And the ‘Spring’ Turns Sour

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Et le “printemps” tourne au vinaigre…

Que reste-t-il du «Printemps» dit «arabe» sur lequel l’Occident a mis tant d’espoirs et que ses médias avaient monté au pinacle? Les macabres statistiques de femmes, d’enfants et d’hommes broyés par des conflits dont ils ne comprennent pas le pourquoi illustrent une tragédie arabe sans nom. De fait, quatre ans après les guerres ouvertes dans des pays arabes, le pourquoi de ces conflits n’est toujours pas élucidé. Pouvait-il en être autrement si l’on excipe du fait de la prise en charge des évènements par des puissances qui ne voulaient pas que du bien aux peuples arabes en Tunisie, en Syrie, en Libye, en Egypte, au Yémen?

Ledit «Printemps» a été salué en Occident et par certaines parties arabes comme le symbole de la «délivrance» pour les peuples arabes. Quelle délivrance! De fait, nombreux ont été les médias, singulièrement français, qui à l’époque (entre janvier et avril 2011) disaient à profusion «ne pas comprendre le ratage» par l’Algérie de son «printemps». Reportez-vous aux écrits de cette période et notamment les analyses et interrogations sur le «ratage» par l’Algérie du train du «changement». Avec le recul, la lecture de ces textes surréalistes est très instructive.

Or, ledit «Printemps arabe» qui aura surtout induit la déstructuration et la destruction de certains pays arabes – singulièrement la Libye et la Syrie – entrait de plain-pied dans un vaste plan de reconfiguration du Monde arabe et musulman. Plutôt inattendu, du moins dans le contexte dans lequel il s’est produit, (la brutale révolte des Tunisiens contre la dictature de Ben Ali), ledit «Printemps arabe» n’en a pas moins été la conjoncture attendue par ceux qui avaient le projet de restructurer le Monde arabe. Là où ce «Printemps» n’a pas pris ou n’était pas à l’ordre du jour, on l’a suscité, en faisant en sorte qu’il y ait enclenchement de la mise en oeuvre de la réorganisation du Monde arabe.

Cela a été le cas notamment pour la Libye et la Syrie, où un «Printemps» a été conçu «clé en main». Les vies de millions de Libyens (les frappes de l’Otan contre Tripoli et Benghazi) et de Syriens (les atrocités commises par les groupes rebelles et jihadistes) n’avaient pas de valeur face aux énormes enjeux que constituait le contrôle d’une région stratégique. Un regard sur une carte géopolitique du Monde arabe vous situe ces enjeux: carrefour entre l’Orient et l’Occident, 60% de l’énergie fossile mondiale (pétrole, gaz conventionnel, gaz de schiste) se trouvent au Maghreb (Algérie, Libye) et au Moyen-Orient (Arabie saoudite, Qatar, Irak, Iran, Syrie…). En Irak, les premiers hommes qui ont débarqué dans l’ombre des marines en 2003 ont été les pétroliers texans.

C’est tout un symbole. Si les Etats-Unis – en particulier – n’agissent pas à visage découvert, comme ils le firent en Irak, ils ne sont pas moins les maîtres d’oeuvres de cette remise à niveau du Monde arabe, par groupes jihadistes interposés. En fait, le scénario est tout à fait au point: aux jihadistes les atrocités qu’ils commettent et médiatisent (l’assassinat du pilote jordanien est particulièrement odieux), à l’Occident de crier aux crimes contre l’humanité (il est dans son rôle, tout en tentant de faire endosser au régime syrien ces crimes horribles). Normal, les «barbares» c’est nous, qui n’entrons pas dans les plans de la «civilisation» made in Occident qui, lui, se dit démocrate et «humaniste». Les peuples du Vietnam, d’Afrique, du Moyen-Orient peuvent en témoigner.

Non! Nous ne nous éloignons pas du sujet, nous restons de plain-pied dedans: des milliers de «jihadistes» qui activent en Irak, en Syrie et en Libye ont été formés par la CIA et financés par l’Arabie saoudite. Riyadh travaille sans relâche à l’expansion du wahhabisme (et son double sulfureux, le salafisme) dans le monde (pas exclusivement arabe, même si ce dernier est prioritaire) boosté par les pétrodollars. L’Afghanistan des années 2000 (ses moudjahidine et ses taliban), l’Egypte et l’Algérie (1990) ont connu ces hordes sauvages qui ont déferlé sur leur territoire – brûlant et tuant tout ce qui bouge – en connaissent quelque chose.

Aussi, la tournure sanglante et effrayante des dites «révolutions» en Syrie, en Irak et en Libye a-t-elle pris de court stratèges et analystes qui se répandent dorénavant en explications aussi percluses que vaines sur ce qui, selon eux, aurait dû être l’avènement de la «démocratie» dans le Monde arabe? Une «démocratie» que brandissent ceux qui se sont donné pour mission de réformer le Monde arabe, mais qui couvre en fait des velléités qui n’ont rien à voir avec le libre arbitre des peuples arabes. Les tragédies que vivent les peuples libyen et syrien interpellent chaque jour ceux qui ont décidé de les «civiliser». Vues de Washington, Paris et Londres, Damas et Tripoli étaient alors loin et le retour de bâton pas prévu.

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