The Dangers of Populism

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Vendredi, devant 35 000 supporteurs entassés dans un stade de football de Mobile en Alabama, un annonceur a annoncé l’arrivée imminente de l’avion de Donald Trump, candidat à l’investiture républicaine et ultimement, à la présidence des États-Unis.

Quand le Boeing 757 noir, rouge et or marqué TRUMP, a survolé le stade, la foule l’a ovationné.

L’homme ou l’avion? L’histoire ne le dit pas.

Le mystère Trump

L’homme, c’est Donald Trump. Il ment comme on respire («la Bible est mon livre préféré»), tient des propos répréhensibles sur les femmes (de grosses truies), sur les immigrants, légaux ou non, sur Barack Obama qu’il accuse d’être trop mou envers les manifestants (noirs) contre la brutalité policière parce qu’il est lui-même noir. Trump le croit musulman.

Il n’y a pas de quoi s’inquiéter quand de tels propos sortent de la bouche d’un compagnon de bar. Mais quand le type rêve de la présidence américaine avec des milliards en poche, et 24 % d’appuis chez les électeurs républicains, il faut se questionner.

Comment se fait-il que des centaines de milliers de citoyens du pays le plus avancé au monde, dont plusieurs sont diplômés d’universités prestigieuses, en sont rendus à faire confiance à ce vendeur d’huile de serpent aux cheveux orange?

Il a beau plaire à l’Américain moyen du sud des États-Unis découragé par l’impossibilité à ce jour d’endiguer l’immigration illégale venant du Mexique, par la rectitude politique et par la partisanerie des médias, ce ne sont pas les défis les plus graves auxquels les États-Unis font face en 2015. Mais ce sont les plus émotifs. Attention! Piton sensible.

Nous vivons à l’ère de l’émotion. Ressentir, dit-on, est plus important qu’analyser, réfléchir, pondérer. Ressentir, c’est plus authentique. On le sent au creux de l’estomac. Tout dans les tripes, rien dans la tête. Il faudrait recommencer à réfléchir.

Ou refaire les bulletins de vote pour qu’ils disent: «Quel candidat vous fait sentir le mieux?»

Catastrophe et fin du monde

Depuis 25 ans, j’écorche les oreilles de mes proches avec mes prédictions apocalyptiques sur les conséquences d’un désintérêt généralisé croissant de la politique et de la chose publique.

Quand les citoyens s’intéressent de moins en moins à la vie civique, il faut s’attendre à ce que les choses «empironnent». La corruption se répand comme de la lave, la politique attire des loups affamés plutôt que des gens qui ont leur pays à cœur. L’univers ayant horreur du vide, extrémistes et fanatiques s’immiscent dans l’arène politique. Bref, la solidité et la qualité du tissu démocratique s’effilochent tranquillement.

Jusqu’au jour où débarque un messie populiste comme Donald Trump, porteurs de solutions simplistes (un mur entre le Mexique et les États-Unis), de slogans vides (Make America great again) et d’assez de bling-bling pour se rendre intéressant (un survol de ses supporteurs en jet privé).

Des politologues américains commencent à changer d’avis: Trump pourrait remporter l’investiture républicaine. Mais si ce n’est pas lui cette fois, un jour ce sera un autre, plus tonitruant, plus polarisant. Plus riche et plus dénué de morale.

En période de crise et d’apathie, cynisme et populisme deviennent des terreaux fertiles pour de la graine de démocratie, version autoritaire.

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