Mark Zuckerberg: A False Apology

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Facebook a abusé de la confiance de dizaines de millions d’utilisateurs, informés de la nonchalance de l’entreprise par le scandale Cambridge Analytica. Que Mark Zuckerberg soit allé devant le Congrès américain s’étrangler d’excuses n’est pas suffisant.

Il a eu beau s’excuser à répétition (« Nous n’avons pas fait assez pour empêcher ces outils d’être utilisés à mauvais escient »), les remords exprimés par M. Zuckerberg devant le Congrès manquaient singulièrement de crédibilité. On sait que Facebook était au courant depuis 2015, sans avoir réagi, que Cambridge Analytica avait siphonné les données personnelles de dizaines de millions d’« amis » (87 millions, pour être plus précis) aux fins de manipulations politiques, s’agissant en particulier de servir la candidature de Donald Trump à la présidentielle et des tenants du Brexit en Grande-Bretagne. Ensuite, quand le scandale a éclaté au grand jour le 17 mars dernier, le p.-d.g. Zuckerberg s’est tenu coi jusqu’au 22, avant de finalement s’excuser. Une éternité à l’heure du numérique.

Il n’a guère été plus convaincant en affirmant, au cours de ses deux journées de comparution devant le Congrès, qu’il était ouvert à une forme de régulation d’Internet. Qu’il ait jugé cette régulation « inévitable » n’empêche pas son entreprise d’avoir consacré jusqu’à maintenant plus d’un million de dollars à lutter contre un projet de référendum en Californie qui permettrait au consommateur de refuser le partage de ses données.

Reste que l’affaire Cambridge Analytica contribue à une prise de conscience. Le scandale a au moins le mérite de percer le mensonge répandu par M. Zuckerberg voulant que l’utilisateur de Facebook soit propriétaire de ses données. Il nous sort la tête du sable en mettant au jour des pratiques nocives de captage d’informations personnelles. Il contribue à démasquer un modèle d’affaires qui revient en quelque sorte pour l’usager à signer à son insu un pacte avec le diable : gratuité contre renoncement à des pans de sa vie privée.

Il y a un procès à faire aux réseaux sociaux. Sous le couvert de la révolution technologique, Facebook, champion de l’évitement fiscal, est fondamentalement une entreprise ultracapitaliste de surveillance et de contrôle du consommateur, fondée sur la concentration monopolistique des marchés publicitaires.

Sur le plan politique, il est au mieux quand il devient un instrument de mobilisation sociale et progressiste. En même temps qu’il n’hésite pas, au nom de ses sacro-saints impératifs commerciaux, à faire preuve de la plus indécente complaisance à l’égard de gouvernements autoritaires. C’est ainsi que, cette semaine au Vietnam, un groupe de 50 opposants, blogueurs et défenseurs des droits de la personne ont écrit une lettre ouverte à Zuckerberg accusant Facebook de collusion avec la dictature pour avoir accepté de bloquer des comptes qui déplaisaient au régime. Au Myanmar, cette semaine encore, plusieurs ONG locales lui ont écrit pour dénoncer la négligence dont faisait preuve Facebook en mettant plusieurs jours à supprimer des billets haineux antirohingyas…

Tout cela pour dire que la façon dont M. Zuckerberg gère son empire dénote une absence certaine de sens éthique.

Que fera le Congrès américain dans la foulée de cette comparution ? Le Center for Digital Democracy (CDD), une association de défense des usagers du Net, veut croire que l’affaire Cambridge « va totalement changer la façon dont nous réglementons l’économie numérique ». Il y a certainement lieu de légiférer pour imposer à cette économie numérique, qui ne s’autorégule que superficiellement, plus de transparence et d’encadrement dans la protection des données. Il est cependant difficile de partager l’optimisme du CDD, comme le modèle d’affaires de Facebook est, après tout, en parfaite harmonie avec l’idéologie républicaine de déréglementation. L’intervention du Congrès risque d’être minimaliste.

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