Who Should Do the Dirty Work?

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La nouvelle guerre irako-syrienne dans laquelle les États-Unis et leurs alliés se sont engagés risque d’entraîner de terribles dommages corollaires et de déstabiliser un Proche-Orient déjà en proie à de graves conflits religieux et territoriaux. Dans quelques années, qui sait, cette offensive sera peut-être vue comme une gigantesque erreur, au même titre que les incursions précédentes en sol musulman, de l’offensive cow-boyesque de l’ex-président Bush en Irak à l’absurde destruction de la Libye, en passant par l’enlisement en Afghanistan.

On dira peut-être, alors, qu’il aurait fallu laisser les gouvernements arabo-musulmans – qui ont tous leurs propres raisons de craindre la montée de l’organisation État islamique, qui roulent sur l’or et qui ne sont tout de même pas militairement impotents – faire eux-mêmes le sale boulot plutôt que d’envoyer une fois de plus les pilotes américains et français bombarder les installations de Da’ech (nom arabe de l’EI), au risque de faire des milliers de morts parmi les civils et de déclencher encore plus d’agressivité envers l’Occident.

Pour l’instant en tout cas, la participation arabe dont se vante le président américain, dans son désir louable de faire croire que l’intervention de ses troupes s’inscrit dans une coalition multilatérale, semble bien ténue. À ce qu’on sache, même l’Arabie saoudite, la plus engagée des cinq monarchies sunnites qui appuient verbalement l’offensive anti-Da’ech, n’a joué qu’un rôle mineur dans les récentes frappes en Syrie.

L’engrenage étant amorcé, et le recul désormais impossible, ne faudrait-il pas, au moins, que le président Obama prenne les vrais moyens pour venir à bout de Da’ech?

Pour ce faire, ce dernier aurait intérêt à s’entourer de conseillers bien au fait des réalités du terrain plutôt que d’écouter les avis de Samantha Powers, son ancienne conseillère devenue ambassadrice aux Nations Unies, qui a été, avec Hillary Clinton et le philosophe Bernard-Henri Lévy, la principale instigatrice de la désastreuse intervention en Libye au nom du principe idéaliste du «devoir de protection» – un devoir qui obligerait moralement les démocraties à renverser les dictateurs qui maltraitent leurs peuples… et dont on a pourtant vu l’inanité en Irak, en Libye et en Égypte, où les populations souffrent encore plus qu’à l’époque des Hussein, Kadhafi et Moubarak.

Cette fois, Mme Powers justifie l’intervention américaine en Syrie en prétendant que le régime syrien «ne peut attaquer lui-même» les djihadistes – une prétention ridicule, car l’armée syrienne, qui les combat depuis trois ans, serait au contraire la seule force capable de mener une guerre au sol contre Da’ech en complémentarité avec les frappes aériennes américaines.

Le New York Times publiait récemment un article instructif d’Ahmad Samih Khalidi, un ancien négociateur palestinien qui enseigne aujourd’hui à Oxford. Il explique que les «rebelles syriens modérés» que les Américains ont choisis pour les seconder sur le terrain ne sont ni «modérés» (auquel cas ils n’auraient pas pris les armes) ni capables de constituer une alternative sérieuse au régime de Bachar al-Assad.

Comme d’autres experts arabophones, il estime que l’armée de Damas et ses alliés locaux, incluant le Hezbollah libanais, sont les seules forces capables de combattre Da’ech.

«Assad, malgré sa brutalité, n’a jamais constitué une menace pour l’Occident», signale-t-il. «Ce serait le comble de la folie que d’initier en Syrie une campagne qui mènerait à la confrontation avec les forces d’Assad et possiblement avec ses alliés iranien et russe.». Au contraire, si la lutte contre Da’ech est une priorité, mieux vaut s’allier aux forces chiites qu’à l’Arabie saoudite qui finance le terrorisme sunnite, insiste M. Khalidi. Voilà un conseil inspiré par la «realpolitik» plutôt que par l’angélisme…

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