Brexit. Trump. L’actualité récente nous rappelle que nos collectivités doivent parfois composer, d’urgence et en catastrophe, avec des menaces importantes qui exigent une réponse immédiate.
Dans le cas du Brexit, le monde s’est réveillé avec une gueule de bois. Trop tard.
L’avenir nous dira ce qui adviendra en ce qui a trait aux élections américaines. Trump ? Il est minuit moins une. Discours, chroniques, publicités, manifestations. Votes, souhaitons-le. Tout est mis en oeuvre, avec raison, par nombre d’Américains afin d’échapper à l’élection du milliardaire.
Il s’agit là, toutefois, d’une façon insatisfaisante de traiter nos enjeux de société. Les États-Unis sont présentement l’étudiant universitaire qui achève un travail de session en une nuit blanche.
L’auteur Stephen R. Covey nous enseigne que le bien-être personnel est tributaire d’une gestion ordonnée de nos activités en fonction de deux variables : leur urgence et leur importance. Les situations urgentes sont généralement visibles et suscitent une attention immédiate. On exerce donc une activité urgente en réaction à une situation pressante. Les activités importantes, elles, contribuent à notre mission personnelle, à nos valeurs et à nos priorités.
Urgent et important : réparer un dégât d’eau dans sa résidence. Non urgent et important : maintenir une saine nutrition. Urgent et non important : répondre à certains de nos messages textes. Surtout quand la petite lumière rouge clignote. Non urgent et non important : regarder Netflix.
La démagogie n’est pas une fatalité
Les principes enseignés par Covey en contexte de vie individuelle sont en tous points applicables pour une société. Les États-Unis sont aujourd’hui aux prises avec les effets d’avoir négligé une activité importante et non urgente, qui sans aucun doute aurait éloigné tout clown du pouvoir : investir radicalement dans une éducation de qualité pour tous.
Certains attribueront la popularité d’un Trump aux effets pervers du néolibéralisme. Un tel constat a certainement du mérite, mais nous laisse sur notre appétit puisqu’il propose comme une fatalité l’émergence de la démagogie. Dans une société saine, Donald Trump ne devrait pas être la solution de rechange au rejet du projet collectif proposé par les élites et nos institutions. Non.
Une éducation de qualité pour tous favorise le développement de la pensée critique nécessaire pour juger de la qualité d’un projet de société et mettre en question le bien-fondé des idées proposées par nos leaders. C’est cette éducation qui développe chez l’individu les habiletés non cognitives, dont l’empathie, qui évitent de céder à la tentation de la haine et de la peur de l’autre. C’est cette éducation qui incite à participer à la chose publique. En bref, c’est elle qui permet la véritable démocratie. Le pouvoir du peuple. Les dictateurs détestent les penseurs, n’est-ce pas ?
Le défaut d’éducation laisse place à la démagogie. Ce défaut permet à une poignée d’individus d’influencer les masses, tantôt en utilisant des contrefaçons de vérité, tantôt en faisant appel à une rhétorique qui attise les craintes et frustrations.
Une éducation de qualité pour tous
Selon le sondage CNN/ORC paru lundi soir, 60 % des Américains détenant un diplôme d’études postsecondaires auraient l’intention de voter pour Hillary Clinton, et 36 % pour Donald Trump. Chez les électeurs ne détenant pas de diplôme d’études postsecondaires, l’écart fond à 49 %-46 %. Auprès des électeurs de race blanche ne détenant pas de diplôme d’études postsecondaires, les intentions de vote s’élèvent à 60 % pour Trump et chutent à 34 % pour Clinton !
Le Québec n’est pas à l’abri du risque non plus. Faut-il rappeler qu’à une époque pas si lointaine notre Belle Province a flirté avec l’idée d’une charte des valeurs inspirée d’une contrefaçon de la notion de laïcité de l’État ? Dans un tout autre ordre d’idées, sans attribuer à Mike Ward le machiavélisme de Donald Trump, force est de constater que le même mécanisme a opéré dans son cas : c’est au nom d’une liberté d’expression qui tourne les coins rond que l’humoriste a récolté 25 000 $ en 24 heures dans le cadre d’une campagne de sociofinancement.
Nos choix collectifs seraient beaucoup plus réfléchis si tous avaient accès à une éducation de qualité. De la participation citoyenne à l’élimination des préjugés, tout passe par une éducation de qualité pour tous. Une Éducation avec un grand « E », dirais-je. Celle-ci requiert des choix difficiles et complexes qui impliquent notamment les établissements scolaires, bien sûr, mais qui appellent aussi à la contribution de l’ensemble de la société. Or, l’Éducation pour tous n’étant pas urgente, la société procrastine, et nous sommes à risque d’en subir les contrecoups.
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