To Invite the Americans in?

Edited by Nathan Moseley

 

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Inviter l’Américain?

À contrecoeur, Barack Obama est devenu le quatrième chef de l’exécutif américain consécutif à ordonner un recours aux armes en sol irakien. Lorsqu’on s’attarde à l’emboîtement des épisodes sanglants, dont le sort réservé aux chrétiens, qui ont rythmé la vie politique de la région, on retient qu’Obama a été… invité à faire ce qu’il a fait ! Indirectement, il va sans dire, mais invité quand même.

En quelques jours et seulement quelques jours, les assauts menés par les militants sunnites de l’Émirat islamique (EI) ont mis en lumière combien ces derniers étaient bien armés, bien préparés et très déterminés. À preuve, en peu de temps ils se sont emparés de Mossoul, des plus grands centres chrétiens, du plus grand barrage d’Irak, d’un poste frontière très important pour les Kurdes. Ils ont mis également en relief les faiblesses militaires des peshmergas, qui se sont repliés loin dans leurs terres kurdes. Quoi d’autre ? Parce qu’ils sont des fous de Dieu, des fanatiques, des contradictions de l’humanité, ils se sont employés à massacrer les chrétiens ainsi que les yézidis, qui forment une minorité religieuse parmi les plus anciennes au monde.

Dans le déroulement des actes posés par les uns et les autres au cours des dernières semaines, on constate une absence des plus troublantes : le premier ministre Nouri al-Maliki a fait le service minimum. Il ne s’est pas porté à la défense des minorités religieuses évoquées. Il n’a pas observé le cahier des charges afférent à une entente signée avec les responsables kurdes. Il n’a pas fait ceci, il n’a pas fait cela, parce qu’il n’en avait presque plus les moyens, ni l’envie. Là, nous abordons un aspect si « compliqué complexe » du dossier que le mystère des trous noirs chers aux astrophysiciens s’avère en comparaison une charade. Allons-y.

Avant toute chose, il faut souligner que Maliki est bien conscient que la très grande majorité des Irakiens, tous Arabes, détestent les Iraniens, tous Perses. Il est conscient que, depuis le départ des soldats américains en 2011, les pétromonarchies du golfe Persique fournissent des armes, des hommes et de l’argent aux sunnites de l’Irak et de la Syrie. Pour celles-ci, la perspective d’un régime irakien soutenu par l’Iran et d’un régime syrien soutenu également par l’Iran est synonyme de fin du monde. À ce propos, on se rappellera que la somme des violences interethniques constatées en 2012, soit après le départ du contingent américain, a été la plus élevée depuis 2006, au plus fort de la guerre civile. En 2013 ? La somme en question a enregistré une augmentation de 100 % par rapport à 2012 !

Maliki est également, voire surtout, conscient que, l’Iran et la Turquie ne disposant pas des moyens de leurs ambitions, il peut jouer certaines cartes à son avantage. La Turquie ? Entre la guerre civile qui ravage la Syrie, le million de réfugiés qu’elle a produits ainsi que la contestation dont il est le sujet chez lui, le premier ministre Recep Tayyip Erdogan a les mains liées. L’Iran ? Les sanctions économiques décidées aux États-Unis ont affaibli passablement le régime des ayatollahs. À cela il faut ajouter ceci : le soutien apporté au régime de Bachar al-Assad en Syrie épuise de plus en plus les énergies de la nation en plus d’alimenter les luttes internes au sein de la classe dirigeante. Quoi d’autre ? Au cours des deux dernières années, l’opinion des ayatollahs sur Maliki a changé du tout au tout. Ils ont la certitude que celui-ci caresse désormais l’ambition de faire de l’Irak un pays fort, un pays puissant. D’autant que, depuis un an, l’Irak est devenu le deuxième exportateur de pétrole de l’OPEP.

Tous ces facteurs considérés, toutes ces variables mélangées, on peut avancer que Maliki a fait et fait toujours le pari que, s’il parvient à faire la preuve qu’il a le soutien de Washington, même par défaut, il réussira à se maintenir en place. À la condition expresse que la Maison-Blanche s’implique davantage dans la lutte contre l’EI. Il est de notoriété publique que Maliki voudrait qu’Obama observe enfin l’accord signé en 2008, alors que George Bush était encore à la Maison-Blanche, qui s’intitule Strategic Framework Agreement (SFA). Il prévoyait une aide accrue.

La conclusion est un proverbe libanais : « Si tu penses avoir compris le conflit du Proche-Orient, c’est qu’on te l’a mal expliqué. »

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