La production de brut excède aujourd’hui largement la demande mondiale, à cause de la guerre de marché que se livrent l’Amérique et les pays du Golfe. Les stocks se remplissent, les prix chutent… et la crise guette.
Les placards universitaires regorgent de débats sur l’évolution du prix du pétrole. Les controverses y sont nombreuses. Mais personne ne conteste cette évidence centrale : fer, cuivre, poivre, caoutchouc, coton, charbon, fret maritime, nickel, déchets… les matières premières sont le miroir du monde. A 37 dollars le baril (au 1er janvier 2016), le cours du pétrole illustre à merveille ce précepte.
Certes, il y a dans ce miroir du monde du pétrole des automobilistes qui se réjouissent de faire un plein d’essence ou de gazole à moindre frais. Il y a des ménages qui gagnent en pouvoir d’achat, des balances commerciales de pays non producteurs de pétrole qui retrouvent des couleurs. Ou encore des compagnies aériennes qui misent sur une meilleure rentabilité financière. Et pour cause : le baril est tombé si bas en ce début d’année qu’il est désormais en dessous du point bas de 2008, quelques mois après l’explosion de la bulle financière des subprimes aux Etats-Unis.
Parmi les raisons de cette longue glissade, il y a l’ogre chinois dont l’appétit en matières premières en général, et en pétrole en particulier, n’est plus tout à fait ce qu’il était lorsque l’économie avançait au rythme de 9 ou 10% l’an. Sa baisse de vitesse de croisière économique, à moins de 7% en 2015, explique pour partie une situation de surproduction pétrolière mondiale évaluée, selon la plupart des instituts spécialisés, à près de 2 millions de barils. Et dans le jeu de l’offre et de la demande, une offre excédentaire ne manque pas de jouer comme une force de rappel qui tire les prix vers le bas.
La faute à la Chine donc, qui a moins besoin de carburant pour faire tourner ses usines… mais pas seulement. La faute aussi aux pétroles non conventionnels produits en Amérique du Nord, le pétrole de schiste aux Etats-Unis et les sables bitumineux au Canada. Washington, qui s’est engouffré dans la prospection-production de pétrole de schiste, a décroché la première place de producteur mondial de pétrole en tout genre. Mais à moins de 40 dollars le baril, sa stratégie n’est plus gagnante. A ce niveau de prix, les puits américains de pétrole de schiste ferment les robinets pendant que les banques qui ont financé de tels projets enregistrent des pertes liées à l’absence de rentabilité de ce qui devait être une martingale pétrolière.
Mauvais œil
Mais pour comprendre les raisons de ces fermetures de puits outre-atlantique, il faut porter le regard du côté de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). Voilà des années que ces derniers voient d’un très mauvais œil cette nouvelle montée en puissance des Etats-Unis. Leur riposte ? Ne rien faire. Ou plutôt ne surtout pas ajuster leur offre de pétrole en fonction de la demande mondiale. Une inertie calculée qui met à mal la stratégie des Etats-Unis. L’Arabie Saoudite est sans conteste le chef de file de cette guerre larvée. Lors de ses dernières réunions, l’Opep s’est ainsi abstenue d’annoncer un plafond chiffré de sa production. Une première. Qui n’a fait que tirer un peu plus vers le bas le prix de l’or noir, les marchés financiers étant de plus en plus convaincus que l’Arabie Saoudite n’était pas prête à s’ajuster.
Bien sûr, la monarchie pétrolière a de quoi tenir. Ces terres sont encore pleines d’un pétrole dont le coût d’extraction est sans doute l’un des moins élevés au monde. Mais sa stratégie pourrait se révéler périlleuse (lire page 4). Les cours du brut, dont le royaume tire plus de 90% de ses revenus publics, ont baissé de plus de 60% depuis la mi-2014 et sont donc tombés à 37 dollars le baril, un plus bas depuis onze ans. Résultat ? L’Arabie Saoudite a enregistré cette année un déficit budgétaire record de 89,2 milliards d’euros, soit 15% du PIB du pays. Le royaume, qui produit 10,4 millions de barils de pétrole brut par jour, a puisé dans ses réserves en devises et émis des bonds du Trésor pour financer son déficit. Fin octobre, ces réserves ont fondu à 644 milliards de dollars, contre 732 milliards de dollars fin 2014.
Cette année-là, le pays avait déjà accusé un déficit budgétaire de 17,5 milliards de dollars, le deuxième depuis 2002. Le FMI lui avait alors recommandé, ainsi qu’aux monarchies pétrolières du Golfe, de réduire ses dépenses, de tailler dans ses subventions et de diversifier son économie. Avec le risque de provoquer une belle pagaille sociale dans des pays où les dépenses sociales sont relativement importantes.
Pour l’instant, le royaume saoudien tient malgré tout. D’autres ne peuvent pas en dire autant. C’est bien sûr le cas du Venezuela, proche de la faillite tant la bonne marche économique et sociale du pays dépend du pétrole (sa part dans les exportations dépasse les 80%). C’est aussi le cas de l’Equateur et, dans une moindre mesure, du Brésil. La Russie, dont les hydrocarbures représentent 70 % des exportations et un bon quart du PIB, est elle aussi contrainte de se serrer la ceinture (lire page 5)
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Grand échiquier
Et c’est sans compter, du moins pour l’instant, sur la grande inconnue que représente l’Iran quant à l’avenir des cours de l’or noir. La république islamique devrait se retrouver très prochainement sur le grand échiquier du marché pétrolier mondial. Simple question de temps. Lorsque sonnera l’heure de son retour plein et entier, alors le monde pourra se retrouver avec un surplus d’environ un million de barils par jour. Pas de quoi requinquer les prix. Ni inverser le moral dans les salles de marché.
Pour les traders, les risques, qui nourrissent les plus folles des spéculations, ne cessent de grossir. Le dernier avertissement en date ? Il y a une semaine, la nouvelle d’une forte hausse des stocks américains de pétrole : 500 millions de barils, qui se fondent dans les 3 milliards de baril de réserve que comptent les pays de l’OCDE. C’est aussi ainsi que se prend le pouls de la mondialisation.
Europe MUST continue subsidizing green energy, which isn’t subject to manipulation by cartels. As time goes by, no major world player will need to suck up to Iran, Saudis, etc politically or economically. The MidEast can continue its Islamist-fueled drive into chaos.