King Abdullah’s Death Reveals the True Face of the West

<--

La mort du roi Abdallah montre le vrai visage de l’Occident

La réaction des pays industrialisés à la mort du roi Abdallah Ibn Abdelaziz Al Saoud montre non seulement leur hypocrisie face aux droits de l’Homme, mais lève aussi le voile sur la joute géopolitique derrière la dégringolade des prix du pétrole.

Nonobstant les violations des droits de l’homme, François Hollande estime que l’Arabie saoudite est un “partenaire stratégique”

Le décès du roi d’Arabie Saoudite est arrivé au pire moment possible pour les stratèges occidentaux de la politique au Moyen-Orient. Pris dans une situation où ils devaient révéler leurs vraies allégeances, les dirigeants de plusieurs pays ont dû laisser tomber leurs masques d’humanistes. Ils ont montré leur solidarité avec ce pays qui torture ses détenus à coups de fouet et les décapitent sur la place publique. Pourtant, ces mêmes dirigeants dénonçaient il y a quelques jours les premiers 50 coups de fouet de la sentence de 10 ans de Raif Badawi. Il en recevra 20 fois plus pour avoir osé dire ce qu’il pensait de Riyad qui applique une version littérale de l’Islam. Ce tout petit pays a perpétré le troisième plus grand nombre d’exécutions au monde en 2014 dont certains par décapitation publique.

Tout sonne faux quand on entend les condoléances des dirigeants des pays industrialisés au sujet du décès du roi d’Arabie Saoudite. L’absence totale de droits de l’Homme dans ce pays ne semble pas avoir gêné le président américain Barack Obama d’en faire un allié politique et économique, un ami véritable et chaleureux. Le roi Abdallah, bien qu’a la tête d’un pays qui punit par la mort le crime d’apostasie, a été encensé par le premier ministre britannique David Cameron pour son renforcement de la compréhension entre les religions. Le premier ministre canadien Stephen Harper l’a salué comme un ardent défenseur de la paix au Moyen-Orient alors que l’Arabie Saoudite a fait exécuter 87 condamnés en 2014 et 78 en 2013. Même la haute finance internationale a donné de la voix dans ce concert d’hypocrites. La directrice du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, a présenté le roi Abdallah comme un homme qui était de manière discrète un grand défenseur des femmes. À la tête d’une monarchie avec une police religieuse, il ne pouvait pourtant être classé parmi les réformateurs. Son éloge montrait l’abjecte soumission de son organisme à la monarchie de l’un des pires pays en matière de droits des femmes. Il est le dernier au monde où les femmes ne sont pas autorisées à conduire. Elles doivent demander l’autorisation à un homme avant de pouvoir voyager, suivre des études supérieures, travailler ou se marier.

À l’opposé, l’organisation Human Rights Watch a su garder la tête haute et a continué de défendre les droits de l’Homme, ce qu’aucun pays de l’occident n’a fait. Tous ces dirigeants qui ont marché dans les rues de Paris pour dénoncer ceux qui nient le droit de parole par la force n’ont pas dit un mot en ce sens alors qu’ils décrivaient le roi du pays qui l’opprime le plus. Aucun de ces chefs d’État n’a demandé au nouveau monarque saoudien de faire cesser les persécutions contre les dissidents, les discriminations à l’égard des femmes ou demander la mise en place d’un système judiciaire équitable et impartial. Le futur ne s’annonce pourtant pas mieux que le passé pour les femmes dans ce berceau du wahhabisme. L’héritier désigné, le prince Salman Ben Abdel-Aziz Al-Saoud est âgé de 79 ans et régnera sans opposition, syndicats ou société civils sur le Majlis al-Choura puisque seules les élections municipales sont autorisées. Salman estime d’ailleurs que la démocratie ne convie pas à son royaume et sa première décision a été de désigner Mohammed ben Nayef comme son prince héritier. Comment comprendre le fait qu’Abdelaziz Bouteflika ait imposé trois jours de deuil à l’Algérie pour un tel régime ? La décision du roi de laisser tomber le prix du pétrole est le principal problème que l’Algérie doit gérer actuellement et le roi Abdallah était l’architecte de la stratégie de maintenir une production élevée. L’explication la plus logique est qu’il a plus d’affinité avec la monarchie saoudienne qu’avec son propre peuple.

Le fait que les dirigeants des pays industrialisés signalent si fortement leur support pour l’Arabie Saoudite qui est insensible aux droits de l’Homme révèle beaucoup plus de leur jeu qu’ils ne le voudraient. L’organisation Amnesty International a levé un gros lièvre en dénonçant les nombreux pays occidentaux qui ont protégé la monarchie pétrolière pendant ces décennies de violations des droits de l’Homme. Grâce à ses pétrodollars donnés en grande partie par l’Occident, le berceau du wahhabisme a financé dans le monde entier une version sectaire de l’Islam. En montrant que l’accord de protection et d’échange scellé en février 1945 entre l’Amérique et le roi Ibn Saoud tient encore, le décès du roi Abdallah remet les pendules à l’heure en ce qui concerne la présente guerre du pétrole. Ce ne sont pas les entrepreneurs américains, mais les Russes, les Vénézuéliens, l’Iran et la Syrie qui sont visés par cette diminution intentionnelle du prix du baril de pétrole. Comme en 1986 l’Arabie Saoudite fait intentionnellement tomber les prix du pétrole à la demande de ses amis américains dans le but d’affaiblir l’Union soviétique qui relevait un peu trop la tête. Les pays touchés et plus particulièrement le président russe Vladimir Poutine peuvent donc considérer cette action comme un acte de guerre intentionnel et agir en conséquence.

Michel Gourd

About this publication