Au tout début, j’avoue que c’était divertissant. Puis, c’est devenu effrayant. C’est aujourd’hui carrément pitoyable. Je vous parle des frasques de Donald Trump. Ses récents propos sur le couple Khan viennent peut-être de lui retirer ses chances de remporter l’élection de novembre prochain. En tout cas, d’ici là, il aura mille occasions de se racheter. Ou de s’enliser davantage.
Récapitulation : invité à prendre la parole lors de la convention démocrate, la semaine dernière, Khizr Khan, citoyen américain d’origine pakistanaise et de confession musulmane, a critiqué Trump en demandant si le candidat républicain avait déjà sacrifié quelque chose au cours de sa vie. Khan a dit cela en compagnie de sa femme, Ghazala, qui a choisi de demeurer silencieuse.
Évidemment, Trump s’est empressé de répliquer au cours du week-end lors d’une entrevue à ABC, puis sur Twitter lundi. « M. Khan, qui ne me connaît pas, m’a attaqué vicieusement depuis l’estrade du Parti démocrate et continue maintenant à le faire partout à la télé – Sympa ! », a publié Donald Trump (le New York Times nous a appris hier que Donald Trump a obtenu à cinq reprises des exemptions pour ne pas participer à la guerre du Viêtnam en 1968 – une pour des problèmes orthopédiques et quatre pour des motifs liés à ses études). Trump a aussi mis en question le silence de Mme Khan, laissant entendre que son mari l’avait fait taire.
Ces commentaires du candidat auraient pu demeurer anodins si ça n’avait été d’un détail : le fils du couple Khan, le capitaine Humayun Khan, a été tué en Irak en 2004 dans l’explosion d’une bombe. Trump a totalement sous-estimé l’immense respect qu’ont les Américains à l’égard des vétérans et de leur famille. Tu ne touches pas aux vétérans. Point.
Trump, le roi des attaques basses et mesquines, qui dit que Bette Midler est laide, qu’Hillary Clinton est le diable et que les Mexicains « sont des meurtriers et des violeurs », a raté une superbe occasion de se taire. Depuis, il est la cible de nombreuses critiques, y compris celles de collègues républicains.
Ce énième dérapage de Trump nous en dit long sur l’utilisation des réseaux sociaux par les politiciens. Il faut se le dire, ils sont rares, ceux qui en font un bon usage. Ou bien tu publies des phrases creuses qui n’intéressent personne, ou bien tu profères une insanité qui te met dans la chnoute. Trump est plus souvent qu’à son tour dans la chnoute.
Depuis des mois, les experts en réseaux sociaux analysent l’exploitation que fait Trump de Twitter, sa manière de maximiser les 140 caractères et, surtout, sa façon de s’en servir comme une arme. Car pour Trump, les réseaux sociaux servent surtout à cela : attaquer, mettre K.-O. les adversaires par des insultes et des commentaires dégradants.
Quand tu diriges un parti ou même un pays, tu ne dois pas être une poupée mécanique, ni une marionnette. Mais tu dois quand même être à l’écoute des sages qui t’entourent. Pour le moment, Donald Trump ressemble à une voiturette téléguidée qui a perdu contact avec la boîte de contrôle et qui zigzague sous les pattes de la table de cuisine.
Vous imaginez le stress des dirigeants de la CIA ? En effet, comme le veut la tradition, des membres du renseignement américain devront bientôt rencontrer les principaux candidats engagés dans la course pour faire le point sur les opérations militaires et les grands dossiers de politique internationale. Selon plusieurs sources, les dirigeants de la CIA craignent de partager cette information avec celui qui est venu au monde sans filtre. Je parie que lors de la rencontre avec Trump, chaque mot sera choisi avec une grande minutie.
Mais ce qui est le plus renversant avec la présence de Donald Trump au coeur de cette élection, c’est la perte grandissante du respect à l’égard de cette institution qu’est la politique. Donald Trump, un être vulgaire, méchant, ignorant, qui mène une campagne basée sur la peur et la menace qui pèserait sur la survie de la blanchitude américaine, a réussi à devenir l’un des deux principaux candidats à la Maison-Blanche. C’est tout de même incroyable. Les citoyens américains sont-ils à ce point mélangés et désabusés qu’ils n’arrivent plus à choisir des candidats de qualité pour gouverner leur pays ?
Malgré tout cela, je continue de faire confiance aux Américains et de me dire qu’au moment décisif, ils ne choisiront pas Donald Trump. Je fais aussi confiance au principal concerné pour « s’autopeluredebananiser ». Hier, sur Twitter, Donald Trump a publié une photo de lui devant un baril de poulet PFK. Alors que le bon vieux colonel Sanders nous a répété toute sa vie que son poulet devait se manger simplement, car il était « bon à s’en lécher les doigts », le milliardaire attaque une poitrine enrobée de la fameuse « recette secrète » avec une fourchette et un couteau.
Celui qui se targue d’être la voix des gens ordinaires a été la cible de nombreuses critiques de citoyens. « Manger du poulet PFK avec des ustensiles dans son jet privé, ce n’est pas être près du peuple », ont écrit certains.
Et si, à une centaine de jours de l’élection, les « gens ordinaires » commençaient à comprendre que celui qui ne respecte pas la mémoire d’un capitaine de l’armée (ni les souhaits d’un colonel) n’était pas l’homme qu’il faut à la Maison-Blanche ?
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