After Cuba, North Korea’s Turn

<--

Le discours de Barack Obama pour justifier le rétablissement de relations diplomatiques avec Cuba doit s’appliquer à la Corée du Nord

Imaginons, l’espace d’un instant, ce discours de Barack Obama: «Bonjour. Aujourd’hui, les Etats-Unis d’Amérique changent leur relation avec le peuple de Corée du Nord. Dans ce qui est le changement le plus significatif de notre politique depuis plus de soixante ans, nous allons mettre un terme à une approche éculée qui, durant des décennies, a échoué à promouvoir nos intérêts, et au lieu de cela nous allons normaliser les relations entre nos deux pays.»

L’intervention du président américain, mercredi, annonçant l’ouverture à Cuba aurait pu s’appliquer quasiment à la virgule près à la situation nord-coréenne. L’étape suivante dans ce repositionnement des Etats-Unis sur la scène internationale devrait être l’Iran. Le rapprochement est en cours, c’est le plus attendu. Mais les similitudes entre Cuba et la Corée du Nord sont les plus frappantes: dans les deux cas, la politique d’isolement et de sanctions contre l’ennemi idéologique a totalement échoué. Pire, cette approche a été largement responsable du maintien de pouvoirs autoritaires – totalitaire dans le cas nord-coréen – dont les premières victimes sont les populations soumises à ces régimes.

Les Kim à Pyongyang, tout comme les Castro à La Havane, et les ayatollahs en Iran, fondent leur légitimité sur leur capacité de résistance à l’impérialisme américain.

La Corée du Nord en est l’exemple le plus dramatique. Elle est soumise à des sanctions économiques américaines depuis le déclenchement des hostilités en 1950. Voilà bientôt 65 ans que ces deux Etats sont techniquement en guerre puisque aucun accord de paix n’a été signé depuis l’armistice de 1953. Kim Jong-un, tout autant que son père, Kim Jong-il, et que son grand-père, Kim Il-sung, demeure persuadé que les Etats-Unis veulent l’éliminer. Ce n’est pas qu’une simple paranoïa, les sanctions américaines ayant souvent été accompagnées d’un discours prônant un changement de régime.

S’il est un pays où une intervention militaire au nom du droit d’ingérence semble justifiée, c’est bien la Corée du Nord. Le sort de la plupart de ses 23 millions d’habitants est abject, comme vient encore de le rappeler le Conseil des droits de l’homme. Or, les pressions et les menaces, comme à Cuba, n’ont jusqu’ici produit aucun effet sur la stabilité du régime.

Bien sûr, il y a de nombreuses différences entre Cuba et la Corée du Nord. Dans le cas coréen, le contexte géopolitique est singulièrement complexe puisqu’on se retrouve à la jonction des intérêts stratégiques non seulement des Etats-Unis, mais aussi de la Chine, de la Russie, du Japon et de la Corée du Sud. Pour sortir de cette impasse – le dernier vestige de la Guerre froide – c’est pourtant au plus fort, et non au plus faible, de faire le geste qui transforme la donne.

Ce qu’Obama a osé avec Castro, il doit le tenter avec Kim Jung-un. C’était d’ailleurs une promesse de sa campagne présidentielle en 2008. Pour être honnête, un premier pas a été réalisé en 2009 lorsque Washington retira Pyongyang de la liste des Etats soutenant le terrorisme. C’était insuffisant. La maladie de Kim Jong-il, puis sa succession en 2011 ont certainement freiné l’élan américain. Pour asseoir son pouvoir, Kim Jung-un se devait dans un premier temps de muscler son discours en l’accompagnant d’essais nucléaires.

Mais le précédent cubain peut désormais servir d’exemple. Pour instaurer le dialogue, il faut d’abord le respect mutuel comme l’a souligné Raul Castro dans son intervention télévisée. Ensuite vient la confiance. Ce qu’il y a de fondamentalement nouveau avec Obama, c’est que les Etats-Unis ont renoncé à renverser des régimes politiques hostiles. «Il n’est pas dans les intérêts américains, ou ceux du peuple cubain, d’essayer de pousser Cuba vers l’effondrement, explique le président américain. Même si cela fonctionnait – et ce ne fut pas le cas durant cinquante ans – nous savons d’une expérience durement acquise que les pays sont plus susceptibles de jouir d’une transformation durable si leur peuple n’a pas sombré dans le chaos.»

Alors, après Cuba, la Corée du Nord? Soixante ans après la fin des combats, un traité de paix devrait être envisageable…

About this publication