamment en matière d’antiterrorisme, à tout nouvel engagement militaire classique. Ce faisant, Obama suit au plus près les attentes de l’opinion publique américaine ¬ réticente à toute intervention directe en Libye, en Syrie, en Afrique, indifférente aux scories de la présence américaine en Irak, en Afghanistan… C’est précisément cette ligne qui est en passe de devenir la politique étrangère américaine la plus impopulaire qui soit depuis des décennies.

Une incompétence mâtinée d’indécision

De cette apparente contradiction, on peut chercher plusieurs explications. D’abord, contrairement à l’élan des conquêtes, une ligne de retrait n’entraîne en général ni enthousiasme ni fierté collective ; on remercie rarement quelqu’un qui ferme boutique. Ensuite, il n’est pas exact que les Etats-Unis se soient militairement désengagés de toutes parts. Ils se sont impliqués de façon parfaitement décisive en Libye.

En dépit des apparences, l’écrasante majorité des bombardements aériens des dix premiers jours furent le fait de l’aviation américaine ; une fois le régime renversé, l’ambassadeur des Etats-Unis fut tué à Benghazi au cours d’un attentat de très vastes proportions. De même, sans l’opposition frontale du Congrès, durant les derniers jours du mois d’août 2013, Obama aurait bel et bien décidé d’une intervention en Syrie, sous la forme d’une série de tirs ciblés réalisés en plein accord avec la France (et le Royaume-Uni). Au passage, on est en droit de se demander aujourd’hui si une telle action n’aurait pas fait réfléchir les Russes à deux fois avant d’entreprendre d’une main leste l’annexion de la Crimée.

Résultat, l’image qui ressort par-dessus tout est celle d’une incompétence mâtinée d’indécision. Or, lorsque surgit en Ukraine la confrontation avec Vladimir Poutine, déjà protecteur et receleur des trahisons d’Edward Snowden, le défaut d’anticipation saute aux yeux. Soudain, le déficit stratégique apparaît criant. Avec ce risque : si le premier mandat de Barack Obama fut celui du désengagement réussi et de l’élimination de Ben Laden, le second ne doit pas être celui où le vide ainsi laissé se remplit de crises.

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