Facing Beijing, the Washington-Tokyo Approach

<--

En s’alignant sur le premier ministre nationaliste nippon Shinzo Abe, Barack Obama brouille le message des Etats-Unis envers la Chine.

Barack Obama n’a-t-il pas retenu la leçon? La présence américaine dans le Pacifique – la priorité stratégique de la Maison-Blanche – ne peut reposer sur une logique d’exclusion de Pékin. Le poids économique de la Chine agit comme un aimant sur l’ensemble de la région. Lorsque Washington, récemment, a voulu contrer l’initiative chinoise d’une nouvelle banque asiatique du développement, ses alliés européens et asiatiques ne s’en sont pas laissé conter. Ils ont tous adhéré au projet. Sauf le Japon.

Un Japon qui s’est retrouvé cette semaine à l’honneur à Washington. Shinzo Abe était le premier chef de gouvernement nippon à s’exprimer devant le Congrès américain, 70 ans après Hiroshima et la capitulation. Dans un communiqué, les deux pays ont qualifié leur alliance de «pierre angulaire» de la paix et de la sécurité en Asie-Pacifique. Mais Obama est surtout obsédé par un objectif: signer au plus vite un traité de libre-échange transpacifique avec douze autres pays, qui représenterait 40% du PIB mondial. Le Japon, pourtant toujours aussi protectionniste, est la pièce maîtresse de cette construction. La Chine, elle, n’a pour l’heure pas été invitée.

Le président américain s’en est expliqué au Wall Street Journal: «Si nous n’écrivons pas les règles, la Chine écrira les règles dans cette région.» Le Partenariat transpacifique (TPP) devient ainsi, contrairement à ce qu’affirme Washington, un outil pour contenir la Chine. Face à la montée en puissance de l’armée chinoise et à ses revendications territoriales, il y a une logique, pour Washington, à vouloir renforcer ses liens avec les Etats limitrophes. Pour freiner toute forme d’aventurisme de la part de Pékin, un signal est nécessaire. Mais c’est une erreur de le faire en marginalisant la Chine sur le plan économique et commercial.

La Chine aspire à un rôle de leader régional. Mais, à ce stade, elle reste un bon élève de l’ordre économique mondial. Le plus sûr moyen d’éviter un conflit est d’accompagner son émergence économique tout en dénonçant ses dérives politiques. Il faut l’associer, et non pas l’exclure, à l’élaboration des règles du commerce, en constante évolution. Obama semblait l’avoir compris jusqu’au sommet de l’APEC l’automne dernier à Pékin. L’alignement sur le Japon de Shinzo Abe brouille le message.

Car c’est bien d’un alignement. Dans une Asie en mutation, le Japon reste crispé, incapable d’assumer son passé, comme l’a souligné Angela Merkel dans un exercice d’une rare franchise diplomatique lors d’un récent passage à Tokyo. Si l’Allemagne a pu réintégrer la communauté des nations après la catastrophe nazie, c’est parce qu’elle «a regardé son passé en face». Le message ne pouvait être plus clair dans un Japon où les dirigeants refusent des excuses en bonne et due forme pour leur militarisme passé. A Washington, Shinzo Abe s’est contenté d’exprimer des regrets. C’est insuffisant.

En reformulant un article de sa Constitution qui limitait, depuis la fin de la guerre, l’usage de sa force uniquement à des fins défensives, le Japon aspire à la «normalité». Les Etats-Unis ne trouvent rien à redire. Au contraire. Tout comme ils réaffirment leur soutien aux revendications de Tokyo sur les îles Senkaku dont la légitimité est fragile.

Pour être fermes face à leurs concurrents autoritaires, les Etats-Unis doivent être exigeants vis-à-vis de leurs alliés démocrates lorsqu’ils posent problème comme c’est le cas pour le Japon. C’est une question de crédibilité.

About this publication