Waiting for Netflix

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En attendant Netflix

C’est désormais officiel : l’ogre américain de la vidéo en ligne débarque en France le 15 septembre prochain. Netflix organisera ce soir-là une grande soirée parisienne. Le lancement de ce service qui permet de voir sur ordinateur, tablette, smartphone ou téléviseur des milliers de vieux films ou des séries exclusives, pour un coût très modique – sans doute 8 euros – sera un cas d’école.

D’abord parce que la fascination de la presse française pour ce sujet lui a ouvert un boulevard promotionnel incroyable : cela fait des mois que les journalistes français écrivent des pages sur le sujet, et la marque Netflix est déjà imprimée dans l’imaginaire du pays sans avoir dépensé un centime de publicité. Il existe pourtant plusieurs services comparables en activité : FilmoTv, Videofutur, Canalplay…mais nous, la presse, n’en avons pas beaucoup parlé, un peu parce que techniquement ces services sont moins performant, et surtout parce que tout ce qui vient de la Silicon Valley est doté d’une aura que le made in France n’arrive jamais à égaler.

Ensuite parce que cette chronique d’un débarquement annoncé depuis au moins deux ans souligne la difficulté de réaction dans ce pays. Pourquoi les acteurs hexagonaux n’ont-ils pas réagi plus tôt, plus fort pour préempter ce marché ? Canal + détient un service comparable, Canalplay, qu’il a laissé en jachère, de peur d’affaiblir son service premium. Bien sûr, Canal a fait de la pub pour sa filiale mais il n’a jamais poussé la logique commerciale à son terme pour en faire un bouclier de protection, de peur d’y perdre du chiffre d’affaire.

Le ministère de la Culture avait commandé en 2012 un rapport à Pierre Lescure, ancien PDG de Canal+ désormais président du festival de Cannes, afin de faire évoluer le secteur, et de le préparer à Netflix justement. Lescure a travaillé avec acharnement plus de six mois et il rendu un très bon rapport en mai 2013. Il conseillait d’assouplir la législation française, pour construire des services de SVOD – c’est techniquement ce que fait Netflix – plus attractifs, afin de réduire le piratage de films et séries en ligne, tout en proposant une offre de vidéos par abonnement, plus séduisante que ce qui existe aujourd’hui, pour couper l’herbe sous le pied des américains.

Taratata, ce rapport n’a servi à rien. Le ministère de la Culture a été incapable d’en tirer la moindre leçon, Bertrand Meheut, président de Canal plus, et Nonce Paolini, président de TF1, ont bloqué tous les changements ensuite.

Plutôt que d’attaquer, les Français ont donc rejoué le coup de la ligne Maginot. Ils ont attendu les chars de Netflix. Cette fin d’été, Canalplay lance enfin une pub à grand spectacle avec John Malkovitch pour séduire les foules avant son concurrent. Mais comment dire… d’abord, c’est un peu tard et cela souligne du coup encore plus la force de Netflix. Ensuite, ce n’est pas très convaincant. Canal+ est généralement bien mieux inspiré en matière de pub. Pourquoi Malkovitch ? Pour faire américain ? Pour faire Netflix ? Ça fait plutôt cheap. Canal aurait mieux fait de produire une série exclusive qui n’aurait été visible que sur son service pour y attirer de nouveaux abonnés, et nous empêcher de nous précipiter sur Netflix pour voir enfin “Orange is the new black”, sa série étendard qui aura sans doute beaucoup d’Emmys lundi 25 août.

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