In Tokyo, Michelle Obama and Her Kenzo Dress

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Michelle Obama a atterri hier pour trois jours de visite au Japon. A peine un pied sur le tarmac que déjà sa silhouette ouvre à corps vêtu le débat sur la diversité et les identités plurielles.

Elle surgit de l’avion présidentiel, sa silhouette fuselée offerte à la brise du printemps précoce. Son brushing, sensible aux rafales, lui fait porter la main gauche à son front pour neutraliser une mèche à l’envolée, tandis que la droite salue, sourire, séduction. Et puis la robe. Une robe Kenzo, strates citron aux plissures d’origami, structurée mais pas stricte. Michelle Obama a l’art des entrées en scène. Hier, l’aéroport Haneda de Tokyo lui tenait lieu de théâtre. Lever de rideau en solitaire: la First Lady fait ses premiers pas au Japon sans Barack.

Ce dernier s’est déplacé à Tokyo en avril dernier, et l’absence de sa compagne avait fait grogner des membres particulièrement conservateurs du parlement japonais. Qu’importe. Michelle n’est pas que «l’épouse de». Elle vient avec ses propres projets. Pour les défendre, ce n’est pas le premier ministre Shinzo Abe qu’elle rencontrera d’abord, mais la première dame Akie Abe. Histoire de boire le thé, sans doute, mais surtout de promouvoir l’initiative Let Girls Learn, dont l’objectif est d’améliorer l’accès à l’éducation pour les 62 millions de filles non scolarisées autour du monde.

Deux «femmes de» qui font des trucs de fille? Plutôt deux fois qu’une. Son propre rôle, Madame Obama le réinvestit pour mieux en renégocier les prérogatives. Etre femme de président, une histoire d’apparence et d’apparat? Avec Michelle, ce(tte) mode de représentation se fait discours, commentaire, engagement. Prenez sa robe. Kenzo, c’est l’image même d’un soft power japonais ouvert à la pluralité et à l’intégration, une maison fondée à Paris dans les années 1970 par Kenzo Takada, aujourd’hui dirigée par un Sino-Péruvien et une Américano-Coréenne dont les concept stores, Opening Ceremony, brassent les métissages, les sweats tigres, les sarouels zébrés.

Une robe pour affirmer sur les podiums la richesse des échanges Sud-Sud et la réappropriation des tropes de l’orientalisme; une robe qui permet à Michelle Obama de dire en un clin d’œil de quel Japon elle rêve, alors que récemment encore la toute première candidate multiethnique du pays au concours Miss Univers (Ariana Miyamoto est née de mère japonaise et de père afro-américain) suscite le controverse sur les réseaux sociaux quant à son aptitude à correctement «représenter» l’Archipel.

Oui, à peine un pied sur le tarmac tokyoïte que déjà Michelle Obama ouvre à corps vêtu le débat sur la diversité et les identités. En matière d’efficacité diplomatique, c’est tout simplement saisissant, vous ne trouvez pas?

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