Une fois encore, la grande Amérique défraie la chronique.
Les exécutions sommaires en ce mois de juillet d’Africains-Américains par des policiers blancs n’ont rien de glorieux. N’en déplaise à ceux qui sont capables de lire dans les pensées de ces policiers à la gâchette facile, ils sont racistes. Cette chasse au gibier noir montre à quel point l’Amérique ne guérit pas de son mal le plus profond : le racisme. N’est-ce pas dans ce pays qu’un candidat à la prochaine élection présidentielle crache publiquement sa xénophobie et que des foules entières applaudissent ?
Quand j’étais adolescent, j’adorais les westerns. Je suivais avec une grande jubilation les exploits de ces Visages-Pâles qui tuaient des Apaches comme l’on tue des mouches. J’admirais le plus fort, celui qui dégainait avec la rapidité de l’éclair, qui se sortait des situations les plus compliquées pour ne laisser aucune âme en vie. Je percevais les cow-boys comme des hommes bons qui débarrassaient l’humanité des méchants. C’est-à-dire les Peaux-Rouges et ceux dont les visages étaient tout sauf pâles.
Je ne m’étais jamais demandé, à cette époque-là, pourquoi, dans ces westerns, les Noirs avaient toujours des rôles de domestiques ou d’idiots. Pourtant, ces films véhiculaient une idéologie : la suprématie de l’homme blanc. Et une évidence : la raison se trouve au bout du canon.
Adolescent, j’ai appris que les Africains-Américains se battaient pour leurs droits civiques, leur dignité humaine. Privés du droit de vote, il leur était même interdit d’accéder à de nombreux lieux publics, au même titre que les chiens. Dans les transports en commun, ils étaient obligés de s’asseoir à l’arrière des bus et de céder leur siège à tout passager blanc en cas d’affluence.
J’ai appris que le Ku Klux Klan, organisation criminelle prônant la suprématie blanche, lynchait et pendait des nègres en toute impunité. Je n’avais que 13 ans lorsque le pasteur Martin Luther King, Jr., leader non violent du mouvement des droits civiques, fut assassiné par un Blanc. Il était devenu la cible numéro un du chef de la CIA. Qu’est-ce qu’on lui reprochait ? Le fait de se battre pour être reconnu comme un homme à part entière.
Si l’Amérique blanche était juste envers sa communauté africaine-américaine, pourquoi James Brown aurait-il chanté « I’m Black and I’m Proud » ? Pourquoi le poète Langston Hughes aurait-il écrit « Moi aussi, je suis l’Amérique » ? Et James Baldwin « La prochaine fois, le feu » ? Tout cela a marqué ma jeunesse au XXe siècle et m’a permis de comprendre « la question noire » aux États-Unis.
J’ai souvent entendu des donneurs de leçons affirmer que « les Noirs exagèrent », qu’« ils ont la victimisation facile ». Peut-être. Mais ceux que la police ne cesse de tuer représentaient-ils une menace pour l’ordre public ? Étaient-ils armés ? Le petit Tamir Rice, 12 ans, qui jouait avec un pistolet factice, représentait-il un danger pour le policier blanc qui l’a tué ? N’est-il pas curieux de voir que, depuis des années, les jurés qui se prononcent sur ces affaires sont des Blancs qui blanchissent les présumés coupables ? Selon un dicton de chez moi, un cancrelat n’aura jamais raison au tribunal des poules. Heureusement pour l’humanité, tous les Américains blancs ne sont pas racistes.
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