A priori, c’est plié. Dans moins de cent jours, Hillary Clinton sera choisie par les Américains pour devenir le quarante-cinquième président des Etats-Unis, et sa première présidente. Il serait pourtant hasardeux d’affirmer que la candidate démocrate va gagner les élections du 8 novembre. C’est plutôt son rival, Donald Trump, qui va les perdre, tout comme Nicolas Sarkozy avait perdu en France en 2012.
Depuis la convention de Cleveland, où il avait réussi à préserver l’unité du Parti républicain, Trump semble descendre chaque jour, voire chaque heure, une marche des escaliers de l’enfer . C’est le sauve-qui-peut dans les rangs de son propre parti. Une candidature dissidente émerge. Des élus dans les Etats où se jouera l’élection, un député, une influente sénatrice, un ex-patron de la CIA, d’anciens ministres ont annoncé haut et fort qu’ils ne voteraient pas pour lui.
Nombre de donateurs d’autres candidats de la primaire républicaine préfèrent désormais donner leur argent au camp d’en face. Son programme économique est jugé décevant, son programme diplomatique, inquiétant.
Ses propos à l’emporte-pièce sur les enfants ou les vétérans lui aliènent des millions d’électeurs. Les photos et les mensonges de sa femme n’arrangent rien. Les sondages plongent. A côté, la pitoyable campagne du candidat républicain Bob Dole face à un autre Clinton, il y a vingt ans, paraîtrait presque exemplaire.
A priori, donc, c’est plié. Bien sûr, la campagne risque d’être nauséabonde dans les prochaines semaines et d’autres histoires pourraient encore sortir sur Hillary Clinton. Bien sûr, les démocrates Jimmy Carter en 1980 et Al Gore en 2000 ont perdu les élections en novembre alors qu’ils menaient dans les sondages en août. Mais Donald Trump n’est pas Ronald Reagan ni même George W. Bush.
C’est plié… sauf si l’extravagant candidat républicain parvenait en réalité à toucher l’électorat américain beaucoup plus profondément que ne l’analysent tous les experts, les sondeurs, les politologues. Trump joue non seulement le repli contre l’ouverture, mais aussi à fond le peuple contre les élites. Ces élites qui sont honnies partout aux Etats-Unis hors de Washington, qui n’ont pas su ramener la prospérité au plus grand nombre, qui ont laissé se creuser des inégalités colossales, qui n’ont pas puni les fautifs de la crise financière de 2008.
C’est le ressort qui a fait basculer le référendum sur le Brexit en juin dernier. C’est le ressort que tentera d’actionner Marine Le Pen l’an prochain. A priori, les élections américaines sont pliées, sauf si le fossé entre gouvernants et gouvernés se révèle beaucoup plus profond que nous ne le croyons.
Leave a Reply
You must be logged in to post a comment.