Time To Shake Up Old Habits

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Temps de secouer ses vieux réflexes !

Entre le «rétablissement de liberté religieuse» et la réhabilitation du peloton d’exécution, je me dis souvent qu’il me faudrait un bandeau de reportages ou un surtitre de chroniques qui dirait «Ils sont tordus, ces Américains!». Ou, pour être plus généreux, «Toujours aussi incompréhensibles, nos voisins du Sud!».

Prenons la fameuse défense de la «liberté religieuse», comme si elle avait été récemment compromise. Ces dernières semaines, des élus conservateurs de l’Indiana, puis de l’Arkansas, ont adopté des lois qui ultimement pourraient permettre à des commerçants de refuser de servir des couples gais, parce qu’allant contre leurs convictions religieuses.

C’est de la discrimination pure et simple. Sauf que, comme l’avait maladroitement souligné un jeune Barack Obama en campagne présidentielle en 2008, bien des Américains «s’accrochent à leur arme ou leur religion… pour justifier leurs frustrations.»

PAS DE PIZZA POUR LES HOMOS

Ainsi, plutôt que d’admettre qu’une telle discrimination, en 2015, était inacceptable, les défenseurs de la loi ont aligné les dollars derrière leurs convictions et sont venus au secours du propriétaire d’une pizzeria qui avait spontanément avoué à un journaliste qu’effectivement, si on le lui demandait, il ne pourrait moralement pas offrir de services de traiteur lors d’un mariage de conjoints de même sexe.

De partout au pays, «Memories Pizza» s’est mis à recevoir de l’argent – dix dollars ici, cent dollars là – pour l’aider à faire face aux critiques et à l’éventuelle perte de clientèle dues à la douteuse franchise de son propriétaire. On en était rendu vendredi à 842 000 dollars, en soutien enthousiaste à une position, de nos jours, indéfendable. Curieux, tout de même!

PEINE DE MORT, PEINE MANQUÉE

Une autre «coutume» à laquelle je me fais difficilement, c’est le recours à la peine de mort. Il y a, là aussi, tout un débat moral que je ne veux surtout pas relancer. Mais concrètement, depuis des années, on multiplie les ratés: des drogues mortelles qui ne fonctionnent pas adéquatement; des condamnés qui au lieu de mourir geignent et se débattent devant des témoins horrifiés, etc.

La réaction? De la compassion, vous croyez? Une soudaine volonté de pardon? Pas du tout! On ramène plutôt le peloton d’exécution en Utah et dans le Wyoming où, en passant, la solution de rechange aux injections létales était la chambre à gaz. Mais comme on n’en a pas construit de nouvelle récemment et que, soyons francs, elles n’ont, depuis un certain régime allemand, pas tout à fait bonne presse, le peloton d’exécution reprend du service.

30 ANS GASPILLÉS

Étrange, ça aussi, qu’on tienne toujours à mettre à mort. Non pas que l’horreur de certains crimes ne donne pas parfois des envies de sauvages vengeances, mais les cas d’injustice, chaque fois, sont bouleversants. Vendredi, c’est l’histoire d’Anthony Hinson qui m’a donné à réfléchir.

L’homme a passé les trente dernières années de sa vie dans le couloir de la mort en Alabama pour deux meurtres qu’il jurait ne pas avoir commis. Des experts en balistique ont fini par lui donner raison, le revolver qu’il aurait supposément utilisé pour commettre ces meurtres ne pouvait pas être lié aux lieux des crimes et les deux meurtres eux-mêmes n’avaient rien à voir l’un avec l’autre.

Hinson a fait hier ses premiers pas d’homme libre depuis 1985. Trente années de perdues, mais il est tout de même vivant. Suffisant, non, pour exiger, sans mauvais jeu de mots, un «temps mort» dans les mises à mort?

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