Ukraine's Shadow Hovers over Obama's Asia Tour

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Barack Obama s’en va en Asie. Le président des Etats-Unis a entamé mercredi à Tokyo une tournée dans l’est de l’Asie, qui le conduira ensuite à Séoul, Manille et Kuala Lumpur. Les alliés de Washington, Japon et Corée du Sud en tête, l’attendaient de pied ferme. Dans ces pays dont l’intégrité territoriale est garantie depuis plus de 60 ans par les forces américaines, l’annexion en mars dernier de la Crimée par Moscou, aux dépens de Kiev, a semé le trouble. Car les Etats-Unis s’étaient engagés, en 1994, à faire respecter l’intégrité territoriale de l’Ukraine… “Poutine a encore beaucoup de cartes à jouer en Ukraine.” soulignait Kunihiko Miyaké, chercheur à l’Institut Canon de Tokyo, lors d’une récente conférence à Paris. “La majorité des Asiatiques ne sont pas à l’aise avec cette situation.”

La méfiance de Tokyo

Vue du Japon, l’intervention russe en Crimée a jeté un froid, confirme Akiyoshi Komaki, correspondant à Moscou pour le journal Asahi Shimbun, joint par l’Express: “Les Japonais s’interrogeaient sur la fiabilité des Etats-Unis: ‘Si le Japon est victime d’une invasion, les Etats-Unis nous protègeront-ils ?'”. Malgré la présence sur le territoire japonais de 39 000 soldats américains, chargés d’assurer leur sécurité, les Japonais doutent soudain de la solidité de leur alliance avec les Américains. Un sentiment de défiance attisé par la montée d’un nationalisme teinté de militarisme, depuis les années 2000, dont le premier ministre, Shinzo Abe, est la figure emblématique. Un projet, en particulier, lui tient à coeur: réviser la Constitution pacifiste, imposée par les Etats-Unis au lendemain de la Seconde guerre mondiale.

Dans ce contexte, Tokyo suit “très attentivement” la situation en Ukraine, selon le journaliste, d’autant que la détérioration des relations russo-américaines entraîne des tensions, par ricochet, entre le Japon et la Russie. Or ces deux pays n’ont jamais signé de traité de paix depuis 1945 et leur différend territorial sur les îles Kouriles (Territoires du Nord) n’a toujours pas été résolu.

Barack Obama, décidé à rassurer son principal allié dans la région, a fermement soutenu le Japon, jeudi, dans le différend territorial qui l’oppose à la Chine au sujet des îles Senkaku (Diaoyu, en chinois), précisant qu’elles étaient “couvertes” par le traité de défense qui lie Tokyo et Washington. Mais cette confirmation intervient un peu tard. En janvier dernier, lors du Forum économique de Davos, le premier ministre nippon avait comparé le conflit entre Tokyo et Pékin au sujet de ces îles à l’élément déclencheur de de la Première guerre mondiale.

A l’image de la Russie, qui semble prête à intervenir militairement en Ukraine, la Chine pourrait-elle envoyer des troupes sur les îles contestées, en cas de provocation de Tokyo ? Pour Shen Dingli, doyen de l’Institut des Affaires Internationales de l’Université de Fudan, cela ne fait aucun doute: “Lors de la guerre de Corée, en 1950-53, Pékin a déjà envoyé ses troupes dans la péninsule afin de lutter contre les Etats-Unis, rappelle-t-il. “Aujourd’hui, avec un budget militaire de 131 milliards de dollars, elle n’hésiterait pas à intervenir.”

A Séoul, l’ère du doute

En Corée du Sud aussi, malgré la présence de 25 000 soldats américains chargés d’assurer la protection du territoire, politiques, diplomates et analystes s’interrogent. “Le gouvernement de Séoul est bien conscient de l’agressivité de Poutine”, affirme à L’Express Park Kigab, professeur en droit international à Korea University. Et ils redoutent, selon l’enseignant, que les récents événements en Ukraine donnent de mauvaises idées à Kim Jung Un, le leader de la Corée du Nord: “Pour les dirigeants de Pyongyang, l’Ukraine a été envahie parce qu’elle a commis l’erreur de renoncer volontairement, dans les années 1990, à l’arme nucléaire. De leur point de vue, la bombe atomique est un des moyens essentiels de garantir la survie du régime. Ils ne l’abandonneront pas”. Pyongyang prépare ces jours-ci son quatrième essai nucléaire, selon des sources sud-coréennes citées par l’Agence France-Presse. Le nucléaire nord-coréen est un des dossiers prioritaires sur lequel compte avancer Barack Obama lors de sa rencontre avec la présidente sud-coréenne Park Geun Hye. Des pourparlers entre les Etats-Unis, le Japon et la Corée du Sud devraient-être confirmés dans la foulée. En Ukraine, malgré les réunions des instances internationales, les tentatives de déstabilisation n’ont pas cessé. Tous les regards se portent désormais vers le Pacifique.

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