An Embarrassing Admiration

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Deux semaines à peine après la démission du conseiller à la sécurité nationale, Michael Flynn, un nouveau membre du gouvernement Trump est sur la sellette en raison de ses relations avec la Russie. Le Washington Post révélait mercredi que le procureur général, Jeff Sessions, avait rencontré l’ambassadeur russe à Washington à deux reprises en 2016.

Dans le cadre des auditions devant le Sénat en vue de la confirmation de sa nomination, Sessions avait pourtant affirmé ne pas avoir rencontré de représentant de la Russie pendant la dernière campagne électorale. S’il nie avoir délibérément menti sous serment, Sessions apparaît incontestablement fragilisé. Alors que les démocrates réclament sa démission, les républicains — majoritaires au Congrès — semblent pour le moment se satisfaire de sa décision de se récuser dans toute enquête portant sur les élections de 2016.

Quel que soit le sort de Jeff Sessions, le FBI comme les commissions sur le renseignement du Sénat et de la Chambre des représentants apparaissent déterminés à faire la lumière sur les compromissions de Donald Trump avec la Russie. En l’espèce, les éléments déjà connus laissent à penser que cette « affaire russe » est plus grave et sérieuse que ne l’était à ses débuts celle du Watergate, qui poussa le président Nixon à la démission en août 1974.

Une affaire à trois volets

Il y a en fait trois volets au scandale impliquant Trump et la Russie. Le premier relève de la capacité des autorités russes à exercer une forme de chantage sur le 45e président des États-Unis. Selon le rapport d’un ancien agent de renseignement britannique, Christopher Steele, celles-ci disposeraient de preuves compromettantes pour l’ancien magnat de l’immobilier. Ces informations n’ont à l’heure actuelle pas été corroborées.

Il en va tout autrement du deuxième volet de l’affaire. Celui-ci concerne les interférences russes dans la dernière campagne électorale américaine. Dès juin 2016, la Russie est apparue comme le suspect principal dans le piratage informatique des instances du parti démocrate et des courriels de Mme Clinton. Le rapport des services de renseignement remis au président Obama avant qu’il ne quitte la Maison-Blanche a confirmé l’implication russe dans ces opérations de même que dans un effort de propagande destiné à discréditer la candidate Hillary Clinton.

La question essentielle est maintenant de savoir si ces actions d’une puissance étrangère destinées à influencer les élections ont été entreprises en concertation avec le candidat Trump ou son équipe. Plusieurs éléments alimentent cette thèse. En juillet 2016, Trump avait publiquement encouragé la Russie à pirater les courriels de Mme Clinton et à les diffuser. Le 2 octobre, un proche du candidat républicain, Roger Stone, annonçait la fin de la campagne de Clinton en utilisant le mot-clic #Wikileaks. Cinq jours plus tard, Wikileaks publiait une première série de courriels entre Mme Clinton et son directeur de campagne, John Podesta. En décembre 2016, le numéro deux du ministère russe des Affaires étrangères reconnut que des membres de l’entourage de Trump avaient été en contact avec des représentants de la Russie.

Ces affinités russes de la part de proches de Trump constituent le troisième volet de l’affaire. Jusqu’à cette semaine, Michael Flynn en était l’illustration la plus éclatante. Choisi comme conseiller à la sécurité nationale du président Trump, Flynn a contacté fin décembre 2016 l’ambassadeur russe à Washington pour discuter des sanctions que le gouvernement Obama venait de prendre contre Moscou en représailles aux interférences dans l’élection présidentielle. Flynn aurait alors assuré son interlocuteur que le futur gouvernement Trump abandonnerait ces sanctions.

Une vulnérabilité auto-infligée

En vertu d’une obscure loi datant de 1799, le Logan Act, il est interdit à toute personne hors de l’exécutif d’engager la responsabilité des États-Unis dans des dossiers de politique étrangère. Ce n’est pourtant pas le geste manifestement illégal qui a poussé Flynn à la démission, mais l’impossibilité pour le gouvernement Trump de continuer à dissimuler la vérité.

Trump perçoit cette « affaire russe » comme une attaque destinée à miner sa crédibilité de la part de démocrates frustrés. Le fait que le gouvernement Obama, dans les dernières semaines de son règne, ait tout fait pour rendre accessibles les preuves de l’implication de la Russie dans la campagne de 2016 ne peut que le conforter dans cette perception.

Cela étant, il est le principal artisan de son malheur et de la mise en cause de ses collaborateurs. S’il n’avait pas abondamment professé son admiration pour Vladimir Poutine et ses méthodes autocratiques, s’il n’avait pas toléré une trop grande proximité de ses principaux conseillers avec la Russie, s’il n’avait pas remis en question l’engagement américain au sein de l’OTAN, sa présidence ne serait pas menacée.

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