Donald Trump and the Japan Tractor Rhetoric

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S’il y a bien un pays où Donald Trump ne fait plus du tout rire, c’est le Japon. La rhétorique isolationniste du probable candidat à la Maison Blanche s’appuie sur la diabolisation sans vergogne d’un certain nombre de pays, parmi lesquels l’Archipel. Le magnat de l’immobilier accuse Tokyo (comme Pékin d’ailleurs) de manipuler sa monnaie afin de livrer une concurrence déloyale aux entreprises américaines et de prendre ainsi l’avantage sur l’échiquier du commerce transpacifique.

Donald Trump illustrait son propos au terme du récent Super Tuesday, avec la délicatesse dont il a le secret. Après s’être désolé du fait qu’un de ses amis avait décidé d’acheter des machines de chantier du Japonais Komatsu plutôt que de l’Américain Caterpillar, il a ajouté que, lui élu, il s’assurerait que seules des pelleteuses made in USA soient utilisées dans l’érection du vaste mur qu’il souhaite dresser sur la frontière mexicaine. Tout un symbole.

C’est un fait: Tokyo affaiblit le yen pour tenter de relancer son économie. Mais les récentes remarques de Donald Trump virent à la caricature passéiste, réminiscences d’un Japon des années 1980 que l’on considérait comme un rival crédible des Etats-Unis. Depuis, avec deux décennies de croissance quasi nulle, le Pays du Soleil Levant fait plutôt figure d’outsider surdimensionné. Surtout, dans une économie globalisée, les frontières sont d’être aussi claires. La ville de Peoria, quartier général de Caterpillar où Trump tenait récemment tribune, abrite aussi une usine Komatsu.

Cette tendance au «Japan bashing» n’est pas seulement anachronique, elle est aussi historiquement mal informée. Donald Trump accuse le Japon de profiter de la protection militaire américaine. La réalité est assez différente: à de multiples reprises (Guerre Froide, «containement» de la Chine), le Japon a joué le rôle de poste avancé pour le pouvoir américain, en termes d’idéologie autant que de projection stratégique.

L’alliance nippo-américaine possède de nombreux biais. Mais il faut lui reconnaître l’avantage de la longévité (70 ans!) et du maintien du statu quo dans la région asiatique, par ailleurs de plus en plus polarisée. Si Donald Trump venait à être élu et s’il remettait en cause les bases de cette alliance, l’Archipel pourrait être tenté d’accélérer drastiquement sa militarisation, davantage esseulé face à une Chine très chatouilleuse sur la question du réarmement japonais. Cette spirale plongerait dans l’instabilité toute la zone Asie-Pacifique, vitale à l’économie mondiale.

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