Sex in San Francisco

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Sexe à San Francisco

La série Looking de HBO, offerte depuis vendredi chez Super Écran, a plusieurs fois été décrite comme le nouveau Girls campé dans un univers gai. Le buzz grondait également à propos de ce Sex and the City centré sur un trio de copains homosexuels gravissant – et déboulant, principalement – les collines de l’amour dans la grande région de San Francisco.

Tout ça est plus ou moins vrai. D’abord, arrachons tout de suite l’autre étiquette, celle de hipster, qui a été accolée à la comédie dramatique Looking. Personne dans cette série américaine ne porte de façon ironique (ou post-post-ironique?) les lunettes en fer forgé de son arrière-grand-mère. Personne, non plus, ne tombe dans le «normcore», cette tendance vestimentaire absolument ridicule de vouloir s’habiller comme un touriste du Midwest ou un joueur de golf retraité à Pompano.

Looking met en scène des personnages moins stéréotypés que Queer as Folk. Il y a le célibataire Patrick (Jonathan Groff, vu dans Glee), designer de jeux vidéo plutôt naïf et très preppy, du style «côte est américaine». Il y a Agustin (Frankie J. Alvarez), artiste peu ambitieux d’origine cubaine, zéro flamboyant et en couple depuis plusieurs années. Et il y a le tombeur Dom (Murray Bartlett), éternel serveur dans un restaurant qui fêtera bientôt ses 40 ans.

Au jeu des comparaisons, Girls est pas mal plus cru et caustique que Looking. La créatrice de Girls, Lena Dunham, a imaginé quatre amies dissemblables, égocentriques et quasiment insupportables. Dans Looking, le trio de protagonistes est plus charmant, voire aimable.

On comprend tout de suite pourquoi ces trois gars-là se fréquentent depuis si longtemps, contrairement à Girls, qui redéfinit le concept d’amitié malsaine, tordue et carrément incompréhensible.

Il y a également un côté triste et tragique dans Girls, qui ne se retrouve pas dans Looking, où l’esprit est plus joyeux, moins hyperréaliste. Et là où Shoshanna, Marnie, Jessa et Hannah manquent cruellement d’autodérision, Patrick, Agustin et Dom en ont pour toute la Californie.

Le problème avec Looking, c’est que les intrigues démarrent très lentement. J’ai failli décrocher après deux épisodes, mais je fais partie de cette catégorie de téléspectateurs trop intenses qui, au prix de leur santé mentale ou oculaire, endurent les trucs les plus assommants simplement pour «voir comment ça va finir».

Heureusement que j’ai persisté, car Looking se replace joliment à mi-parcours. On s’entend, les dialogues auraient pu être plus corsés et les sujets, plus osés. Ça demeure tout de même un divertissement de bonne qualité. Et comme cette première saison ne comporte que huit épisodes de 30 minutes, ça ne bouffera pas trop de votre (précieux) temps.

Ce qui est bien avec Looking, c’est que l’orientation sexuelle de Patrick, Dom et Agustin n’est pas un enjeu en soi. Ces hommes aiment d’autres hommes, un point c’est tout, et nous suivons leurs vies amoureuses comme nous avons suivi celles de Charlotte, Samantha, Carrie et Miranda à New York.

Il y a, bien sûr, quelques trucs qui clochent dans Looking, dont la quasi-absence des femmes dans l’univers de nos trois héros. Le seul personnage féminin important, soit Doris (Lauren Weedman), coloc et meilleure amie de Dom, est pourtant le plus intéressant de toute la distribution. Avec son grand coeur et sa langue bien pendue, Doris vole la vedette à chacune de ses apparitions. Au point où le créateur de Looking a promu l’actrice Lauren Weedman de rôle secondaire à principal pour la deuxième saison.

Et les scènes de sexe? Réalistes, mais moins que dans Girls, où Lena Dunham se place volontairement dans les pires positions.

Parlant de Girls, la troisième saison de cette comédie grinçante, franchement meilleure que la deuxième, a repris les ondes de Super Écran la semaine dernière. Les nuages noirs se dissipent un peu au-dessus de Brooklyn, Hannah perdant même miraculeusement tous ses tics nerveux.

Vous découvrirez dans Girls 3 un personnage encore plus détestable que Hannah: Caroline (Gaby Hoffmann), la soeur grano d’Adam. Elle est délicieusement irritante et peut-être encore plus égoïste que Hannah. Oui, amis lecteurs, c’est possible.

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