Obama Isn’t Charlie

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L’absence du président des États-Unis à la marche du 11 janvier, qui a rassemblé 44 chefs d’État, n’est pas seulement due aux contraintes de son calendrier.

Il va falloir pour l’Amérique amortir l’effet aussi dissonant que dommageable de l’absence du président des États-Unis à cette démonstration inouïe que fut la marche pour la liberté contre l’intolérance du 11 janvier. Une démonstration populaire qui a vu descendre plus de trois millions de Français dans la rue. Et fait défiler au coude-à-coude, en une manifestation sans doute unique dans l’histoire, 44 chefs d’État et de gouvernement venus du monde entier : d’Angela Merkel à David Cameron, du roi de Jordanie au président du Mali, de l’Israélien Netanyahou au Palestinien Mahmoud Abbas.

Pour cela, Obama peut certes compter sur John Kerry. Son secrétaire d’État, qui s’est annoncé ce jeudi à Paris en provenance d’Inde et des pays de l’Est et qui, dès que fut connue la nouvelle de l’assaut terroriste contre Charlie Hebdo, a fait, en français, une magnifique déclaration de solidarité : “Nous sommes solidaires de votre engagement dans la lutte contre l’extrémisme et de votre détermination à protéger la valeur qui fait si peur aux extrémistes et a toujours uni nos deux pays : la liberté.”

Mais il y a des moments où les mots ne suffisent pas. Comme l’ont compris, en se rendant à Paris, Mme Merkel ou MM. Rajoy, Renzi, Junker ou Samaras. La chaleur d’une présence cautionne la solidarité affichée.

Beaucoup de fausses excuses…

Bien sûr la Maison-Blanche a fait remarquer qu’outre l’ambassadrice des États-Unis à Paris, la sous-secrétaire d’État aux affaires européennes, Victoria Nuland, était venue de Washington pour participer à la marche. Contrairement à Eric Holder, l’homologue de Bernard Cazeneuve, venu discuter avec les ministres européens de l’Intérieur de nouvelles mesures de sécurité et qui étrangement n’a pas jugé utile de prolonger de quelques heures son séjour à Paris pour participer à la manifestation de la République à la Nation.

Évidemment les mesures de sécurité drastiques qui protègent un président américain ont probablement amené ceux qui sont chargés de la garde rapprochée d’Obama à le dissuader d’aller en France. Mais, après tout, Benyamin Netanyahou est sans doute tout aussi menacé et protégé. D’ailleurs ses gardes du corps étaient tellement présents que, pendant le défilé, l’un avait souvent sa main sur l’épaule du Premier ministre israélien tandis que l’autre lui tenait le bras comme on le fait pour un enfant.

La première raison pour laquelle Obama n’est pas venu à Paris, il faut sans doute la chercher ailleurs : président d’un pays qui reste profondément puritain, il ne se sent pas à l’aise avec la satire, la dérision, la désacralisation telle que la pratique depuis toujours Charlie Hebdo tous azimuts et notamment sur les religions. Il n’y a peut-être que très peu de pays où l’on peut écrire comme on l’a prêté – faussement semble-t-il – à Voltaire : “Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire.”

… et de curieux amalgames

Le directeur de la rédaction du New York Times, Dean Baquet, a reconnu qu’il avait longuement hésité à publier des dessins de Cabu ou de Charb le jour de l’attentat. Et qu’il avait d’ailleurs fini par y renoncer. Quant à la chaîne de télévision CNN, elle a passé sa journée à montrer des portraits des dessinateurs tombés pour défendre une certaine idée de la presse en cadrant ses images de telle façon que seul le bandeau de Charlie Hebdo apparaissait à l’image et jamais la caricature qui faisait la couverture du magazine.

D’ailleurs Obama lui-même n’avait pas caché, en 2012, dans un discours à l’Assemblée générale de l’ONU, ses réserves personnelles à l’égard des dessins qui tournent en dérision les religions : “L’avenir ne peut appartenir à ceux qui blasphèment le prophète de l’islam. Mais pour être crédibles, ceux qui condamnent ces blasphèmes doivent aussi condamner la haine avec laquelle on désacralise les images de Jésus-Christ, on brûle les églises, on nie l’holocauste”… Curieux amalgame d’ailleurs du président des États-Unis entre ce qui est du domaine de la satire et donc de la liberté de penser ou dessiner et celui d’une réalité hélas tragique. Non, décidément, Obama n’est pas Charlie !

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