Un pari sur l’Iran
L’Iran accepte un contrôle international sur son programme nucléaire en échange d’une levée des sanctions onusiennes et occidentales qui frappent son économie. Tel est le principe de l’accord d’étape rendu public jeudi 2 avril à Lausanne. Le texte de la déclaration commune, d’ordre politique, est très succinct et il faudra encore au moins trois mois de négociation pour arriver à un accord en bonne et due forme. Mais le chemin accompli est déjà très significatif.
S’il aboutit, le processus impulsé principalement par Washington et Téhéran transformera les équilibres au Moyen-Orient. Libéré des sanctions, l’Iran pourra devenir une puissance économique équivalente à la Turquie, voire supérieure grâce à ses importantes réserves en hydrocarbures. Son influence régionale en sera renforcée. Ayant levé l’hypothèque de l’arme nucléaire, le pays redeviendra fréquentable par les puissances occidentales. Les États-Unis pourront plus facilement l’intégrer dans une nouvelle stratégie d’alliance au Moyen-Orient. Aujourd’hui, cette région est déchirée par des mouvements djihadistes et terroristes qui portent le danger jusqu’en Europe. Elle est en outre fragmentée par le clivage entre musulmans sunnites et chiites, que l’Arabie saoudite et l’Iran, pays voisins et rivaux, portent à incandescence. Jusqu’ici engagée dans une alliance encombrante avec Riyad, Washington retrouvera une plus grande marge de manœuvre si ses relations avec Téhéran s’améliorent.
Peut-on avoir confiance dans les Iraniens ? La question est cruciale pour les négociateurs. Téhéran a mené dans le passé des programmes nucléaires secrets. Certaines factions du régime poussent sans doute encore dans ce sens. Le très haut niveau de surveillance et de contrôle de ses installations exigé par les États-Unis – mais aussi par la France – vise à se prémunir au maximum contre un tel risque. Au-delà, le rapprochement en cours est un pari sur l’aspiration de la société iranienne à s’ouvrir au monde, sur la soif d’investissements étrangers des entreprises locales, et sur la volonté d’une partie de l’élite politique de s’affranchir d’une idéologie révolutionnaire qui s’est transformée depuis la chute du shah en 1979 en une gangue extrêmement conservatrice. La France, après avoir beaucoup hésité, semble prête à tenter ce pari.
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