Disorder

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La débandade

Difficile d’imaginer cafouillage plus total de la part de la majorité républicaine au Congrès dans ses efforts pour « abolir et remplacer l’Obamacare ». Non pas que ce dérapage ait été entièrement imprévu. Cet échec n’est après tout qu’une nouvelle illustration, amplifiée par l’arrivée d’un président imprévisible à la Maison-Blanche, des profondes divisions qui agitent depuis des années le Parti républicain entre ses ultraconservateurs et son aile plus modérée.

Les républicains ont une première fois échoué à liquider la grande réforme votée sous Obama à la fin de juin, quand leur leader au Sénat, Mitch McConnell, constatant l’ampleur de la dissidence, a dû renoncer à tenir un vote. Un second revers a commencé à prendre forme vendredi dernier avec l’hospitalisation du sénateur John McCain, ce qui n’est évidemment pas sans ironie — M. McCain se trouvant à approuver le projet de démantèlement de l’Obamacare tout en disposant sûrement pour lui-même d’une excellente couverture d’assurance maladie… La déconfiture s’est confirmée lundi soir avec la défection de deux sénateurs additionnels, dont celui de l’Utah, Mike Lee, un homme pour qui les réductions d’impôt sont l’unique credo.

L’abrogation de la réforme devait être chose faite dans les toutes premières semaines de la nouvelle présidence. Il est vite devenu évident que M. Trump parlait à tort et à travers et qu’à défaire l’Obamacare, les quelque 20 millions d’Américains qui, grâce à cette réforme, étaient dorénavant en mesure de se procurer une assurance maladie à un coût plus raisonnable risquaient de se retrouver sans couverture.

Mardi, M. Trump, l’air résigné, a fait des déclarations toutes plus irresponsables les unes que les autres, poussant notamment l’imprévoyance jusqu’à recommander aux républicains d’abroger tout de suite l’Obamacare en remettant à plus tard l’adoption d’une loi de remplacement. Une avenue que plusieurs sénateurs ont rejetée sur le champ, conscients de sa bêtise comme des risques qu’elle faisait peser sur leur cote de popularité.

Jouant sur la fibre anti-interventionniste des Américains, les républicains auront réussi ces dernières années à convaincre un grand nombre d’entre eux que ce montage complexe qu’est l’Obamacare était inacceptable. Le temps a fini par contrecarrer cet argument, démontrant que la réforme jouait, malgré ses défauts, un rôle social utile.

Encore heureux que les républicains soient aussi divisés au Congrès. Certes, la confusion ambiante angoisse tous ces Américains qui craignent de perdre leur couverture. La bonne nouvelle, c’est que, les républicains se chamaillant, la réforme de M. Obama reste en vigueur.

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