Loser Takes All

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Bernie Sanders, président des États-Unis ?

Soyons honnêtes, rares sont ceux qui pensaient vraiment, lorsqu’il s’est lancé dans la course à la Maison-Blanche, qu’il pourrait tenir tête à Hillary Clinton et à sa redoutable machine politique.

Ce septuagénaire, qui se décrit lui-même comme un démocrate socialiste, était plus souvent perçu comme un candidat marginal que comme un prétendant sérieux.

Pourtant, au fil des mois – et c’est tout à son honneur – Bernie Sanders a su prouver que sa candidature est loin d’être frivole. Et que ses idées progressistes suscitent un réel enthousiasme chez bon nombre d’électeurs du Parti démocrate. Particulièrement chez les jeunes.

Sa victoire mardi lors des primaires du Wisconsin (par une marge de 14 points de pourcentage : 57 contre 43 %) en fait la preuve une fois de plus. Son élan est indéniable. Incluant cet État du Midwest, il a triomphé dans six des sept plus récentes étapes de la course à la direction du Parti démocrate.

Ses chances de remporter l’investiture demeurent cependant extrêmement faibles. L’avance d’Hillary Clinton, alors qu’il reste des primaires et des caucus dans 18 États, semble insurmontable.

Actuellement, la candidate peut compter sur l’appui de 1271 délégués, contre 1026 pour Sanders. Si on y ajoute les superdélégués – en général des membres de l’establishment du parti qui ont presque tous promis de soutenir l’ancienne secrétaire d’État – elle atteint le chiffre enviable de 1728. Il faut 2383 délégués pour l’emporter.

En somme, si la tendance se maintient, Hillary triomphera. Mais même si Bernie Sanders perd, il aura gagné, en partie, son pari.

Les convictions politiques d’Hillary Clinton, sur le plan idéologique, soulèvent des doutes depuis longtemps chez certains électeurs démocrates. Depuis, en fait, la présidence de son mari. Bill Clinton a gouverné au centre de l’échiquier politique bien plus qu’à gauche. Pour être élu président à deux reprises, il a d’ailleurs emprunté des idées aux républicains.

Mais Hillary Clinton, dorénavant, est pour sa part résolument progressiste. Elle louange les réalisations de Barack Obama et s’inspire de l’agenda de Bernie Sanders. « Ce sont nos mots », s’est d’ailleurs exclamé ce dernier, il y a quelques semaines, lorsqu’il a entendu sa rivale adopter un ton très ferme vis-à-vis de Wall Street. « On ne doit plus jamais permettre à Wall Street de menacer Main Street. Et une banque ne doit pas être trop grosse pour faire faillite », avait-elle affirmé.

On peut aussi alléguer que sans le sénateur du Vermont dans le portrait, Hillary Clinton n’aurait peut-être pas été aussi prompte, entre autres, à soutenir l’idée d’un salaire minimum à 15 $, à se préoccuper du sort des étudiants endettés ou à promettre des changements majeurs en matière de financement électoral.

C’est un peu comme si David, faute d’avoir pu terrasser Goliath, l’avait néanmoins persuadé de se ranger dans son camp…

Même si Bernie Sanders n’avait pas été dans la course, Hillary Clinton n’aurait probablement pas renié l’héritage progressiste de Barack Obama. Mais l’influence du sénateur du Vermont a été telle que si la candidate devient présidente en janvier prochain, elle n’osera même pas le diluer, cet héritage.

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