At Last!

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À la dure!

L’ampleur des sanctions décidées simultanément par les États-Unis et l’Union européenne (UE) à l’endroit de la Russie laisse présager des lendemains économiquement plus pénibles pour tous les acteurs concernés. Déclinons.

L’éventail de mesures décidées par les chefs d’État européens et leur homologue américain appartient à la catégorie dite du niveau 3. Pour illustrer la volonté marquée de ces derniers de faire entendre raison à Vladimir Poutine ou de le faire carrément plier, on soulignera que le niveau en question est juste en dessous de celui que l’on qualifie ainsi : la sanction nucléaire. Attention ! Celle-ci a été baptisée ainsi par analogie à ce qui prévalait lors de la guerre froide, par analogie à l’équilibre de la terreur. Car aujourd’hui, par « sanction nucléaire », on ne veut pas dire appuyer sur le bouton, mais bien ceci : bannir l’achat du gaz et du pétrole russes. Ce faisant, on provoquerait une déflagration économique en Russie, en Europe et aux États-Unis, mais dans une proportion moindre.

De toutes les punitions choisies, celles visant le secteur bancaire vont faire davantage de dommages que les autres. D’ores et déjà, les compagnies russes vont avoir beaucoup plus de difficulté à financer leurs dettes à l’étranger, lesquelles totalisaient 650 milliards à la fin de 2013. Ensuite ? L’État russe va être dans l’obligation, à court terme, de puiser dans ses réserves avoisinant les 160 milliards pour recapitaliser les banques publiques ciblées avec méticulosité par l’UE et les États-Unis. Cela précisé, ajoutons que ces réserves vont fondre comme neige au soleil pour la bonne et brutale raison que la dette contractée à l’étranger, et qui arrive à échéance d’ici la fin de 2015, atteint les 100 milliards. Sur ce flanc, les conséquences seront d’autant plus dures que l’économie du pays loge actuellement à l’enseigne de l’affaiblissement : la croissance du PIB au premier semestre a été nulle, plus de 76 milliards en capitaux se sont « exilés » pendant que les investissements étrangers chutaient de 50 %.

Cela étant, de la somme des sanctions fixées, on tire un enseignement quelque peu… Comment dire ? Étonnant ! Cela faisait des lunes que les chefs d’État n’avaient pas été au même diapason. Des lunes qu’ils n’avaient pas affiché une telle cohésion ainsi qu’une telle compréhension des coefficients de difficulté respectifs à chacun d’entre eux. Car ces sanctions vont également faire du mal aux banques françaises, les plus exposées en Russie, à la City de Londres, aux entreprises allemandes, britanniques, françaises et américaines versées en technologies, etc. Bref, les uns et les autres sont conscients qu’il y aura de la casse des deux côtés de la frontière. Et ce, alors que la reprise économique demeure timide un peu partout en Occident.

Jamais en 25 ans, l’UE et les États-Unis n’avaient fait front avec autant de fermeté et même d’assurance. Il est probable que l’explosion du Boeing de la Malaysia Airlines a agi, auprès d’Obama et consorts, comme un point de bascule. Antérieurement à ce drame, Poutine était plus ou moins fréquentable, mais fréquentable malgré tout. Depuis lors, ce n’est plus du tout le cas. Comme si Poutine avait franchi une ligne au-delà de laquelle son ticket, celui plus précisément de chef d’État, n’était plus valable.

Dans cette histoire pleine d’éclats économiques et de fureurs militaires, il faut s’arrêter à la variable qui risque fort de transformer le rêve impérial de Poutine en tas de confettis. Le frein imposé aux transferts des technologies va réduire son programme de modernisation militaire à néant. Pour dire les choses simplement : c’est tant mieux. Car il faut savoir que, depuis son retour à la présidence, Poutine aiguise la fibre de l’encerclement de la Russie par l’Occident honni avec un souci maniaque.

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