La presse allemande estime, vendredi 11 juillet, que la décision d’expulser le chef des services secrets américains en Allemagne constituait une vraie « césure » dans les relations entre les deux alliés et approuvait la chancelière, face à « l’arrogance » des Etats-Unis.
L’expulsion annoncée suite à l’arrestation ces derniers jours de deux agents espionnant en Allemagne pour le compte de Washington occupe la « une » des principaux quotidiens du pays.
« MERKEL N’EST PAS LE CANICHE D’OBAMA »
« C’est une césure dans l’histoire des relations germano-américaines », soulignait le quotidien munichois de centre gauche, Süddeutsche Zeitung (SZ), y voyant « un acte sans précédent de protestation contre l’arrogance américaine ».
« [L’ancien chancelier] Gerhard Schröder avait franchi un premier pas vers l’autonomie vis-à-vis du grand allié, il y a douze ans, en disant non à la guerre en Irak. Maintenant, il s’agit d’une deuxième étape », analyse le SZ, la jugeant d’ailleurs bien « tardive ».
« Jusqu’à présent, les Allemands avaient seulement réagi avec désillusion et indignation face aux agissements des services de renseignement américains. Avec l’expulsion du chef de ses agents, le gouvernement fédéral met pour la première fois les Américains sous pression. Espérons qu’Obama et ses troupes vont maintenant comprendre qu’ils ne peuvent pas tout se permettre en Allemagne ».
Selon le Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), quotidien des affaires, l’Allemagne et les Etats-Unis « sont au seuil d’une guerre diplomatique ».
« C’est clairement de l’énergie perdue (alors que) Berlin et Washington sont déjà très occupés avec les conflits existants dans le monde. Une querelle entre l’Allemagne et les Etats-Unis ne peut que réjouir les ennemis de l’occident ».
Mais à l’instar du reste de la presse, le journal apporte son soutien à la décision de la chancelière. « Merkel n’est pas le caniche d’Obama. Le message qu’elle vient de lui adresser était aussi clair qu’indispensable ».
POINT LE PLUS BAS DES RELATIONS
Bild, le quotidien le plus lu d’Allemagne, consacre une grande partie de sa page 2 à l’affaire d’espionnage, avec une grande photo de la chancelière allemande et en titre : « Affaire d’espionnage : maintenant Merkel intervient ! » Selon le journal, la relation germano-américaine a atteint « son point le plus bas », en raison des « insultes », « attaques » et « promesses non tenues » des Américains.
« Cela ne peut rester comme cela ! Barack Obama a le devoir de réparer la relation avec son plus proche allié occidental. Tant qu’il en est encore temps ».
Lire nos explications (édition abonnés) : Une affaire d’espionnage réveille les tensions entre Berlin et Washington
Le Tagesspiegel, quotidien de Berlin, prend un peu de distance et estimait que l’expulsion, pour aussi exceptionnelle qu’elle soit, faisait partie du théâtre diplomatique. « Il est admis par tous que ça fait partie du jeu », note le journal, dans un article intitulé « Expulsion, selon les règles ». «
Et enfin, il faut bien le dire, le gouvernement fédéral donne l’impression d’avoir appris les règles adéquates. Les Etats-Unis devraient, en attendant, renoncer à une contre-réaction (on pourrait par exemple lancer quelques informations sur l’espionnage industriel allemand aux Etats-Unis) et ce serait le signe qu’à la Maison-Blanche, on a compris combien l’âme allemande a été blessée ».
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