The Misfires of Obama and of the Tea Party

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Les ratés d’Obama et du Tea Party

Les récents événements de Ferguson, venus remettre à l’avant-plan les problèmes structurels affligeant les minorités visibles aux États-Unis, ont largement occulté l’attention internationale portée aux élections de mi- mandat qui auront lieu le 4 novembre prochain. Celles-ci, mettant en jeu les 435 sièges à la Chambre des représentants et le tiers de ceux au Sénat (33 sur 100), vont toutefois prendre une place de plus en plus importante dans l’actualité au cours des dix prochaines semaines. À cette étape de la saison politique, deux observations s’imposent.

En premier lieu, notons que la conjoncture semble défavorable au Parti démocrate, qui demeurera sans doute minoritaire à la Chambre des représentants, et dont la courte majorité au Sénat est menacée par le fait qu’il détient neuf des douze sièges présentement en ballottage susceptibles de changer de camp (une perte nette de six sièges le mettrait en minorité). De même, bien que les enjeux locaux aient davantage d’importance lors des scrutins de mi-mandat que lors des présidentielles, la conjoncture nationale et internationale ne lui est pas favorable.

Certes, avec une croissance modeste mais stable, et un taux de chômage demeurant à un peu plus de 6 % depuis le printemps, la situation économique est même meilleure qu’au moment de la réélection de Barack Obama en 2012. Aussi, selon une étude effectuée par l’agence du budget du Congrès, plus de 36 millions de gens bénéficieront d’une forme ou une autre d’assurance maladie sous le nouveau régime (« Obamacare ») lors des prochaines élections de 2016, compliquant la tâche des forces qui plaideront alors pour sa révocation.

Insatisfaction

Le gouvernement Obama demeure toutefois aux prises avec un taux d’insatisfaction dépassant les 50 %, et plus particulièrement avec l’insatisfaction constante de deux électeurs indépendants sur trois. La mise en place chaotique de l’Obamacare en début d’année, les critiques continues à son endroit et la récente décision d’une cour d’appel de Washington concluant à une erreur dans la rédaction de la loi contribuent à maintenir son impopularité auprès de la moitié du public américain. En politique étrangère, les crises de Gaza, d’Ukraine et d’Irak/Syrie ont renforcé l’image, aisément véhiculée par les médias conservateurs, et plus récemment par Hillary Clinton préparant sa campagne présidentielle de 2016, d’une présidence demeurant en mode réactif et facilement prise au dépourvu. Ces éléments contraignent déjà nombre de candidats démocrates à se distancer d’Obama.

Difficile, la course pour le Sénat l’est encore davantage pour les démocrates en raison de l’autre fait majeur de ce cycle électoral : l’échec presque complet du Tea Party à imposer ses candidatures lors des primaires républicaines, ce qui contraste avec les situations de 2010 et 2012. Ce phénomène est d’autant plus notable que les candidatures se réclamant du conservatisme populiste du Tea Party bénéficiaient cette année d’un financement relativement bien structuré par des comités d’action politiques tels le Senate Conservative Fund ou FreedomWorks for America.

Contrairement à la Chambre des représentants, où le leader de la majorité républicaine Eric Cantor a subi une défaite-surprise en juin aux mains d’un « Tea Partier », le cycle électoral de 2014 demeure sans faute pour l’establishment républicain au Sénat dirigé par Mitch McConnell, lui-même victorieux de son opposant populiste lors des primaires républicaines du Kentucky. Malgré certaines victoires plus serrées (Pat Roberts au Kansas, ou Thad Cochran au Mississippi), aucun sénateur républicain sortant n’a été défait lors d’une primaire, une première depuis 2008 et une surprise pour nombre d’observateurs.

Centre de gravité

Le Parti démocrate se voit ainsi privé de l’un des avantages dont il bénéficia lors des deux derniers cycles électoraux, alors qu’il faisait face à des candidatures sénatoriales controversées et peu expérimentées liées au Tea Party telles Sharron Angle (Nevada), Christine O’Donnell (Delaware) ou Richard Mourdock (Indiana), qui avaient précédemment défait, lors de primaires, des politiciens associés à l’establishment républicain. Ces candidatures du Tea Party n’avaient pas seulement garanti aux démocrates des victoires qui auraient été autrement improbables, mais avaient nui aux campagnes nationales républicaines par les controverses qu’elles causèrent.

Si cet échec du Tea Party témoigne certes d’un certain pragmatisme de l’électorat républicain, il illustre aussi le déplacement continu du centre de gravité de leur parti vers la droite, phénomène que les enquêtes d’opinion confirment depuis quelques années sur l’ensemble des enjeux chers aux républicains, quoique l’importance des questions morales tende à décliner, nonobstant la présence médiatisée d’une Sarah Palin. Dans la mesure où l’ensemble des candidats républicains ont désormais plus ou moins intégré la rhétorique du Tea Party, la dichotomie « establishment contre populistes » est peut-être moins pertinente qu’auparavant.

À long terme, les questionnements auxquels fait face le Parti républicain demeurent. Le durcissement de son idéologie anti-étatiste et sa fixation continue sur la question de l’immigration illégale risquent de lui aliéner durablement les segments de l’électorat dont la croissance est la plus soutenue (notamment les minorités asiatiques et hispanophones), alors que diminue d’un recensement à l’autre sa propre base démographique blanche et plus âgée. À court terme, toutefois, les revers électoraux du Tea Party dans le présent cycle électoral favorisent le Parti républicain, dont l’électorat demeure par ailleurs plus mobilisé et, comme c’est généralement le cas, davantage susceptible de participer au scrutin de mi-mandat que celui du Parti démocrate.

En somme, les effets combinés de l’insatisfaction populaire envers le gouvernement Obama et la déconfiture du Tea Party pourraient fort bien causer au Parti démocrate la perte de sa majorité au Sénat. Le contrôle républicain dans les deux chambres du Congrès, ou même le maintien d’une courte majorité démocrate au Sénat, condamnerait la fin de la présidence Obama à une impotence politique semblable à celle qui affligea son prédécesseur George W. Bush durant la période 2006-2008.

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