Russia, America and the Rise and Fall of Oil Prices

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De prime abord, on serait enclin à qualifier la chute des prix des hydrocarbures comme étant la divine surprise pour les États-Unis d’Amérique. Quand on s’attarde à la mécanique inhérente à la chute en question, on réalise qu’elle a bel et bien été conceptualisée d’abord, et appliquée ensuite. Avec, en prime, des bouleversements géopolitiques gigantesques.

Dans le dernier entretien accordé par Barack Obama au réseau radiophonique PBS, ce dernier confirme ou révèle que sa politique étrangère, celle plus exactement des deux dernières années, a été conçue à l’enseigne de la « patience stratégique », pour reprendre ses propres mots. Au ras des pâquerettes, la patience en question a accouché des sanctions économiques imposées à la Russie à la suite de ses interventions en sol ukrainien et du renforcement de celles imposées à l’Iran par George W. Bush dans la foulée de la découverte des ambitions nucléaires des ayatollahs.

Selon ses confidences, le chef de l’exécutif américain avait la conviction que « les sanctions rendraient l’économie russe suffisamment vulnérable pour que […] quand le prix du pétrole viendrait à être perturbé — ce qui allait inévitablement se produire, sinon cette année, au moins l’an prochain ou l’année d’après —, alors les Russes auraient d’énormes difficultés à le gérer ». D’autant plus profondes, les difficultés, que la santé économique de ce pays était et demeure très tributaire du prix de l’or noir.

De cette réalité, tout le monde était conscient pour la bonne et « plate » raison que depuis son accession au pouvoir et l’augmentation-surprise des prix du pétrole, dès l’an 2000, le président Vladimir Poutine a été incapable de moderniser et de diversifier l’économie du pays. Résultat, grosso modo il va sans dire, la Russie exporte du gaz, du pétrole et un peu d’armes, et importe pratiquement tout le reste. Signe de l’énorme irresponsabilité du Kremlin, les recettes découlant du commerce des hydrocarbures totalisaient au-delà de 8 % du budget au début des années 2000 contre 52 % (!) aujourd’hui. Bref, tout le pays bat au rythme de l’évolution de l’or noir.

Le recul de 50 % de la valeur du baril au cours des six derniers mois a eu ces conséquences d’une brutalité inouïe : pour stopper la chute du rouble, la banque centrale a haussé son taux d’intérêt de 10,5 % en juin à 17 % aujourd’hui ; la contraction du PIB au cours du dernier trimestre a été de 4 % ; le déficit budgétaire a été de 3 %, et restera comme tel en 2015. Quoi d’autre ? Le budget de la Russie ayant été confectionné à l’aune d’un baril à 70 $, il s’est métamorphosé de facto en une fiction.

Il en va en Iran et au Venezuela comme il en va en Russie. Dit autrement, dans ces pays, la situation économique est une copie quasi-carbone de celle qui prévaut en Russie. L’atomisation des embarras économiques s’étant soldée par une amputation de la marge de manoeuvre politique respective à ces trois nations, celles-ci n’ont plus, mais plus du tout, les moyens de leurs ambitions géopolitiques. Commençons par le plus simple des cas, soit le Venezuela.

Il est désormais de notoriété publique que la variable politique ayant le plus convaincu le Cubain Raúl Castro de conclure un accord avec les États-Unis, il y a plus d’une quinzaine de cela, a l’angoisse pour nom. Laquelle ? Que le recul prononcé de la valeur du pétrole oblige le Venezuela à effectuer ce que la Russie a fait au lendemain de la chute du Mur, soit abandonner financièrement Cuba.

Dans le cas du duo que forment l’Iran et la Russie sur le flanc moyen-oriental, il est écrit dans le ciel que les soutiens accordés au syrien Bachir al-Assad vont être le sujet d’une profonde modification au cours des prochains mois. D’autant plus que l’ennemi ancestral et régional de l’Iran, soit évidemment l’Arabie saoudite, n’entend pas réduire son offre de pétrole afin de saigner financièrement et durablement Téhéran.

Dans ce billard à mille bandes diplomatiques, les États-Unis ont un avantage énorme sur ces trois principaux « adversaires » que sont la Russie, l’Iran et le Venezuela, mais aussi sur l’Arabie saoudite. Il se trouve en effet qu’au cours des récents mois, les États-Unis ont détrôné l’Arabie saoudite du rang de premier producteur d’hydrocarbures, confirmant du coup qu’ils n’ont plus besoin du pétrole persique. Ils sont indépendants de l’Arabie saoudite comme du Venezuela comme des autres. Bref, les États-Unis d’Amérique ont ajouté l’or noir à leur panoplie d’armes stratégiques. Pour reprendre le mot de l’ex-ministre français des Affaires étrangères, ils formaient l’hyperpuissance, ils vont le rester.

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