Le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, a débarqué mercredi dans une Maison-Blanche sans boussole, assommée par une controverse dont l’ancien journaliste-vedette de CBS Dan Rather écrivait la veille qu’elle pourrait avoir des répercussions aussi funestes que le scandale du Watergate.
Que soit révélée une implication de l’équipe de Donald Trump, ou de Donald Trump lui-même, dans l’ingérence pratiquée par Moscou pendant la campagne présidentielle américaine au détriment d’Hillary Clinton et il pourrait en effet devenir possible de scénariser pour le nouveau président le sort politique qui fut celui du démissionnaire Richard Nixon. Ce que vient en tout cas reconfirmer la polémique déclenchée par le congédiement du conseiller à la sécurité nationale Michael Flynn, c’est à quel point M. Trump semble capable en tout d’une nonchalance déconcertante — devant les faits en général, devant les règles démocratiques les plus élémentaires et devant les enjeux de géopolitique internationale.
Il a encore fait preuve de cette nonchalance en conférence de presse avec M. Nétanyahou au sujet du conflit israélo-palestinien, renonçant dans le vocabulaire de cinquante mots qui est le sien à défendre la solution à deux États, position traditionnelle des diplomaties américaine et européenne.
Ce renoncement serait peut-être moins troublant si M. Trump avait une solution de rechange pertinente à proposer, mais ce n’est pas le cas. Sa seule proposition, encore que vague, reviendra à s’arrimer à l’approche que défend depuis longtemps le premier ministre israélien, une approche consistant à faire passer la résolution du conflit israélo-palestinien par une grande négociation régionale (déjà tentée dans le passé, sans succès) avec des pays sunnites comme l’Égypte et l’Arabie saoudite.
Preuve que, trop content d’être libéré de Barack Obama et de John Kerry, M. Nétanyahou s’attend maintenant à pouvoir mener M. Trump par le bout du nez. La « solution à deux États est une étiquette » à laquelle il faut trouver de « nouvelles avenues de paix », a déclaré M. Nétanyahou avec arrogance.
Si illusoire qu’elle soit devenue, la solution à deux États reste néanmoins un rempart contre la colonisation israélienne de la Cisjordanie. Renoncer à ce rempart comme le fait M. Trump revient dans les faits à enterrer la promesse qu’un jour naîtra enfin un État palestinien et à accepter que l’État israélien accélère le développement de ses colonies. Entendu qu’Israël a le droit fondamental de vivre en sécurité et que la paix passe évidemment par la reconnaissance de son existence par ses voisins arabes. Mais la paix passe aussi par une reconnaissance réciproque et par la fin de l’occupation des territoires palestiniens. Là-dessus, M. Nétanyahou fait l’impasse.
Il se trouve par ailleurs qu’à l’issue d’un vote secret, le Hamas a élu lundi à la tête du gouvernement de Gaza un nouveau leader, Yehya Sinwar, un ultraradical appartenant à l’aile militaire de l’organisation. Intransigeance contre intransigeance, donc. Ce qui fait que beaucoup pensent qu’Israël et le Hamas, qui se sont livré trois guerres depuis 2008, en préparent une autre pour bientôt. Loin des propos creux qui se sont échangés mercredi à Washington.
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