Après le déclenchement de la crise économique et financière mondiale, les principales banques centrales et les gouvernements ont essayé par tous les moyens de trouver une solution appropriée. La première étape a été la mise en œuvre de mesures d’urgence pour sauver les banques et les compagnies d’assurance. La deuxième étape a été le lancement d’une politique monétaire expansive. La troisième étape a consisté à créer quantité de programmes de relance économique, tous financés à crédit.
Comme tout cela n’a pas suffi, on est passé à une quatrième étape : une politique monétaire ultra-expansive encore jamais vue, avec l’assouplissement quantitatif et le recours sans limite à la dette publique. Tout cela étant resté sans succès véritable, on est rentré dans une cinquième étape consistant, pour les pays, à utiliser sanctions et mesures protectionnistes. Inévitablement commence maintenant une sixième étape : la course à la dévaluation.
Sur les marchés des devises, la dévaluation est déjà en cours. La BCE et la Banque du Japon sont en train d’affaiblir leur monnaie respective, l’euro et le yen. La Banque centrale chinoise veut éviter une réévaluation du yuan. Le rouble est sous une pression considérable à cause de l’Ukraine. Les devises des matières premières, les dollars canadien, australien et néo-zélandais souffrent de la faiblesse des marchés à terme. La Banque nationale suisse fait tout ce qu’elle peut pour empêcher une appréciation du franc suisse après sa décision d’abandonner le taux plancher par rapport à l’euro. La banque d’Angleterre est loin d’être heureuse de la montée de la livre sterling. Les spéculateurs à travers le monde sont déjà presque tous long en dollar US. Les Etats-Unis ne veulent pas du tout d’une réévaluation du dollar qui aggraverait encore plus les déficits de leur commerce extérieur. L’économie mondiale et le système monétaire mondial sont en pleine mutation.
Le produit intérieur brut (PIB) de l’EU28 exprimé en standards de pouvoir d’achat (SPA 1), représente 18,6% du PIB mondial en 2011. Les Etats-Unis, deuxième plus grande économie, représentent 17,1% et la Chine, en troisième position, représente 14,9% (source : Eurostat). La Banque mondiale et l’ONU sont même persuadées que, selon cette méthode de calcul, la Chine serait maintenant à la première place et l’Inde devant le Japon.
La part dans le PIB global des différentes régions du monde n’est pas en proportion de leur part dans les réserves mondiales de change, qui s’élèvent actuellement à environ 11 770 milliards de dollars. Le FMI, dans sa “Currency Composition of Official Foreign Exchange Reserves” (COFER), est en mesure d’allouer 52,5% de ce montant — dont 62,3% sont libellés en dollar américain et 26,6% en euro. Si l’on y ajoute le yen japonais (4%), la livre britannique (3,8%), le dollar canadien (1,9%) et le dollar australien (1,9%), alors ces six monnaies représentent 97% des réserves mondiales.
▪ Par quoi remplacer le dollar ?
Les candidats potentiels pour entrer dans le cercle des monnaies de réserve mondiales sont le yuan, la roupie, le réal et le rouble — mais aucune ne remplit, actuellement, la condition de libre convertibilité.
L’euro ne deviendra pas la monnaie de réserve mondiale ; dans ce rôle, nous allons plutôt voir émerger un panier de devises
La plus grande part des réserves en devises du monde reste libellée en dollars US. En fait, le montant nominal en dollars US est resté au même niveau au cours des derniers trimestres, mais a baissé en pourcentage. L’euro ne deviendra pas la monnaie de réserve mondiale ; dans ce rôle, nous allons plutôt voir émerger un panier de devises.
L’organisation Swift (Society for Worldwide Financial Telecommunications) a publié une liste des monnaies d’après leur utilisation pour les paiements transfrontaliers. Dans le haut de la liste on trouve le dollar (44,6%) et l’euro (28,3%), suivis par la livre sterling (7,9%), le yen (2,67%), le dollar canadien (1,8%) et le dollar australien (2%).
Dans ce classement, le yuan chinois a pris la cinquième place (13ème il y a deux ans). Il représente seulement 2,17% de la valeur totale des paiements, mais affiche une forte dynamique. En 2017, le yuan pourrait être librement convertible. Actuellement, sa variation quotidienne avec le dollar US est limitée à un couloir étroit. On estime que sa part de marché devrait s’élever à 25% d’ici 2020. Avec une plus large utilisation internationale, le yuan pourrait être enregistré dans un panier de devises étrangères désignées par le FMI comme monnaie de réserve. Ces devises de réserve sont la base des droits de tirage spéciaux (DTS) gérés par le FMI et qui feront, cette année, l’objet du réajustement qui a lieu tous les cinq ans.
Les poids des pays dans l’économie mondiale sont donc différents du poids de leur monnaie dans le système mondial de réserves de devises et différents de la part que ces monnaies prennent dans les paiements internationaux. Bien sûr, ces différents pourcentage ne peuvent pas être exactement les mêmes, mais les écarts sont devenus si grands que les tensions et les frictions font naître des tendances protectionnistes et ralentissent la dynamique du développement économique. Le rôle dominant du dollar va diminuer dans les prochaines années.
▪ L’or n’a pas dit son dernier mot…
Les banques centrales détiennent une partie de leurs réserves monétaires en or. La Chine et la Russie ont considérablement augmenté le stock d’or dans leurs réserves en devises au cours des derniers trimestres. Les vendeurs ont été principalement les fonds occidentaux. Officiellement, la Chine détient 1 054 t et la Russie 1 208 t d’or dans leurs réserves monétaires, respectivement une part de 1% et 1,2%. Les Etats-Unis détiennent 8133 t (71,6%) et l’Allemagne 3384 t (67%). La France et l’Italie ont chacune 2450 t (66%).
Actuellement, les banques centrales de la Zone euro ont provisionné 10 792 t d’or comme “réserve de sécurité”. Toutes les banques centrales ont acheté ensemble 477 t en 2014 ( le plus grand volume en 50 ans) et sont susceptibles, selon le World Gold Council, d’en acheter au moins 400 t en 2015. Ainsi, la question se pose : se préparent-elles déjà à un changement du rôle de l’or dans le système monétaire mondial?
Conclusion : une solution aux déséquilibres internationaux doit être trouvée. Si les politiques ne la trouvent pas, ce sont les marchés qui l’imposeront. Une réforme du système monétaire mondial n’est pas pour tout de suite mais, sur une période de 10 ans, un panier constitué de plusieurs monnaies et d’or pourrait remplacer le système actuel. Les investisseurs sur les marchés financiers doivent s’y préparer. Le dollar américain est loin d’être “la seule monnaie alternative” et l’or n’est pas nécessairement “à éviter”, contrairement aux observations répétées des médias…
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