The Iraq War: History’s Revenge

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LES GUERRES IRAKIENNES

L’histoire se venge

Dans l’espoir d’éviter la décomposition de l’Irak amorcée en 2003, Barack Obama a ordonné l’envoi de 300 conseillers militaires à Bagdad. Ce faisant, il confirme que le pays est à nouveau plongé dans la Guerre, avec un grand G.

L’évolution du dossier irakien au cours des derniers jours commande un retour appuyé, à des fins de compréhension il va sans dire, sur l’histoire récente de ce pays. Tout a commencé, littéralement commencé, le surlendemain des attentats du 11 septembre 2001, lorsque Paul Wolfowitz, alors secrétaire adjoint à la Défense, a prié George Bush fils d’envisager le renversement par la force de Saddam Hussein. La suite ? Pour faire court, les armées américaine et britannique s’emparent du pays dans le courant de 2003. Hussein est jugé, puis pendu. Et voilà qu’après le sectarisme cultivé par la minorité sunnite à l’endroit des Kurdes et des chiites de la manière la plus sanglante qui soit, lui succède le sectarisme dans sa version chiite, alimenté en sous-main par l’Iran. Mais encore ? Le premier ministre Nouri al-Maliki a pris soin d’interdire la présence de sunnites dans les directions des forces de l’ordre et de l’armée. Bref, il s’est approprié le monopole de la violence d’État.

Ici, il faut souligner qu’en renvoyant Hussein dans les catacombes de l’histoire, le duo formé par Bush et le premier ministre britannique Tony Blair détruisait du coup un homme et un régime qui avaient la haine des islamistes. Qui plus est, en supprimant Hussein, ils se débarrassaient de l’ennemi numéro 1 des Iraniens sans que ces derniers aient… dépensé un dollar pour cela. En clair, dans un premier temps ils ont brouillé les cartes géopolitiques, avant de les redistribuer de telle manière que les risques d’un énième conflit ont étouffé en moins de deux la prétention initiale comme majeure de Washington. Laquelle ? Une fois Hussein éliminé et les mécanismes de la démocratie introduits à Bagdad, ceux-ci se répandraient partout au Moyen-Orient et l’avenir serait radieux. Mettons qu’au championnat de la crédulité mais aussi de la vanité, Bush et les siens ont été les maîtres.

Ici, il faut mettre en relief le culot dont l’ex-vice-président Dick Cheney et Tony Blair ont fait preuve pas plus tard qu’hier. Un culot qui a suscité un étonnement certain aux États-Unis et la rage au Royaume-Uni. Car le déroulement des événements guerriers des derniers jours a révélé des failles énormes dans l’opération entreprise en… 2003 ! Toujours est-il que la « prise » de Mossoul la semaine dernière et celle de la plus importante raffinerie du pays ces jours-ci ont été conçues et peaufinées, assurent les experts en stratégie militaire, par des hauts gradés sunnites proches de… Saddam Hussein. Il ne pouvait pas en aller autrement. À ce propos, le New York Times rappelait hier que le bras droit du dictateur irakien n’a jamais été arrêté. Il s’agit du général Izzat Ibrahim al-Douri.

Et qu’ont fait Blair et Cheney ? Ils ont justifié l’offensive de 2003 et tiré à boulets rouges sur Obama. C’est incroyable ! En fait, ça dépasse l’entendement. Dans des tribunes communiquées hier, deux des trois principaux acteurs de ce qui se révèle encore et toujours un fiasco énorme se dédouanent pour mieux s’accorder les lauriers de la grande intelligence politique. D’un sens inné de la grande histoire. D’un souci marqué pour la félicité du monde. Et quoi encore ? On exagère ? À peine.

Car le fin mot de ces interventions est une réponse qui ne dit pas son nom aux appels lancés, surtout au Royaume-Uni, pour que Blair, Cheney et d’autres soient mis dans l’obligation de rendre des comptes. Cela étant, il faut constater qu’il se passe aujourd’hui ce que Jacques Chirac avait craint et évoqué pour justifier son refus de s’engager en Irak : l’implosion de toute la région.

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