Daech : Obama n’exclut pas de déployer des troupes au sol
Trois ans pour vaincre Daech : tel est le délai que se donne Barack Obama dans un projet de loi soumis mercredi au Congrès des États-Unis, l’autorisant à faire usage de la force militaire contre une menace islamiste galopante au Moyen-Orient.
Connue sous l’acronyme AUMF (Autorisation de l’usage militaire de la force), cette initiative de la Maison-Blanche attendue depuis l’automne dernier devait venir combler un vide juridique préoccupant pour la démocratie américaine, fidèle au principe du «checks and balances» (équilibre des pouvoirs), et un embarras politique croissant pour Obama: en guerre ouverte contre le mouvement djihadiste depuis le 8 août 2014, date des premières frappes aériennes sur l’Irak, le pouvoir exécutif n’avait jusqu’ici jamais cherché à faire autoriser son action par le législatif, comme il se doit en temps de guerre.
Barack Obama s’appuyait sur deux lois de 2001 et 2002, qui autorisèrent l’Administration Bush à traquer sans relâche al-Qaida, commanditaire des attentats du 11 septembre 2001, et le régime irakien de Saddam Hussein. «Ces lois obsolètes ne correspondaient plus du tout à la nature actuelle de la menace, explique Adam Schiff, représentant démocrate et membre de la commission du renseignement. Il fallait les remplacer par un texte taillé sur mesure, qui permette de lutter contre l’État islamique (autre vocable pour Daech) en Syrie et en Irak, mais pas contre les milices islamistes de Libye ou Boko Haram au Nigeria. Pour cela, il faudrait revenir devant le Congrès.»
Outre sa durée limitée, l’AUMF favorise le déploiement de forces spéciales et de conseillers «à des fins défensives», mais exclut «des opérations offensives au sol prolongées», selon les termes employés mardi par le chef de cabinet de la Maison-Blanche, Denis McDonough, et les vœux des élus démocrates échaudés par treize années de «guerre contre la terreur». Elle obligerait en outre le successeur d’Obama à revenir devant le Congrès en 2018 pour demander une éventuelle prolongation de la loi.
L’AUMF, taillée sur mesure pour intervenir contre Daech, ne fait cependant pas l’unanimité parmi les édiles fédéraux. Le sénateur républicain John McCain souhaite une «carte blanche» à l’exécutif américain, refusant qu’un AUMF restrictif ne «lie les mains dans le dos» du président au moment de déployer des «boys» sur le terrain. Son collègue Lindsey Graham exige que soit autorisé l’usage de la force contre le régime syrien de Bachar el-Assad, jugé responsable de l’émergence de Daech en Syrie.
Dans un geste conciliant, comme pour indiquer sa volonté d’aboutir rapidement, Barack Obama a précisé mercredi dans un communiqué qu’il «n’excluait pas de déployer des troupes au sol en appui des frappes aériennes » contre l’État islamique, «si le Pentagone le recommande».
Divisé sur la portée de ces «pouvoirs de guerre» étendus, le Congrès, à majorité républicaine, se prépare à de vigoureux débats à son retour en session, le 23 février, après de brefs congés d’hiver. Un vote pourrait survenir dès le mois de mars, pour peu qu’émerge un compro-mis bipartisan. Le temps presse: les services secrets américains estiment que 20.000 volontaires étrangers ont rejoint les rangs de Daech en Syrie.
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