A Single Move

<--

Le mépris. Il n’y a pas d’autre mot pour définir l’attitude du gouvernement américain à l’égard de ses alliés et notamment de la France. En espionnant pendant au moins six ans trois présidents français contre toutes les règles de bonne conduite entre pays amis, les Etats-Unis ont traité la France en nation infantile, dont les protestations n’ont pas plus d’importance que les criailleries d’un enfant malpoli. Non seulement ils ont tenu pour quantité négligeable les dirigeants successifs de la République, mais ils continuent à les narguer en laissant pointer leurs grandes oreilles sur le toit mal camouflé de l’ambassade américaine, dont les bâtiments impérieux se situent à quelque 50 mètres… de l’Elysée. Un peu comme un ami invité qu’on surprendrait à regarder dans la chambre à coucher à travers la serrure. Ils ont aussi confirmé que l’Amérique du voyeurisme, dans sa toute-puissance, est capable d’écouter n’importe qui à la surface du globe et que personne, citoyen ou Etat, partenaire ou adversaire, n’est à l’abri de cette curiosité orwellienne.

Le gouvernement français a opportunément haussé le ton. Qu’en restera-t-il ? Des promesses de meilleure conduite, de vagues explications qui n’engagent à rien. La France doit-elle s’en contenter, sous le prétexte qu’elle a aussi besoin des informations émanant de la NSA pour lutter contre le terrorisme ? Ce serait faire assaut de tartufferie. A un ami aussi, on peut dire son fait, au lieu de laisser s’installer un climat de défiance larvée. Il existe un moyen de marquer le coup. La bienfaisante lumière jetée sur les pratiques douteuses de la NSA provient d’un homme seul et courageux, qu’on pourchasse sans relâche depuis trois ans : Edward Snowden, traqué et menacé de la prison à vie pour avoir dit la vérité. La France se grandirait, en même temps qu’elle enverrait un message clair et utile à Washington, en accordant à ce lanceur d’alerte audacieux l’asile auquel il a droit. En un seul geste, elle sanctionnerait la mauvaise manière d’un allié condescendant en même temps qu’elle commencerait de regagner sa place de patrie des droits de l’homme.

About this publication