American Presidential Election: Agony for the Republican Party?

<--

Présidentielle américaine : l’agonie du Parti républicain ?

Les candidats anti-système ont volé la primaire du Grand Old Party. La droite américaine n’a plus qu’un espoir : toucher le fond pour se réinventer.

Si les pontes du Parti républicain pouvaient donner une consigne de vote aux électeurs de l’Iowa, ce serait « ne votez pour aucun des deux candidats en tête des sondages ». À un jour du scrutin, le Grand Old Party (GOP) est en pleine crise. Il y a un an, comme dans toutes les primaires, il avait concocté un scénario bien réglé : Jeb Bush, fier de son nom, de son réseau et de son expérience, devait remporter haut la main l’investiture. Oui, mais voilà, l’électeur républicain en a ras le bol des hommes de l’establishment qui lui promettent monts et merveilles et finalement ne font pas grand-chose pour lui une fois élus. Il a jeté son dévolu cette année sur des candidats anti-système, qui militent pour un changement radical, Donald Trump le promoteur immobilier new-yorkais qui promet de construire un mur à la frontière et de renvoyer tous les Mexicains chez eux et le sénateur Ted Cruz, un idéologue psychorigide qui a réussi à faire l’unanimité contre lui au Sénat par ses positions extrémistes et préférerait brûler le Capitole plutôt que d’accepter un compromis politique.

Des promesses irréalisables

Le parti paye là lourdement ses erreurs passées. « Le Parti républicain a créé Donald Trump parce qu’il a fait beaucoup de promesses à ses supporteurs qu’il n’a jamais tenues », estime Erick Erickson, un blogueur de droite. Il leur a vendu « un petit État utopique, politiquement impraticable parce que ça aurait demandé des changements déchirants que la plupart des Américains ne voulaient pas. Il a dénoncé des décennies de changements, promettant l’équivalent d’un retour au gouvernement et à l’économie des années 1890, à une norme culturelle des années 50 et à une composition raciale des années 40 », écrit E. J Dionne, auteur d’un nouveau livre, Pourquoi la droite a tout fait de travers.

Ces dernières années, le parti a surtout promis, après ses victoires électorales aux législatives, de mettre Barack Obama à genoux et de défaire toutes ses réformes avant, une fois de plus, de céder à la réalité et d’accepter des compromis. Ce qui a exaspéré sa base et a conduit à une radicalisation toujours plus grande. Le nombre de républicains qui se considèrent comme « très conservateurs » a presque doublé entre 1995 et 2015, de 19 à 33 %.

Contre Trump, une offensive en ordre dispersé

Aujourd’hui, le GOP se retrouve tiraillé entre diverses factions hostiles. Cela l’a empêché jusqu’ici de se coaliser pour les primaires derrière un candidat plus « acceptable » qui aurait pu s’opposer à Donald Trump. Il n’a même pas été capable de lancer une campagne négative attaquant ses points faibles. Exaspérées par cette inertie, certaines voix ont commencé ces dernières semaines à s’élever. Le magazine National Review a publié 22 essais de conservateurs qui s’opposent à l’investiture de Trump s’il gagne les primaires. « Trump est un opportuniste politique qui n’a aucune conviction philosophique et va démolir le vaste consensus idéologique conservateur à l’intérieur du parti en faveur d’un populisme. »

Plusieurs groupes ont lancé en même temps une modeste attaque sur les ondes. L’un des spots télé l’accuse d’exagérer sa fortune, rappelle qu’il a été plusieurs fois en dépôt de bilan, qu’il a beaucoup employé des immigrés et qu’il a déclaré lors d’un débat que les salaires américains étaient trop hauts pour créer des emplois… « C’est le vrai bilan de Trump : se battre pour ses intérêts, pas pour les nôtres », conclut le spot. Ted Cruz en a lancé un autre qui raconte comment Trump a fait saisir par la justice la propriété d’une femme car il voulait construire un garage pour son casino, ce qui montre ses méthodes sans pitié.

Un candidat plus malléable

Mais de plus en plus d’huiles au sein du parti, comme Bob Dole, ex-candidat aux présidentielles, ou le gouverneur de l’Iowa, semblent être résignées à faire allégeance au magnat de l’immobilier. Il y a 8 mois, le Wall Street Journal écrivait : « Si Donald Trump devient la voix des conservateurs, le conservatisme va imploser avec lui. » Mais, récemment, il a changé son fusil d’épaule : « Donald Trump est bien mieux que ce que nous avions imaginé et il devient un meilleur candidat. » En fait, derrière tout cela se cache un simple calcul politique. « L’establishment » pense que Trump est plus malléable que Cruz et pourra se laisser contrôler. Un pari risqué, car le promoteur new-yorkais est imprévisible et personne ne sait quelle politique il va réellement appliquer s’il est élu. Il a promis de rétablir des mesures protectionnistes, de ne pas faire de coupes claires dans l’assurance santé publique et ne parle pas de réduire les dépenses… ce qui va à l’encontre du catéchisme conservateur.

Refondation

Quel que soit le résultat de l’élection, le parti se retrouve plongé dans une crise d’identité profonde. En effet, même si Trump perd la primaire, sa rhétorique incendiaire fait un mal fou, accentuant l’image raciste des républicains à un moment où le parti a plus que jamais besoin du soutien des latinos pour gagner la Maison-Blanche. Beaucoup vont jusqu’à prédire l’implosion du parti. D’autres, plus optimistes, estiment que cela va le mener à une salutaire introspection et une refondation. En 1964, le très conservateur Barry Goldwater a remporté la primaire avant de se faire éreinter aux élections face à Lyndon Johnson. Cela a obligé les extrêmes à rentrer dans le rang et permis aux leaders de reprendre le contrôle et de nommer Richard Nixon en 1968. En attendant, Bill Kristol, le patron de The Weekly Standard, a demandé à ses fans sur Twitter de l’aider à trouver « le nom du nouveau parti qu(« ils devraient) lancer si Trump gagne l’investiture ».

About this publication